Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2015, des pièces complémentaires enregistrées le 30 novembre 2015 et un mémoire enregistré le 15 décembre 2015, M.C..., représenté par Me Moura, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 12 mai 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 28 janvier 2015 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Philippe Pouzoulet,
- et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant de nationalité marocaine, entré en France pour la dernière fois le 28 novembre 2011 a sollicité le 20 novembre 2014 le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré en qualité de parent d'un enfant français mineur le 27 octobre 2014, en exécution d'un jugement du tribunal administratif de Pau du 23 septembre 2014. Il relève appel du jugement du 12 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 28 janvier 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
Sur le refus de renouvellement du titre de séjour et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant (...) ".
3. M. C...est de nationalité marocaine. Il est entré régulièrement en France en 2011 et s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint d'une Française, MmeA..., épousée à Pau le 28 mai 2011. De cette union est née une fille, Zayane, le 29 mai 2013. Toutefois, le couple s'est séparé peu après la naissance de l'enfant et dans des conditions tendues. Une ordonnance de non-conciliation est intervenue le 10 mars 2014. Compte tenu des circonstances de la séparation et de l'âge de l'enfant, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Pau a réservé le droit d'hébergement du père mais fixé un droit de visite médiatisé deux fois par mois et mis à sa charge une contribution de 75 euros par mois.
4. A l'expiration de son titre de séjour, M. C...en a demandé le renouvellement sur le fondement du 6° de l'article L. 311-11 en qualité de parent d'un enfant français. Le 14 avril 2014, le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a opposé un refus. L'arrêté du préfet a toutefois été annulé par le tribunal administratif de Pau le 23 septembre 2014. Les premiers juges ont en effet estimé que M. C...justifiait contribuer effectivement tant à l'entretien qu'à l'éducation de sa fille. Le jugement n'a pas été contesté par le préfet. En exécution de celui-ci, le préfet a autorisé le renouvellement du titre de séjour du requérant pour une période d'un an à partir de l'expiration du précédent titre de séjour et jusqu'au 21 novembre 2014.
5. Moins de deux mois après le jugement faisant droit à sa demande, M. C...a donc dû solliciter le 20 novembre 2014 le renouvellement de son titre de séjour. Mais le préfet lui a alors opposé un nouveau refus le 28 janvier 2015 au motif que le requérant ne justifiait plus contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille, en se fondant sur la période écoulée depuis le précédent refus de titre de séjour.
6. Le 13 janvier 2015, le juge aux affaires familiales a débouté M. C...et son épouse de leur demande de divorce, fixé la résidence de l'enfant au domicile de la mère, confirmé le droit de visite du père à l'Espace rencontre 64, deux samedis par mois et la pension alimentaire de 75 euros à la charge du requérant.
7. En ce qui concerne l'entretien de l'enfant, il convient de relever que le refus illégal de renouvellement du titre de séjour opposé à M. C...le 14 avril 2014 a affecté la possibilité pour le requérant de percevoir des revenus d'activité et l'a privé du bénéfice d'allocations et notamment de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Si le règlement de deux mensualités de pension alimentaire le 5 février 2015, que fait valoir M.C..., est postérieur à la décision attaquée, il y a néanmoins lieu de tenir compte de l'état d'impécuniosité du requérant dans la période antérieure au refus en litige et du fait, relevé par le tribunal administratif de Pau dans le jugement non contesté du 23 septembre 2014, que jusqu'à la date du premier refus de renouvellement du 14 avril 2014, M. C...a assuré l'entretien de son enfant. Or, la période écoulée entre les deux refus n'est pas si longue que, compte tenu des faibles moyens du requérant, le préfet puisse se fonder sur le retard de M. C...à payer la pension alimentaire à sa charge alors que le refus illégal qu'il lui a opposé a nécessairement entravé sa recherche d'activité rémunérée.
8. En ce qui concerne l'éducation de l'enfant, M. C...produit une attestation de l'association Espace rencontre et médiation 64 établissant qu'il avait rencontré sa fille les 5 avril, 3 mai, 7 juin, 21 juin, 6 septembre et 20 septembre 2014. Si M. C...n'a pas exercé son droit de visite le 19 juillet et le 2 août 2014, Mme A...n'a pas présenté l'enfant le 17 mai, le 5 juillet et le 16 août 2014. Le préfet s'est notamment fondé sur le fait que M. C...ne justifie pas avoir exercé son droit de visite après le mois de septembre 2014. Mais il ressort des pièces du dossier qu'au début de l'année 2015, notamment du jugement du juge aux affaires familiales du 13 janvier 2015, que le requérant était domicilié.non dans les Pyrénées-Atlantiques comme son épouse mais en Haute-Garonne En outre, l'appréciation du respect par M. C...de ses charges éducatives ne saurait sérieusement se fonder sur une période de seulement quatre mois, alors qu'il résulte tant du jugement susmentionné du 23 septembre 2014 du tribunal administratif de Toulouse que du justificatif produit par M. C...que celui-ci les a assumées de la naissance de sa fille jusqu'en septembre 2014, sur une période de seize mois.
9. Dans ces conditions, compte tenu notamment de l'état des ressources du requérant, placé dans une situation de précarité accrue du fait de la décision illégale du préfet annulée par le tribunal administratif, de son éloignement géographique et des relations conflictuelles qui persistent à la date de la décision en litige entre le requérant et sa femme, exerçant conjointement l'autorité parentale sur un très jeune enfant confié à la mère, M. C...doit être regardé comme ayant persisté à exercer effectivement la charge qui lui incombe dans l'entretien et l'éducation de l'enfant à la date du nouveau refus qui lui a été opposé par le préfet. Par suite, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il suit de là que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation du refus du renouvellement de son titre de séjour et, par voie de conséquence, des autres décisions faisant l'objet de l'arrêté attaqué.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Eu égard aux motifs, précisés ci-dessus, sur lesquels se fonde l'annulation du refus de titre de séjour opposé à M.C..., le présent arrêt implique nécessairement que soit délivrée à ce dernier, comme il le demande, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de délivrer une telle carte à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais de procédure :
12. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre une somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat à verser à Me Moura, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 12 mai 2015 et l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 28 janvier 2015 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de délivrer à M. C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Moura, avocat de M.C..., la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.
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N° 15BX03132