Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2018, M. D...représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n°1802517,1802518 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 4 juin 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Haute-Garonne du 30 mai 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans le délai de 24 heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, en tout état de cause, de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes :
- il méconnaît les articles L. 211-1 et suivant du code des relations entre le public et l'administration en ce qu'il est insuffisamment motivé en fait ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;
- le préfet a méconnu l'article 4 du règlement n°604/2013 en date du 26 juin 2013, les brochures relatives à la procédure ne lui ayant pas été lues alors qu'il a déclaré ne pas savoir lire l'arabe mais uniquement le parler ;
- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Sur l'arrêté portant assignation à résidence :
- il méconnaît les articles L. 561-1 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il est insuffisamment motivé quant au caractère raisonnable de la perspective de son éloignement ;
- il est dépourvu de base légale en tant que l'arrêté de transfert vers l'Italie est illégal.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 4 janvier 2019 et le 8 février 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut dans le dernier état de ses écritures, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, au non-lieu à statuer.
Il fait valoir que :
- M. D...a désormais la qualité de réfugié et est titulaire d'une carte de résident valable dix ans ; il en résulte qu'à la date de l'enregistrement de sa requête d'appel, il n'avait aucun intérêt à agir ; à tout le moins, sa requête est dépourvue d'objet.
- les moyens soulevés par M. D...à l'encontre de l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes et de l'arrêté portant assignation à résidence ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la formation de jugement est susceptible de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 30 mai 2018 portant transfert aux autorités italiennes pour l'examen de la demande d'asile de M. D...(caducité de l'arrêté en raison de l'expiration du délai de six mois défini à l'article 29 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013, ce délai ayant recommencé à courir à la date à laquelle le tribunal administratif a statué en vertu de l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile).
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Cécile Cabanne pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. A...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant soudanais né le 2 mars 1990, est entré irrégulièrement en France le 6 juin 2017, selon ses déclarations, et y a déposé une demande d'asile le 29 août 2017, après s'être présenté le 2 août 2017 à la plateforme d'accueil des demandeurs d'asile. La consultation du fichier Eurodac a fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées par les autorités italiennes le 16 avril 2017. Ces dernières ayant implicitement accepté la demande de reprise en charge adressée par le préfet de la Haute-Garonne le 25 octobre 2017, ce dernier a, par deux arrêtés du 30 mai 2018, décidé de transférer M. D...aux autorités italiennes, et l'a assigné à résidence. M. D...relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 4 juin 2018 a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 30 mai 2018.
Sur l'arrêté de transfert :
2. Il ressort des pièces du dossier que si l'arrêté du 30 mai 2018 a été exécuté le 2 juillet 2018, M. D...est revenu en France le 8 juillet suivant et y a déposé une nouvelle demande d'asile. Le préfet de la Haute-Garonne a délivré le 19 juillet 2018 à M. D...une attestation de demande d'asile selon la procédure normale. En outre, il n'est pas contesté qu'antérieurement à l'enregistrement du présent appel le 29 octobre 2018, M. D...est devenu titulaire d'une carte de résident valable dix ans après que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a reconnu la qualité de réfugié le 20 septembre 2018. Dans ces conditions, les conclusions de M. D...tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2018 portant transfert aux autorités italiennes ainsi que les conclusions à fin d'injonction tendant à ce que lui soit délivrée une attestation de demande d'asile en procédure normale sont devenues sans objet avant même l'enregistrement de la requête d'appel. Par suite, ces conclusions sont irrecevables et doivent donc être rejetées.
Sur la mesure d'assignation à résidence :
3. En premier lieu, M. D...fait valoir que la mesure d'assignation à résidence est dépourvue de base légale en raison de l'annulation de la mesure de transfert qui la fonde. Il résulte cependant de ce qui précède que l'arrêté du 30 mai 2018 portant transfert aux autorités italiennes n'est pas annulé. Par voie de conséquence, ce moyen ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : 1°(...) fait l'objet d'une décision de transfert (...) ".
5. D'une part, l'arrêté vise l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M. D...fait l'objet d'une décision de remise aux autorités italiennes dont l'exécution demeure une perspective raisonnable eu égard à l'accord implicite de transfert des autorités italiennes en date du 26 décembre 2017 tout en précisant que la mesure ne peut être exécutée immédiatement en vertu de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que M. D...justifie d'une adresse où il peut être assigné à résidence. L'arrêté énonçant les circonstances de droit et de fait fondant la mesure d'assignation à résidence, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
6. D'autre part, en se bornant à soutenir qu'il n'y a pas de perspective raisonnable que la mesure de transfert dont il fait l'objet soit exécutée, alors au demeurant qu'elle l'a été, M. D... n'assortit pas son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.
8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 20 février 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2019.
Le rapporteur,
Paul-André A...Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
No18BX03745