Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 mars 2021, M. A..., représenté par Me Chamberland-Poulin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 novembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination de son pays d'origine et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le signataire de l'arrêté litigieux n'était pas compétent pour le signer et que cet arrêté est insuffisamment motivé en droit ;
- cet arrêté a méconnu les dispositions du 2° bis et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'illégalité de la décision lui refusant le séjour prive de base légale la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ;
- la décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français a méconnu le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public et qu'il réside en France depuis plus de 5 ans.
Par un mémoire enregistré le 9 juillet 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par lettre en date du 12 août 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... ;
- et les observations de Me Chamberland-Poulin représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 25 août 1999, est entré sur le territoire français en 2015 et a été pris en charge, la même année, par les services de l'aide sociale à l'enfance de Périgueux. Par un arrêté du 2 janvier 2020 la préfète de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, à l'appui des moyens tiré de ce que le signataire de l'arrêté litigieux n'était pas compétent pour le signer et que cet arrêté serait insuffisamment motivé en droit, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif en se bornant à soutenir que l'arrêté concerné ne viserait aucune délégation de signature. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée ; (...) ".
4. M. A... soutient qu'il a " tout fait " pour s'intégrer dans la société française, qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation, qu'il est orphelin et qu'il n'a plus de contact avec son oncle demeuré au Pakistan. Il ressort des pièces du dossier qu'il a effectivement intégré le lycée des métiers Sud Périgord pour l'année scolaire 2015/2016, puis le lycée des métiers et de l'aéronautique Flora Tristan en CAP Cuisine au titre de l'année scolaire 2016/2017. Toutefois, il n'a pas achevé cette formation et n'a été inscrit dans aucun établissement scolaire l'année suivante tandis que les explications qu'il apporte à cette interruption de sa formation, au demeurant changeantes, ne sont assorties d'aucune précision ni d'aucun élément justificatif. En outre, s'il a ensuite débuté, au titre de l'année scolaire 2018-2019 une nouvelle formation professionnelle et a bénéficié d'un contrat d'apprentissage, il n'établit pas qu'il n'aurait pas pu honorer ce contrat " en raison de l'absence de récépissé de sa demande de titre de séjour " ainsi qu'il le soutient tandis qu'il ressort des pièces du dossier que les appréciations du corps enseignant sont en majorité négatives et qu'il s'est, en particulier, signalé par son absentéisme. Enfin, si le directeur du pôle social à l'enfance a émis un avis favorable à la conclusion d'un contrat jeune majeur, ce contrat n'a été conclu que pour une durée de trois mois assorti d'une mise en garde relative au comportement passé de M. A.... Dans ces conditions, M. A..., qui ne se prévaut au demeurant d'aucun avis de l'aide sociale à l'enfance concernant son insertion dans la société française, ne peut être regardé comme justifiant du caractère réel et sérieux de sa formation. Par suite, nonobstant sa situation d'orphelin, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux aurait méconnu les dispositions précitées du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... ne résidait en France que depuis cinq années à la date de l'arrêté litigieux, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment il ne justifie pas de son intégration, notamment professionnelle, dans la société française et ne fait état d'aucun lien affectif particulier sur le territoire national. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il aurait également méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En quatrième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour pour demander l'annulation de la décision subséquente lui faisant obligation de quitter le territoire.
8. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...). / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...)/ La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.".
9 M. A... soutient que la préfète de la Gironde ne justifie aucunement des agissements délictueux dont il se serait rendu coupable et qu'elle ne conteste pas, au demeurant, qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation. Toutefois, et contrairement à ce que soutient l'appelant, elle n'a pas entendu fonder la décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire national sur l'existence d'une menace à l'ordre public. En outre, eu égard à ce qui a été dit aux points 4 et 6 du présent arrêt, l'appelant, qui ne fait état d'aucune circonstance particulière, n'est pas fondé à soutenir que la préfète aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant à deux ans la durée de l'interdiction qu'elle a prononcée.
10. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux du 2 janvier 2020. Par suite sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 30 août 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2021.
Le rapporteur,
Manuel C...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°21BX01104