Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 juin 2020, le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de Mayotte (SMEAM), représenté par Me A..., demande au juge des référés de la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 27 mai 2020 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte ;
2°) de rejeter la requête de la société Colas Mayotte ;
3°) de mettre à la charge de la société Colas Mayotte une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière en ce que le principe du contradictoire a été méconnu, en ce qu'il n'a pas bénéficié d'un délai suffisant pour assurer sa défense ;
- s'agissant des sommes relatives aux créances en principal des sociétés intimées, ces créances ne sont pas fondées ou sont, à tout le moins, sérieusement contestables ;
- en ce qui concerne les intérêts, leur calcul est erroné puisque la date revendiquée de leur point de départ ne peut être déterminée en l'absence de caractère certain, liquide et exigible des créances des sociétés intimées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
La présidente de la cour a désigné M. B... en application du livre V du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat intercommunal des eaux et de l'assainissement de Mayotte (SIEAM), aux droits duquel est venu le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de Mayotte (SMEAM), a conclu avec la société Colas Mayotte un marché de travaux reçu en préfecture le 7 avril 2015 portant sur le lot n° 1 " construction d'un réservoir de 3000 m3 " dans le cadre du renforcement des réseaux d'adduction d'eau potable du sud dans le village de Sada pour un prix de 1 280 663,04 euros. L'ordre de service a été notifié le 19 octobre suivant. Les sociétés SOS Insectes et Etanchéité Australe ont été agréées comme sous-traitant par le SIEAM. La direction des services techniques du SIEAM a visé, le 9 novembre 2015, l'état d'acompte relatif à l'avance forfaitaire due à Colas Mayotte pour un montant de 64 033,15 et le BET EIC en a fait de même le 9 novembre 2016. Puis, le maître d'oeuvre a visé, le 20 février 2017, l'état d'acompte n° 1 d'un montant total de 300 091,52 euros, reçu le 7 septembre 2016. À la même date, il a visé, pour un montant de 250 470,57 , l'état d'acompte n° 2 présenté par Colas Mayotte, état reçu le 7 septembre 2016, dont 243 896,57 revenant à cette société, une fois défalquée celle revenant au sous-traitant SOS Insectes, ainsi que l'état d'acompte n° 3, reçu le 8 septembre 2016, de Colas Mayotte, pour un montant de 264 965,72 . Toujours le 20 février 2017, le même maître d'oeuvre a visé l'état d'acompte n° 4 présenté par Colas Mayotte, pour un montant de 77 399,81 , reçu le 10 octobre 2016, dont 53 267,62 revenant à Colas Mayotte, et un état d'acompte n° 5, reçu le 9 novembre 2016, pour un montant de 37 050,89 dont 9 446,08 à revenir à Colas Mayotte. Les différentes sommes concernant Colas Mayotte, se retrouvent, au demeurant, dans un mandat du SIEAM en date du 27 mars 2017. Le 3 décembre 2018 le BET EIC a visé l'état d'acompte n° 6 faisant ressortir un montant total de 1 155 286,46 incorporant, pour un montant de 161 274,81 , les travaux correspondant à l'état n° 6 et à cette même date il a accepté, d'une part, l'état d'acompte n° 7 faisant ressortir un montant total de 1 191 052,93 , incorporant, pour un montant de 35 766,46 , les travaux correspondant à l' état n° 7, et, d'autre part, l'état d'acompte n° 8 faisant ressortir un montant total de 1 255 063,19 et incorporant, pour un montant de 64 010,26 les travaux correspondant à cet état n° 8.
2. Avant de saisir le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, la société Colas Mayotte a réclamé au SIEAM, dans le cadre de l'exécution de divers marchés non intégralement payés le versement des arrières par courrier en recommandé daté du 18 avril 2019 reçu le 26 avril suivant, ainsi que le paiement des intérêts moratoires et l'indemnité forfaitaire de recouvrement. S'agissant plus spécialement du marché en cause, la société Colas a ensuite adressé au SIEAM une demande indemnitaire par courrier recommandé en date du 6 février 2020 réceptionné le 10 février suivant portant notamment sur les décomptes impayés n° 6, n° 7 et n° 8.
3. Après avoir constaté que le SMEAM, qui n'a pas défendu en première instance, ne contestait ni que les travaux correspondant à ces situations, au demeurant approuvées par son maître d'oeuvre, avaient été réalisés, ni qu'il a mandaté certains des états d'acompte, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a, par une ordonnance du 27 mai 2020, condamné le SMEAM à verser, à titre de provision, une somme de 261 051,52 sur sa créance en principal, celle de 143 918,46 euros au titre des intérêts moratoires contractuels arrêtés au 10 février 2020, et celle de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.
4. Le SMEAM relève appel de cette ordonnance du 27 mai 2020.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
5. Le SMEAM soutient que l'ordonnance attaquée est irrégulière en ce qu'elle est intervenue sans qu'il ait été mis à même d'assurer sa défense. Il résulte, toutefois, de l'instruction, d'une part, que la demande présentée au premier juge par la société Colas lui a été adressée le 24 avril 2020 et a été reçue le même jour, avec un délai de 15 jours pour présenter des observations en défense, et, d'autre part, que l'état d'urgence sanitaire a pris fin à Mayotte le 18 mai 2020. Dans ces conditions et alors que l'ordonnance critiquée est intervenue le 27 mai 2020, le SMEAM n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas disposé du temps nécessaire pour produire un mémoire en défense, même sommaire et se bornant à contester les faits énoncés par la société Colas.
Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :
6. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge des référés, dans le cadre de cette procédure qu'elles instituent, de rechercher si, en l'état du dossier qui lui est soumis, l'obligation du débiteur éventuel de la provision est ou n'est pas sérieusement contestable sans avoir à trancher ni de questions de droit se rapportant au bien-fondé de cette obligation ni de questions de fait soulevant des difficultés sérieuses et qui ne pourraient être tranchées que par le juge du fond éventuellement saisi.
7. À l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance litigieuse, le SMEAM, qui, comme il a été dit au point 3, n'a pas produit en première instance, se borne à soutenir que les créances de la société intimée ne sont pas fondées ou, à tout le moins, qu'elles sont sérieusement contestables, sans aucune autre précision. Dans ces conditions, le syndicat mixte appelant ne peut utilement soutenir que c'est à tort qu'il a été condamné par le premier juge à verser les provisions contestées à la société intimée.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Colas Mayotte, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande le SMEAM au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens...
ORDONNE :
Article 1er : La requête n° 20BX01819 du SMEAM est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de Mayotte et à la société à responsabilité limitée Colas Mayotte.
Fait à Bordeaux, le 12 janvier 2021.
Le juge d'appel des référés,
B...
La République mande et ordonne au préfet de Mayotte, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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No 20BX01819