3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire, dès lors qu'il n'a pas été informé de la possibilité de formuler des observations auprès du préfet ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation, révélé notamment par sa motivation et l'absence de mise en oeuvre de son droit d'être entendu ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a toujours déclaré être mineur ; son acte de naissance en atteste et le préfet n'apporte pas de preuves suffisantes de nature à renverser la présomption de validité que cet acte d'état civil tient de l'article 47 du code civil ; le préfet ne peut se prévaloir de l'examen osseux effectué puisqu'il comporte une trop grande marge d'erreur ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
- ses conséquences sur sa situation sont manifestement disproportionnées au regard des buts qu'elle poursuit de sorte qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision de refus de délai de départ volontaire :
- elle est dépourvue de base légale ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation en fait et en droit et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- ses observations n'ont pas été recueillies préalablement à l'édiction de cette décision, en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet s'est cru en situation de compétence liée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation car aucun risque de fuite n'est caractérisé ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est insuffisamment motivée et méconnaît l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 9 juillet 2018, le préfet de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
M. B...A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2018.
II. Par une requête enregistrée le 24 mai 2018 sous le n°18BX02075, M. B...A..., représenté par Me Laspalles, demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n°1801317 du 19 mars 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 mars 2018 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que les moyens invoqués dans la requête au fond sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement. Toutes les conditions prévues par l'article R. 811-17 sont donc remplies.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 juillet 2018, le préfet de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête de M. B...A.... Il fait valoir que les conditions prévues par l'article R. 811-17 ne sont pas remplies.
M. B...A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 mai 2018.
Par ordonnances du 5 juin 2018 la clôture de l'instruction, dans les instances n°18BX01179 et 18BX02075, a été fixée au 16 juillet 2018 à 12 heures.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Agnès Bourjol a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...A..., ressortissant malien, est entré en France le 24 février 2018 selon ses déclarations. Il a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à l'annulation des décisions en date du 14 mars 2018 par lesquelles le préfet de Tarn-et-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement du 19 mars 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande et il sollicite le sursis à exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans ; (...) ". L'article 47 du code civil dispose par ailleurs que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".
3. L'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il résulte également de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.
4. M.A..., qui est entré en France sans document d'identité, soutient qu'il était mineur à la date de la décision contestée, en se prévalant d'un jugement supplétif d'acte de naissance du 15 janvier 2018 établi par le tribunal d'instance de Yélimane et d'un acte de naissance délivré le 18 janvier 2018, qui indiquent qu'il est né le 10 juin 2003.
5. Ainsi qu'il a été dit, il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'administration d'établir que les documents dont se prévaut M. A...sont falsifiés. Le préfet produit un examen technique réalisé par la cellule fraude documentaire de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Toulouse dont il résulte que le jugement supplétif, document dépourvu de caractère sécurisé sur lequel aucun avis n'est en conséquence exprimé, comporte une faute d'orthographe et une erreur de date. En ce qui concerne l'acte de naissance, il est indiqué qu'il s'agit d'un " document sécurisé techniquement authentique " mais qu'il présente une irrégularité au niveau de son établissement, la numérotation sécurisée de l'acte au moyen d'un tampon encreur en lieu et place de la typographie n'étant pas conforme. Cette anomalie dans l'établissement de l'acte ne suffit pas à elle seule à démontrer le défaut d'authenticité des mentions de celui-ci, notamment de la date de naissance, dont la preuve incombe à l'administration, laquelle n'a pas saisi les autorités maliennes aux fins de vérification du document d'état civil fourni par l'intéressé. Par ailleurs, l'examen osseux, qui a révélé que " l'aspect de maturation osseuse squelettique de M. C...est compatible avec un âge osseux supérieur ou égal à 18 ans d'après les critères du poignet " n'est pas davantage de nature à remettre en cause les mentions de l'acte d'état civil produit par M. A.... Le préfet de Tarn-et-Garonne ne pouvait dès lors regarder M. A...que comme mineur à la date de la décision contesté. Il en résulte que celui-ci est fondé à soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et que le préfet de a dès lors méconnu les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement sans délai et, par voie de conséquence, de la décision fixant le pays de destination qui se trouve ainsi dépourvue de base légale.
Sur la requête aux fins de sursis à exécution :
7. Le présent arrêt, qui statue sur la requête de M. A...à fin d'annulation du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 19 mars 2018, rend sans objet ses conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement.
Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Laspalles, avocat de M.A..., au titre des dispositions combinées des articles 37 alinéa deux de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18BX02075.
Article 2 : Le jugement n°1801317 du 19 mars 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse et l'arrêté du 14 mars 2018 du préfet de Tarn-et-Garonne sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à Me Laspalles, avocat de M. B...A..., la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 aliéna de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, au préfet de Tarn-et-Garonne et à Me Laspalles.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
Mme Agnès Bourjol, conseiller.
Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.
Le rapporteur,
Agnès Bourjol
Le président,
Marianne Pouget
La greffière,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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18BX01779, 18BX02075