Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 novembre 2018 et le 9 décembre 2020, M. G..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 25 octobre 2018 ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de modifier la liste des agents inscrits sur le tableau d'avancement au grade de brigadier de police pour l'année 2017 et de l'y inscrire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du ministre de l'intérieur n'est pas intervenu après un examen particulier de sa situation ;
- il n'est pas établi que la composition de la commission administrative paritaire était régulière ;
- le ministre s'est estimé lié par l'avis de la commission administrative paritaire ;
- l'arrêté en litige est entaché d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste d'appréciation et porte atteinte à l'égalité de traitement entre fonctionnaires, dès lors qu'un agent présentant un moins bon profil que lui a été inscrit au tableau d'avancement pour 2017.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de M. G... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;
- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H... C...,
- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... G..., gardien de la paix affecté à Saint-André, relève appel du jugement du 25 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2017 par lequel le ministre de l'intérieur a fixé le tableau d'avancement au grade de brigadier de police pour l'année 2017 en tant qu'il n'y figure pas et que M. D... I... y est inscrit.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. G... conteste la réponse apportée par le tribunal aux moyens qu'il avait invoqués tirés de la composition irrégulière de la commission administrative paritaire, du défaut d'examen de sa situation et de l'erreur de droit qu'aurait commise le ministre en s'estimant en situation de compétence liée, une telle critique a trait au bien-fondé du jugement et non à sa régularité. Par suite, le moyen, ainsi soulevé, tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, selon l'article 34 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires, dans sa version applicable au litige, les commissions administratives siègent en formation restreinte lorsqu'elles sont saisies de questions résultant de l'application de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Aux termes de l'article 35 du même décret : " Lorsque les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer ".
4. Il ressort des mentions du procès-verbal de la séance du 30 mars 2017 de la commission administrative paritaire nationale compétente à l'égard du corps d'encadrement et d'application de la police nationale que la commission a siégé en formation restreinte sur l'avancement au grade de brigadier des gardiens de la paix remplissant les conditions pour être promus. Cette formation restreinte était composée de quatre membres ayant le grade de brigadier et un membre ayant le grade de gardien de la paix, ainsi que de cinq représentants de l'administration. Par suite, M. G... n'est pas fondé à soutenir que la commission administrative paritaire était irrégulièrement composée.
5. En deuxième lieu, pour procéder à la consultation de la commission administrative paritaire sur son projet de tableau annuel d'avancement au grade supérieur d'un cadre d'emploi et sur son projet de liste d'aptitude au cadre d'emploi de la catégorie supérieure, l'autorité administrative compétente doit, d'une part, préalablement à la présentation des projets de tableau et de liste, avoir procédé à un examen de la valeur professionnelle de chacun des agents remplissant les conditions pour être promus et, d'autre part, tenir à la disposition de la commission administrative paritaire les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour établir ses projets de tableau et de liste après avoir comparé les mérites respectifs des agents.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur n'aurait pas procédé à l'examen de la valeur professionnelle de M. G..., ou se serait abstenu de tenir à la disposition de la commission administrative paritaire les éléments sur lesquels il s'est fondé pour établir ses projets de tableau après avoir comparé les mérites respectifs des gardiens de la paix remplissant les conditions pour être promus au grade supérieur, alors qu'il ressort du procès-verbal de la commission que cette dernière a approuvé les propositions présentées pour l'ensemble des dossiers " après examen de la situation de l'ensemble des promouvables ". A cet égard, la circonstance qu'aucun nom, et notamment celui de M. G..., ne figurait sur ce procès-verbal n'est pas de nature à contredire cette mention. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de M. G... doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Pour l'établissement du tableau d'avancement de grade qui est soumis à l'avis des commissions administratives paritaires, il est procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents susceptibles d'être promus compte tenu des notes obtenues par les intéressés, des propositions motivées formulées par les chefs de service et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. Cette appréciation prend en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le fonctionnaire et l'ancienneté. ".
8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur se serait estimé lié par l'avis rendu par la commission administrative paritaire, contrairement à ce que soutient l'intéressé. La circonstance, à la supposer établie, que M. G... aurait été informé dès l'issue de la réunion de cette commission le 30 mars 2017 qu'il ne figurait pas sur le tableau d'avancement au grade de brigadier de police ne permet pas, à elle seule, de considérer que le ministre se serait estimé lié par cet avis.
9. En quatrième lieu, l'inscription au tableau d'avancement au grade supérieur n'étant pas de droit, la circonstance que M. G... remplissait les conditions lui permettant de prétendre à cet avancement est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 30 mai 2017. Si l'intéressé soutient qu'il dispose d'une ancienneté supérieure à celle de M. I..., il ressort des pièces du dossier que cette différence d'ancienneté est seulement de trois mois. M. G... fait valoir également qu'il a obtenu la note de 7 lors de son évaluation au titre de l'année 2016, alors que M. I..., qui figure au tableau d'avancement au titre de l'année 2017, n'a bénéficié que d'une note de 6. Il est toutefois constant que les notes 6 et 7 indiquent toutes deux que le fonctionnaire évalué se situe " parmi les meilleurs " du service. Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 17 du décret du 9 mai 1995 citées ci-dessus que la valeur professionnelle des agents n'est pas appréciée à la seule aune de leurs notations. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. G... et M. I... ont tous deux bénéficié d'appréciations élogieuses de leur supérieur hiérarchique au cours des trois années précédant l'établissement du tableau d'avancement en cause. En outre, M. I... a été considéré comme étant apte à des fonctions plus importantes dès l'année 2015, soit un an avant le requérant. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation ou une erreur de droit en décidant d'inscrire M. I... au tableau d'avancement au grade de brigadier pour 2017 et de ne pas y inscrire M. G..., quelle que soit l'appréciation portée à cet égard par le médiateur interne de la police nationale. Le ministre n'a pas davantage porté atteinte au principe d'égalité de traitement entre fonctionnaires d'un même corps, qui ne s'oppose pas à ce que l'autorité administrative règle de manière différente des situations distinctes.
10. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2017. Sa requête doit ainsi être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... G..., à M. D... I... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 4 février 2021 à laquelle siégeaient :
Mme F... B..., présidente,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme H... C..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2021.
La présidente,
Marianne B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX04066 2