Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 juin 2019 M. A..., représenté par Me Soulan, demande à la cour :
1°) d'infirmer ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 28 mars 2019 en tant qu'il a limité l'indemnisation de ses préjudices à la somme de 3 454,19 euros ;
2°) de condamner la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock à lui verser la somme de 91 804,05 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de sa perte de salaire, assortie des intérêts au taux légal ainsi que la capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock la somme de 6 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont limité son indemnisation, dès lors que si, par jugement n°1500156 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif a retenu un vice de procédure tenant au non-respect du délai de préavis de deux mois, pour annuler la décision de licenciement litigieuse, ce jugement ne liait pas les premiers juges dans leur appréciation de son droit à indemnisation ;
- le motif tiré de la perte de confiance, qui fondait la décision de licenciement annulée, n'a pas été caractérisé par la commune ; il ressort en effet du procès-verbal d'entretien préalable de licenciement, établi par son conseil, que le motif évoqué était la décharge de service et non la perte de confiance ;
- la décision le licenciant est entachée de détournement de procédure et de détournement de pouvoir ;
- son licenciement pour perte de confiance constitue une sanction déguisée, dès lors que le maire de la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock aurait dû engager à son encontre une procédure de licenciement pour motif disciplinaire ; le fait qu'il ait proposé une rupture conventionnelle au maire de la commune ne vaut pas reconnaissance d'un comportement fautif ;
- de simples déclarations dans la presse ne peuvent être regardées comme constitutives d'une faute disciplinaire ;
- le caractère illégal de la décision le licenciant lui a causé un préjudice économique évalué à 91 804,05 euros, déduction faite de la somme de 3 454,19 euros allouée par les premiers juges correspondant à la perte de salaire durant la période de préavis ; il a été indûment privé de 16 mois de salaires.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2020, la commune de
Saint-Georges-de-l'Oyapock, représentée par Me Page, conclut au rejet de la requête de M. A... et à ce qu'il soit mis à la charge de ce dernier la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été recruté le 1er octobre 2012 par la commune de
Saint-Georges-de-l'Oyapock, sous couvert d'un contrat à durée déterminée prorogé jusqu'au 31 mai 2013, en qualité de responsable des ressources humaines, puis, à partir du 1er juin 2013, sous couvert d'un nouveau contrat conclu pour une durée de trois ans, en qualité de directeur des affaires générales. Par une décision du 23 décembre 2014, prenant effet au 12 février 2015, le maire de Saint-Georges-de-l'Oyapock a licencié M. A... au motif de la perte de confiance. Par un jugement n° 1500176 du 31 décembre 2015 le tribunal administratif de la Guyane a prononcé l'annulation de cette décision pour vice de procédure tiré du non-respect du délai de préavis, confirmé par un arrêt n°16BX01072 du 29 mars 2018 de la cour administrative d'appel de Bordeaux. M. A... a introduit une demande indemnitaire préalable réceptionnée par la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock le 12 avril 2016, qui a été implicitement rejetée. M. A... a alors saisi le tribunal administratif de la Guyane d'une demande tendant à ce que la commune soit condamnée à lui verser la somme de 95 258,24 euros au titre des préjudices économiques subis du fait de son licenciement ainsi que la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral. Par jugement n°1700870 du 28 mars 2019, ce tribunal a condamné la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock à verser à M. A... la somme de 3 454,19 euros. M. A... relève appel du jugement n°1700870 du 28 mars 2019 du tribunal administratif de la Guyane, en tant qu'il n'a pas satisfait la totalité de ses conclusions indemnitaires portant sur l'indemnisation de son préjudice financier lié au licenciement irrégulier du 23 décembre 2014.
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Il est constant que la décision du 23 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock a prononcé le licenciement de M. A... était entachée d'un vice de procédure tenant au non-respect du délai de préavis institué par l'article 39 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, ainsi qu'il résulte du jugement du 31 décembre 2015 mentionné au point 1.
3. Toutefois si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'autorité administrative, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.
4. Il résulte de l'instruction que M. A... a été recruté sur un emploi fonctionnel de direction d'une collectivité territoriale en qualité de directeur des affaires générales, ayant la responsabilité du management opérationnel des services, des missions d'animation et de pilotage des équipes, d'assistance et de conseil administratif et financier ainsi que de sécurisation juridique, de gestion budgétaire, d'organisation et de gestion des assemblées délibérantes et enfin, d'organisation des relations avec la population, de développement et d'animation des partenariats.
5. Eu égard à l'importance du rôle du titulaire d'un tel emploi et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, l'autorité territoriale peut, sans commettre d'erreur de droit, retenir la perte de confiance comme motif de licenciement d'un directeur des affaires générales placé dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions.
6. La décision de licenciement indique que M. A... avait remis en cause par voie de presse les conclusions d'un audit des comptes de la commune, réalisé après les élections de mars 2014, et que l'intéressé a reconnu lui-même cette perte de confiance par une lettre du 22 septembre 2014 où il a demandé la mise en œuvre d'une rupture conventionnelle de son contrat en évoquant la détérioration des relations de travail existant avec 1'exécutif local et une relation conflictuelle avec le personnel. Ces difficultés étaient de nature à entraîner une perte de confiance mutuelle entre l'autorité municipale et M. A.... Dès lors, il pouvait, pour ce motif, être mis fin à ses fonctions et le licencier. Il ne résulte pas de l'instruction que, par cette décision de licenciement, le maire de la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock aurait en réalité entendu sanctionner M. A.... La circonstance que les faits reprochés à l'intéressé et en particulier son intervention dans la presse où il remettait en cause les conclusions d'un audit des comptes de la commune étaient de nature à justifier le prononcé d'une sanction pour manquement au devoir de réserve ne suffit pas à démontrer que la décision de licenciement constituait une sanction déguisée alors que ces mêmes faits pouvaient également caractériser une rupture de confiance. A cet égard, la circonstance qu'il ait manifesté, par courrier du 22 septembre 2014, la volonté d'un départ amiable assorti d'une offre de rupture transactionnelle, n'est pas de nature à apporter une telle preuve. Si M. A... soutient que son licenciement est entaché d'erreur dans ses motifs pour être en réalité fondé sur la décharge de fonctions et non la perte de confiance, l'intéressé ne le démontre pas en se bornant à produire un compte-rendu de son entretien préalable au licenciement du 13 novembre 2014 rédigé par son avocat et relatant ses propres dires. Dès lors, la décision de l'autorité territoriale, prononçant le licenciement de l'intéressé au motif qu'il n'existait plus de relations de confiance permettant la poursuite de leur collaboration, ne procède ni d'une appréciation erronée des circonstances de l'espèce, ni d'un détournement de procédure. Le détournement de pouvoir allégué n'est pas davantage établi par le requérant.
7. Il résulte de l'instruction que si le maire de la commune de
Saint-Georges-de-l'Oyapock a entaché sa décision du 23 décembre 2014 d'un vice de procédure lié au non-respect du délai de préavis, annulé par le jugement du 31 décembre 2015 du tribunal administratif de la Guyane, la disparition de la relation de confiance existant entre le maire et M. A... justifiait la mesure de licenciement prise à son encontre. Par suite, l'illégalité dont est entachée la décision du 23 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune de
Saint-Georges-de-l'Oyapock a prononcé le licenciement pour perte de confiance de M. A... n'est pas de nature à ouvrir à ce dernier un droit à indemnité. Dès lors qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction que la même décision n'aurait pu être légalement prise si le maire avait respecté le délai de préavis de deux mois applicable, compte tenu de l'ancienneté de M. A..., le lien de causalité direct entre, d'une part, le préjudice financier lié à la perte de salaire allégué par M. A... et, d'autre part, l'illégalité retenue par le tribunal ne saurait être regardé comme établi. Par conséquent, les conclusions tendant à l'indemnisation de ce chef préjudice doivent être rejetées.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 28 mars 2019, le tribunal administratif de la Guyane a limité son indemnisation à la somme de 3 454,19 euros en lien avec la perte de salaire que M. A... aurait dû percevoir durant sa période de préavis, et rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais d'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Georges-de-l'Oyapock présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de
Saint-Georges-de-l 'Oyapock.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 janvier 2022.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLa présidente,
Brigitte PHEMOLANT
La greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02687