Il soutient que les décisions annulées ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des circonstances familiales invoquées par M. E...,
Par un mémoire enregistré le 22 juin 2021, M. E..., représenté par Me Durand, conclut au rejet de la requête, subsidiairement à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi et à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jours de retard, en tout état de cause à ce que soit versé à son conseil la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions litigieuses sont insuffisamment motivées et n'ont pas été précédées d'un examen particulier de sa situation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et celles lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français sont privées de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et sont entachées d'erreurs manifestes d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est également privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
II - Par une requête enregistrée le 6 septembre 2019 sous le n°21BX01757,
le préfet de la Haute-Garonne conclut à ce que la cour prononce un sursis à exécution du jugement du 23 mars 2021, en reprenant les mêmes moyens que dans la requête
n° 21BX01753.
Par un mémoire enregistré le 22 juin 2021, M. E..., représenté par Me Durand, conclut au rejet de la requête et par les mêmes moyens que dans la requête n° 21BX01753.
Par lettre en date du 7 septembre 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de M.E..., tendant à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi relèvent d'un litige distinct et sont dès lors irrecevables en raison de leur tardiveté.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... E..., né le 1er mai 1971 à Mostaganem (Algérie), de nationalité algérienne, est entré sur le territoire français le 8 décembre 2017 muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Après avoir sollicité son admission au séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade, il a fait l'objet, le 28 novembre 2018, d'un arrêté du préfet de la Haute-Garonne lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 18 décembre 2018, il a sollicité le bénéfice de l'asile qui lui a toutefois été définitivement refusé par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 12 juillet 2019. Par un second arrêté du 29 janvier 2021, le préfet de la Haute-Garonne lui a alors fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de six mois. Par une première requête enregistrée sous le n° 21BX01753, le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du 23 mars 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions du 29 janvier 2021 portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et a rejeté le surplus de la demande de M. E.... Par une seconde requête, enregistrée sous le n° 21BX01757, le préfet demande à la cour de prononcer de prononcer le sursis à exécution de ce jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes enregistrées sous les n° 21BX01753 et 21BX01757 présentent à juger des mêmes questions et sont dirigées contre un même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un même arrêt.
Sur la recevabilité des conclusions présentées par M. E... :
3. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de renvoi, refusant un délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire français étant distinctes, les conclusions les concernant relèvent de litiges distincts et ne sont dès lors recevables devant la cour qu'à la condition d'avoir été enregistrées dans le délai d'appel ayant couru contre le jugement. Il en va toutefois autrement de conclusions incidentes tendant à l'annulation des décisions prises sur le fondement ou en exécution de la décision faisant l'objet de l'appel principal et présentant un lien suffisant avec celle-ci. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué du 23 mars 2021, prononçant l'annulation des décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français et rejetant la demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi, a été notifié à l'avocat de la requérante, conformément aux dispositions de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée, le 25 mars 2021. Le courrier de notification précisait que cette notification faisait courir le délai d'appel qui est d'un mois. Dans ces conditions, les conclusions de M E... présentées dans le litige introduit par le préfet de la Haute-Garonne contre le jugement du 23 mars 2021 et tendant à obtenir l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi, qui ne sont pas intervenues sur le fondement ou en exécution des décisions annulées par le tribunal, soulèvent un litige distinct et doivent donc être regardées comme présentées à titre principal en appel. Il suit de là que ces conclusions sont tardives et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées comme irrecevables.
Sur le moyen retenu par le Tribunal administratif pour prononcer l'annulation des décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français :
4. Aux termes du II l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :(...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;(...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 5 (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. E... s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 28 novembre 2018 en dépit du rejet des recours qu'il avait présenté contre cette mesure devant le tribunal administratif de Toulouse puis, postérieurement aux décisions litigieuses, devant la cour et qu'il ne peut présenter de documents d'identité ou de voyage en cours de validité ni ne justifie d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale. Ainsi et comme l'a relevé le premier juge, sa situation entre dans les conditions prévues par les dispositions précitées du d) et du f) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, les circonstances que son fils mineur soit scolarisé dans un lycée de Toulouse et souffrait, en 2018, d'un décollement de la rétine droite compliquée d'une cataracte totale, que l'intéressé réside en France depuis trois années, qu'il encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine et que le recours qu'il a formé devant la cour à l'encontre du jugement rejetant sa demande tendant à l'annulation d'une précédente mesure d'éloignement était toujours pendant à la date des décisions litigieuses ne permettent aucunement de considérer que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le risque que l'intéressé se soustraie à cette nouvelle mesure d'éloignement n'est pas établi.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a considéré qu'il n'existait pas de risque que M. E... se soustraie à l'obligation quitter le territoire du 29 janvier 2021.
7. Il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... à l'encontre des décisions du 29 janvier 2021 portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Sur la légalité des décisions litigieuses :
8. En premier lieu, par un arrêté préfectoral du 15 décembre 2020, publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 31-2020-290 de la préfecture, le préfet de la Haute-Garonne a donné, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général de la préfecture et de la directrice des migrations et de l'intégration et de l'adjointe à la directrice des migrations et de l'intégration, délégation de signature à Mme B... D..., chef du bureau de l'éloignement et du contentieux, à l'effet de signer notamment les décisions prévues aux articles L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les arrêtés portant décision fixant le pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français manque en fait et doit être écarté.
9. En deuxième lieu, les décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français comportent les circonstances de droit et de fait, qui en constituent le fondement. Par suite, elles sont suffisamment motivées au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. En outre et contrairement à ce que soutient M. E..., il ne résulte pas de cette motivation que le préfet aurait omis de procéder à un examen particulier de sa situation.
10. En troisième lieu, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire étant devenue définitive M. E... n'est pas fondé à se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision pour demander l'annulation des décisions portant refus d'accorder un délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
11. En quatrième et dernier lieu, si M. E... fait valoir qu'il résidait en France depuis trois années à la date des décisions portant refus d'accorder un délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois, que le recours qu'il a formé devant la cour à l'encontre du jugement rejetant sa demande tendant à l'annulation d'une précédente mesure d'éloignement était toujours pendant à la date de cette décision d'interdiction de retour litigieuses et que son fils et son épouse n'ont pas fait l'objet d'une telle mesure, ces circonstances ne permettent pas, à elles seule, de considérer que ces décisions seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle. En outre, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ne justifie pas que l'état de santé de son fils nécessite que la famille demeure sur le territoire national, qu'il risque de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays ni qu'il justifie d'une intégration particulièrement réussie dans la société française en se bordant à produire une certificat médical datée de 2018 relatif à l'opportunité d'une intervention chirurgicale et dont il ne ressort pas que l'état de santé de cet enfant nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une extrême gravité, des attestations relatives à ces activités associatives, des documents attestant de la scolarisation réussie de son fils et A... la copie de la carte d'identité nationale de son beau-frère.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a annulé les décisions du 29 janvier 2021 portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Par suite, il est également fondé à demander l'annulation, dans cette mesure, de ce jugement ainsi qu'en tant qu'il l'a enjoint de mettre en œuvre sans délai la procédure d'effacement du signalement de M. E... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
14. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que réclame M. E... au titre des frais exposés pour l'instance soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans l'instance.
15. Le présent arrêt, qui statue au fond sur la requête en annulation du préfet de la Haute-Garonne dirigée contre le jugement du 23 mars 2021, rend sans objet ses conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21BX01757.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 23 mars 2021 est annulé en tant qu'il a annulé les décisions préfectorales du 29 janvier 2021 portant refus de délai de départ volontaire à l'encontre de M. E... et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois ainsi qu'en tant qu'il a enjoint le préfet de la Haute-Garonne de mettre en œuvre sans délai la procédure d'effacement du signalement de M. E... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. E... devant le tribunal administratif de Toulouse et devant la cour sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2021.
Le rapporteur,
Manuel Bourgeois
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX01753-21BX01757