Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 février 2021, M. A..., représenté par Me Aymard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 21 octobre 2020 ;
2) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Gironde du 26 février 2020 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à venir, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant le temps de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient, en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour, que :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Il soutient, en ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français, que :
- elle est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2020/020932 du 21 janvier 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Frédéric Faïck a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant nigérian né le 15 janvier 1992, est entré en France le 29 mars 2014 pour y solliciter l'asile. Après le rejet de sa demande d'asile, il a fait l'objet le 12 juillet 2017 d'un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français qui a été annulé par le tribunal administratif de Bordeaux au motif que ces mesures le séparaient de sa conjointe et mère de ses enfants, laquelle avait droit à séjourner en France en raison de son état de santé. A la suite de ce jugement, M. A... s'est vu délivrer, sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un titre de séjour dont la durée de validité expirait le 8 septembre 2018, soit en même temps que celui de son épouse. Le 8 août 2018, M. A... a saisi la préfète de la Gironde d'une demande de renouvellement de son titre de séjour. Il relève appel du jugement du 21 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. M. A... se prévaut du fait que depuis 6 ans, il séjourne en France où ses trois enfants sont nés en décembre 2014, février 2017 et septembre 2019, l'aînée étant scolarisée en maternelle et le cadet pris en charge en Institut thérapeutique éducatif et pédagogique. Il fait aussi valoir qu'il travaille en France pour différentes entreprises et agences d'intérim depuis l'année 2019 et jusqu'en mars 2020 dans le cadre de ses récépissés de demande de carte de séjour l'autorisant à travailler. M. A... a séjourné en France d'abord en qualité de demandeur d'asile puis sous couvert de titres de séjour en tant qu'accompagnant d'un étranger malade, ce qui ne lui donnait pas vocation à demeurer sur le territoire français. Il est constant, par ailleurs, que son épouse a fait l'objet le même jour d'un refus de titre de séjour assorti d'une mesure d'éloignement, de sorte que la cellule familiale pourra se reconstituer hors de France où il n'est pas établi que les enfants du requérant seraient dans l'impossibilité de bénéficier d'une scolarité ou d'une prise en charge adaptée. De plus, M. A... n'est pas dépourvu de toute attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents. Au regard de ces circonstances, la préfète de la Gironde n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
4. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige porterait atteinte à l'intérêt supérieur des enfants de M. A... dès lors qu'elle n'a ni pour objet ni pour effet de séparer ces derniers de leurs parents et qu'il n'est pas établi que les enfants du couple seraient dans l'impossibilité d'être scolarisés ou pris en charge dans des conditions équivalentes au Nigéria. Par suite, la décision attaquée n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Sur la décision d'obligation de quitter le territoire français :
6. D'une part, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
7. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt la décision portant obligation de quitter le territoire ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 31 août 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.
Le rapporteur,
Frédéric FaïckLa présidente,
Elisabeth JayatLa greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX00847