2°) d'annuler la décision du 7 avril 2016 par laquelle le directeur général de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) lui a refusé le statut d'apatride ;
3°) d'enjoindre à l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides de reconnaître sa qualité d'apatride, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation, dès lors que l'OFPRA a entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier et sérieux de sa situation, l'OFPRA ne démontrant pas que les documents de naissance produits sont des faux, qu'il n'est pas établi qu'il se soit trompé sur le lieu de naissance de ses parents et que la ville d'où il est originaire était au Kosovo, alors province de la République de Serbie, où on parle l'albanais et non le serbe ;
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu que l'OFPRA a entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'OFPRA a considéré qu'il pouvait solliciter la nationalité serbe en vertu de la Loi entrée en vigueur le 29 décembre 2004, alors qu'il n'en remplissait pas les conditions étant de nationalité kosovare au 4 février 2003 et non serbe, et relevait donc de l'article 1er de la Convention de New-York, aucun Etat ne le considérant comme ressortissant malgré ses démarches ;
- la décision du 7 avril 2016 a été prise par une autorité incompétente qui n'était pas habilitée à agir en lieu et place du directeur général de l'OFPRA ;
- l'OFPRA n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ni à une instruction sérieuse de sa demande pour les mêmes motifs qu'évoqués précédemment ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il relève de l'article 1er de la Convention de New-York, la Serbie ne le reconnaissant pas comme son ressortissant malgré ses démarches.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2019, l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides, représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête de M. G... et à ce qu'il soit mis à la charge de ce dernier la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- sa décision a été prise par une autorité compétente en vertu de la décision du 28 décembre 2015 régulièrement publiée au Bulletin officiel du ministère de l'intérieur n°2016-02 du 15 février 2016, donnant délégation à M. D... A..., officier de protection, chef de bureau ;
- la décision du 7 avril 2016 indique suffisamment les motifs sur lesquels elle se fonde, notamment les éléments de faits relatifs à la personne du requérant, ainsi que les raisons pour lesquelles il ne répond pas aux critères posés par l'article 1er de la Convention de New-York ;
- l'OFPRA n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'acte de naissance de l'intéressé comporte de nombreuses anomalies tendant à démontrer qu'il s'agit d'un document apocryphe ne permettant pas d'établir son identité, qu'il est bien indiqué dans le compte rendu que la municipalité dont il serait originaire se situait en Serbie à majorité albanophone, mais que ses déclarations sur les lieux de naissance de ses parents ne correspondent pas à l'acte de naissance, et qu'au vu de telles contradictions, l'Office n'a pas pu établir la réalité des faits invoqués par l'intéressé sur son parcours et son état civil ; sa situation relève de la loi sur la nationalité serbe alors qu'il s'était lui-même prévalu de la délivrance d'un passeport serbe et qu'il ne démontre pas que les autorités serbes auraient refusé de le reconnaître comme l'un de leurs ressortissants.
M. B... G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2018.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides, ensemble le décret n° 60-1066 du 4 octobre 1960 portant publication de cette convention ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme C... E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... G..., qui a déclaré être né le 21 décembre 1971 à Bujanovac au Kosovo, est entré en France irrégulièrement le 25 octobre 2005 et y a sollicité l'asile le 23 décembre suivant. Par une décision du 10 mars 2006, confirmée par une décision de la Cour Nationale du droit d'asile du 9 mai 2007, l'OFPRA a rejeté sa demande. Par une décision du 31 mai 2007, il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, et a été placé en centre de rétention administrative par une décision du 23 janvier 2008. Il a sollicité le 7 mars 2014 auprès de l'OFPRA le bénéfice du statut d'apatride. Par une décision du 7 avril 2016, le directeur général de l'OFPRA a rejeté sa demande. M. G... relève appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, M. G... soutient que le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation. Toutefois, les premiers juges ont énoncé au point 3 de leur jugement que la décision litigieuse comportait les motifs de droit et de fait, pour lesquels ils ont estimé qu'elle était suffisamment motivée. Le jugement attaqué n'est donc entaché d'aucune irrégularité à ce titre.
3. En second lieu, M. G... soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'OFPRA n'a pas entaché sa décision ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation. Cependant, cette critique qui se rattache au bien-fondé du jugement attaqué est sans incidence sur sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, M. G... reprend dans les mêmes termes en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premières juges, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée. Dans ces conditions, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
4. En deuxième lieu, M. G... soutient que l'OFPRA aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa demande. D'une part, la décision du 7 avril 2016 vise les articles L. 812-1 et R. 812-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique qu'il n'apporte par la preuve qu'il répond à la définition d'apatride telle que prévue par l'article 1er paragraphe 1er de la Convention de New-York du 28 septembre 1954. D'autre part, la décision reprend les éléments de faits personnels propres au requérant, l'identité dont il se prévaut, l'acte de naissance qui indique comme lieu de naissance " Bujanovsc " et non " Bujanovac " contrairement à ce que soutient l'intéressé ne permettent pas de garantir son authenticité, et relève les contradictions entre les documents d'état civil de ses parents et les lieux de naissance qu'il a déclaré lors de ses déclarations orales. De plus, il est précisé qu'il n'est pas permis d'établir le parcours de l'intéressé entre 1971 et 1999 en Serbie, alors qu'il ne parle pas le serbe, mais qu'il prétend avoir été en possession d'un passeport serbe en 1999. Il est également mentionné qu'il a eu des échanges avec les autorités consulaires de Croatie, de Slovénie et de Serbie en 2008. Enfin, l'OFPRA retient qu'en l'absence de documents probants sur l'état civil du demandeur, le statut d'apatride ne saurait être reconnu à l'intéressé par les seuls échanges avec les représentations diplomatiques en France de plusieurs pays. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte-tenu des mentions de fait précis figurant dans la décision contestée, que le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'aurait pas procédé à un examen particulier et sérieux de la situation de M. G.... Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention (...) ". Le paragraphe 1 de l'article 1er de la convention précitée, ratifiée par ordonnance du 23 décembre 1958 et publiée par le décret susvisé du 4 octobre 1960 stipule qu'" Aux fins de la présente convention, le terme "apatride" désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation ". Il incombe à toute personne se prévalant de la qualité d'apatride d'apporter la preuve qu'en dépit de démarches répétées et assidues, le ou les Etats de la nationalité desquels elle se prévaut ont refusé de donner suite à ses démarches.
6. Pour établir le refus des autorités serbes de le reconnaître comme citoyen de ce pays, M. G... se borne à soutenir qu'il a contacté en vain les autorités des Etats issus de l'ex-Yougoslavie en 2008, sans toutefois produire ces courriers ou les réponses que celles-ci lui ont apportées ainsi que le mentionne la décision litigieuse, et à produire en première instance des copies des courriers adressées par télécopie le 3 février 2012 aux autorités serbes, kosovares, albanaises, macédoniennes et monténégrines, sans préciser si une réponse lui a été apportée. Enfin, la circonstance, à la supposer établie, qu'il n'ait pas été éloigné en 2008 n'est pas de nature à établir qu'il est dépourvu de nationalité, alors qu'il n'était en possession d'aucun document d'identité. Si M. G... établit ainsi qu'il a accompli des démarches, celles-ci ne peuvent néanmoins être qualifiées de répétées et assidues restées vaines en vue d'obtenir la nationalité d'un de ces Etats. Dans ces conditions, en refusant de lui reconnaître le statut d'apatride, le directeur général de l'OFPRA n'a pas méconnu les stipulations de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 et des dispositions de l'article L. 812-1 du code du séjour de l'étranger et du droit d'asile, ni entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de celles-ci.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2016 par laquelle le directeur général de l'OFPRA lui a refusé le bénéfice du statut d'apatride. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, et les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G... et à l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme H... J..., présidente-assesseure,
Mme C... E..., conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.
Le rapporteur,
Agnès E...Le président,
Dominique NavesLe greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N°18BX04422