2°) d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2017 du préfet de la Haute-Vienne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît également l'article 6-7° de l'accord franco-algérien dès lors qu'un des médicaments qui lui est prescrit n'est pas disponible dans son pays d'origine ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi sont illégales en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit, le préfet ayant estimé que cette décision et celle limitant à trente jours le délai de départ volontaire étaient la conséquence automatique du refus de titre de séjour alors qu'il ne s'agit que d'une simple faculté selon l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme F... ne sont pas fondés.
Par décision n°2018/012469 du 27 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a admis Mme F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme E... D... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... F..., ressortissante algérienne née le 8 janvier 1967, est entrée régulièrement en France le 17 février 2016. Le 18 mai 2017, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 7 décembre 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. Mme F... relève appel du jugement du 31 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7°) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...)". Il résulte de ces stipulations qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande sur ce fondement de vérifier, au vu de l'avis mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tout élément permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. Pour rejeter la demande de titre de séjour, le préfet de la Haute-Vienne s'est fondé notamment sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 6 septembre 2017, indiquant que si l'état de santé de Mme F... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Pour contredire cet avis, Mme F... soutient que l'un des médicaments qui lui est prescrit n'est pas commercialisé en Algérie. Il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux des 24 janvier et 6 novembre 2018, que Mme F... est atteinte d'un diabète de type 2, que son état de santé nécessite un suivi spécialisé et régulier, et que son traitement à base de Trulicity n'est pas disponible dans son pays d'origine. Ces allégations sont confirmées par l'ordonnance médicale du 1er décembre 2017 qui indique que le traitement à base de Trulicity lui a bien été prescrit, par le certificat médical du 4 juin 2018 établi par un spécialiste officiant à Mostaganem en Algérie qui précise que ce traitement est indisponible dans son pays d'origine, et par les attestations d'officines de pharmacie de Mostaganem ainsi que par l'attestation du laboratoire pharmaceutique Lilly qui a développé ce traitement, que ce dernier n'est pas commercialisé en Algérie. Pour contester l'allégation selon laquelle Mme F... ne peut avoir accès à un traitement adéquat dans son pays d'origine, le préfet de la Haute-Vienne produit en appel un extrait de la base de données MedCoi (Medical Country of Origin Information) de l'Algérie faisant état de l'accessibilité à d'autres molécules permettant une prise en charge correcte du diabète dans ce pays. Ainsi, si le médicament Trulicity, qui est un antidiabétique injectable et dont la molécule active est le Dulaglutide, n'est pas disponible en Algérie, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la requérante ne pourrait se voir prescrire un médicament équivalent au Trulicity qui serait disponible en Algérie, ni que la prescription d'un autre médicament serait moins efficace dans la prise en charge de sa pathologie. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à Mme F... un titre de séjour, le préfet de la Haute-Vienne n'a pas méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
5. En deuxième lieu, Mme F... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement les réponses apportées par le tribunal administratif, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
6. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour sont écartés. Dès lors, Mme F... n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité de ce refus à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours prise à son encontre et contre la décision fixant le pays de renvoi.
7. En quatrième et dernier lieu, s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, Mme F... reprend également en appel les moyens tirés de l'erreur de droit résultant de "l'automaticité " de cette obligation, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement les réponses apportées par le tribunal administratif. Il y a également lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2017. Par voie de conséquence, les conclusions présentées à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais non compris dans les dépens doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André A..., premier conseiller,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.
Le rapporteur,
Paul-André A...
Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX03764