Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 avril 2019 et le 18 novembre 2020, Mme E... H..., représentée par Me I..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 février 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 3 février 2017 du département du Lot ;
3°) d'enjoindre au département du Lot, d'une part, de procéder à la réalisation de travaux de renforcement et de raccordement de deux murs de soutènement afin de mettre un terme au glissement de terrain et au risque d'éboulements de gravats sur la voie publique et, d'autre part, de lui fournir tous les documents techniques relatifs à la réalisation de ces murs afin de déterminer quels travaux peuvent être réalisés sans qu'il y soit porté atteinte ;
4°) de mettre à la charge du département du Lot une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le département du Lot n'avait pas opposé de refus à sa demande de travaux sur les murs de soutènement dès lors qu'à défaut de réponse expresse sur ce point dans la décision du 3 février 2017, le département doit être regardé comme ayant implicitement rejeté cette demande ; le jugement est entaché d'irrégularité dans cette mesure ;
- le jugement est également irrégulier dans la mesure où le tribunal a retenu qu'elle s'était bornée à solliciter la réalisation de travaux sur le talus alors qu'elle a également demandé que les ouvrages publics de soutènement soient confortés ;
- la décision du département du Lot du 3 février 2017 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle refuse implicitement de procéder aux travaux nécessaires sur les murs de soutènement, alors que l'entretien de ces ouvrages publics, accessoires de la voie qu'ils protègent, lui incombe et que leur insuffisance pour supporter les glissements de terrain et les éboulements de pierres et de terre risque de causer de graves risques pour la sécurité publique ;
- la rapport d'expertise qu'elle produit, s'il n'a pas été réalisé au contradictoire du département, n'est pas dépourvu de toute valeur ;
- il ressort des éléments qu'elle produit que l'ouverture de la fouille du talus pendant deux mois pour les travaux réalisés par le département a conduit à une décompression du terrain à l'origine de l'apparition de fissures dans sa propriété ;
- les travaux réalisés en 1996 ont conduit à une déstabilisation du talus situé sur sa propriété, qu'un raccordement entre les deux ouvrages réalisés par le département permettrait de compenser.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2020, le département du Lot, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'effondrement du talus est dû, en partie, au système d'évacuation des eaux pluviales défaillant de Mme H... ;
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le refus opposé à Mme H... ne concerne que l'entretien des talus et que sa demande préalable ne concernait que ce point ;
- le rapport d'expertise produit par Mme H... n'a pas été réalisé à son contradictoire et doit être écarté des débats ou, à tout le moins, considéré au regard de sa juste valeur ;
- il n'a pas commis l'erreur manifeste d'appréciation que lui reproche la requérante et aucun défaut d'entretien normal ne peut être retenu à son encontre ;
- contrairement à ce que soutient Mme H..., il ne résulte pas du rapport technique qu'elle produit que les travaux de confortement de son immeuble ne pourraient être réalisés avant une opération de stabilisation du mur de soutènement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... F...,
- les conclusions de Mme L... B..., rapporteure publique,
- et les observations de Me K..., représentant le département du Lot.
Considérant ce qui suit :
1. Mme H... est propriétaire d'une maison d'habitation, sur la parcelle cadastrée n° 473 au lieu-dit " Rigaudès " sur le territoire de la commune de Belmontet, qui surplombe le croisement des routes départementales n° 4 et n° 23. Le département du Lot a fait procéder à divers travaux pour l'aménagement de cette intersection en créant notamment des murs de soutènement, en procédant au confortement d'un talus de déblais et en réalisant un muret quelques mètres en retrait de la voie publique. Par un courrier du 2 janvier 2017, Mme H... a signalé au département du Lot le mauvais état de diverses installations et lui a demandé de faire procéder aux travaux nécessaires pour y remédier. Mme H... a sollicité du tribunal administratif de Toulouse qu'il annule la décision de rejet qui a été opposée à sa demande par le département du Lot le 3 février 2017 et qu'il lui enjoigne de procéder aux travaux ainsi que de lui fournir tous les documents techniques relatifs à la réalisation des murs. Elle relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Si Mme H... soutient que le jugement attaqué est irrégulier dès lors que c'est à tort que les premiers juges ont retenu, d'une part, que le département du Lot n'avait pas opposé de refus à sa demande de travaux sur le talus adjacent au mur de soutènement et, d'autre part, que sa demande préalable ne concernait pas le confortement des murs de soutènement, de telles considérations ne relèvent pas de la régularité mais du bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Toulouse.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Il ressort des termes du courrier du 2 janvier 2017 adressé au département du Lot que Mme H... y a notamment fait état d'un insuffisant dimensionnement du mur de soutènement en bordure de sa propriété, dont le profil technique complique l'aménagement de la partie de terrain sus-jacente qui lui appartient, de la nécessité de prolonger les travaux récemment achevés en direction et au-dessus du mur de confortement existant, d'un risque d'accident compte tenu des possibilités d'éboulement vers la chaussée du soutènement de l'ancienne rampe d'accès, ainsi que de la déstabilisation du terrain situé entre l'ancienne rampe d'accès et le mur de soutènement depuis la réalisation de cet ouvrage. Mme H... a conclu son courrier, rédigé sans l'aide d'un avocat, en demandant notamment au département de faire procéder en urgence aux travaux, notamment de confortement, nécessaires pour prévenir le risque d'accident de la circulation sur la zone litigieuse. Dans ces conditions, l'intéressée doit être regardée comme ayant notamment sollicité du département du Lot la réalisation de travaux sur les murs de soutènement bordant sa propriété.
4. Par ailleurs, si le département du Lot s'est borné à constater, dans la décision du 3 février 2017 litigieuse, d'une part, l'absence de preuve d'une quelconque emprise de la chaussée sur la propriété de l'intéressée et, d'autre part, que la responsabilité du talus bordant le mur de soutènement ne lui incombe pas dès lors que celui-ci ne fait pas partie de son domaine public et qu'il n'est ni un accessoire, ni une dépendance de la voie publique, il a néanmoins rejeté l'ensemble de la demande de Mme H..., y compris donc la demande qu'elle avait présentée tendant à la reprise et au prolongement des murs de soutènement bordant sa propriété. La requérante est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande en se bornant à constater l'inopérance des moyens qu'elle avait soulevés, qui ne visent que des travaux relatifs aux murs de soutènement, à l'encontre de la décision du département du Lot du 3 février 2017.
5. Mme H... produit notamment à l'instance l'avis d'un expert, dont la cour peut tenir compte bien qu'il n'ait pas été réalisé au contradictoire du département du Lot, ainsi qu'un " mémoire technique " d'une entreprise de génie civil consultée sur la possibilité de réaliser des travaux de confortement de la maison. Il ressort de ces avis techniques que le premier mur de soutènement construit en 1996 ne présente pas de signe de faiblesse et que s'il ne suffit pas à soutenir l'intégralité du talus situé en amont, celui-ci est actuellement stable grâce à l'enracinement de la végétation. Il en ressort également que le second mur de soutènement construit en 2016 présente quelques fissures mais pas de déformation et qu'il a probablement été réalisé sans que l'ensemble des prescriptions techniques du fabricant des blocs de béton utilisés ne soient respectées. Néanmoins, l'expert consulté par Mme H... n'en tire aucune conséquence quant aux fissures constatées dans l'habitation de l'intéressée, qu'il impute à la fouille du talus restée ouverte pendant une suspension des travaux, ayant provoqué une déstabilisation du sol, ni quant à un éventuel risque d'affaissement du talus. Si le mémoire technique de l'entreprise de génie civil consultée ensuite indique que ces fissures proviennent soit des travaux de réalisation du mur de soutènement, soit de l'instabilité de celui-ci qui entraîne un affaissement et une reptation des bâtis, les termes mesurés et hypothétiques de cet avis ne sauraient permettre de conclure à l'imputabilité des désordres dont se prévaut Mme H... à l'existence et à l'état des murs de soutènement réalisés en bordure de sa propriété. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte d'aucune des pièces versées au dossier qu'existerait un risque d'éboulement ou d'affaissement du talus menaçant la sécurité des usagers des routes départementales situées en contrebas. Par suite, les moyens soulevés par la requérante à l'encontre de la décision par laquelle le département du Lot a refusé de faire droit à sa demande de reprise et de prolongement des murs de soutènement doivent être écartés.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le département du Lot a refusé de faire procéder à des travaux de reprise des murs de soutènement en bordure de sa propriété. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ces conclusions. Si la requérante a également demandé qu'il soit enjoint au département de produire tous les documents techniques relatifs à la réalisation des murs afin de lui permettre d'apprécier les travaux qu'elle peut réaliser sur sa propriété privée sans y porter atteinte, cette injonction n'est pas impliquée par l'arrêt de la cour sur le litige relatif aux travaux de confortement des murs, et il appartient à la requérante de se procurer ces documents selon les modalités prévues par le code des relations entre le public et l'administration.
7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande Mme H... au titre des frais exposés pour le présent litige soit mise à la charge du département du Lot, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme H... la somme que demande le département du Lot au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme H... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département du Lot au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... H... et au département du Lot.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme J... G..., présidente,
Mme A... D..., présidente-assesseure,
Mme C... F..., conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 février 2021.
La rapporteure,
Kolia F...
La présidente,
Catherine G...
La greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au préfet du Lot en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01312