Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 avril 2019, l'association Les papillons blancs, représentée par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 29 novembre 2016 du ministre du travail ;
3°) d'annuler la décision de l'inspecteur du travail en date du 13 juillet 2016 ;
4°) d'enjoindre au ministre du travail de lui délivrer l'autorisation de licencier Mme G... E... dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande, sous la même condition de délai ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que le tribunal administratif a omis de soulevé d'office le moyen, d'ordre public, tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision du 29 novembre 2016 ;
- ladite décision est entachée d'illégalité compte tenu de l'incompétence de son auteur ; la demande d'autorisation de licenciement a bien été présentée par la personne ayant qualité pour ce faire ; le ministre ne pouvait rejeter cette demande sans lui avoir demandé, au préalable, de la régulariser ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la jurisprudence Danthony trouve à s'appliquer ;
- le licenciement envisagé ne présente pas de rapport avec le mandat dont est investi le salarié concerné ; les faits reprochés à l'intéressé justifient son licenciement ; la décision de l'inspecteur du travail du 13 juillet 2016 doit dès lors être annulée ;
Par ordonnance du 17 août 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 octobre 2020 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... F...,
- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... E... exerce, depuis le 9 octobre 2000, les fonctions d'éducatrice spécialisée au sein de l'association " Les papillons blancs ", association d'aide aux personnes handicapées qui assure, notamment, à Bergerac, la gestion d'un service d'éducation spéciale et de soins à domicile. Le 27 janvier 2015, elle a été nommée membre du comité d'hygiène, de sécurité, et des conditions de travail. Au cours du premier semestre 2016, plusieurs stagiaires qui lui étaient confiés se sont plaints de faits de violences psychologiques, conduisant la direction de l'association à prononcer, par une décision du 13 mai 2016, sa mise à pied à titre conservatoire, puis à la recevoir en entretien préalable le 24 mai 2016. Après avoir recueilli, le 3 juin 2016, l'avis du comité d'entreprise, la direction générale de l'association a, le 6 juin 2016, saisi l'inspecteur du travail d'une demande tendant à obtenir l'autorisation de prononcer son licenciement pour motif disciplinaire, qui a été rejetée par une décision du 13 juillet 2016. L'association a formé, le 5 septembre 2016, un recours hiérarchique. Par une décision du 29 novembre 2016, le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail et rejeté la demande d'autorisation en litige au motif qu'elle était irrecevable compte tenu de l'incompétence de son signataire. L'association Les papillons blancs relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. S'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de relever d'office le moyen, d'ordre public, tiré de l'incompétence de l'auteur d'une décision qui lui est déférée, c'est à la condition que ce vice ressorte manifestement des pièces du dossier au vu duquel il statue. Ainsi, et dès lors que l'incompétence du signataire de la décision contestée, qui n'avait pas été débattue devant lui, ne ressortait d'aucune des pièces du dossier de première instance, le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas, contrairement à ce que soutient l'association appelante, entaché son jugement d'irrégularité en s'abstenant de relever d'office un tel moyen.
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 13 juillet 2016 :
3. Ces conclusions, présentées pour la première fois en appel, sont irrecevables.
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 29 novembre 2016 :
4. Il appartient à l'administration, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, de vérifier que cette demande est présentée par l'employeur de ce salarié ou par une personne ayant qualité pour agir en son nom. Lorsque la demande d'autorisation de licenciement est présentée par une personne sans qualité pour le faire, l'administration est tenue de la rejeter. Dans le cas où l'employeur est une personne morale, en l'occurrence, une association régie par la loi du 1er juillet 1901, la demande d'autorisation de licenciement doit être présentée par la personne qui est désignée à cet effet par les statuts ou par les textes pris pour leur application.
5. En l'espèce, la demande d'autorisation de licenciement a été présentée par le directeur général adjoint de l'association. Les statuts de celle-ci prévoient, en leur article 18, que le président " assure l'exécution des décisions du Conseil d'Administration et du Bureau ainsi que le fonctionnement régulier de l'Association. ", il " représente l'Association dans tous les actes de la vie civile (justice, défense, recours) et " nomme à tous les emplois salariés sauf délégation de son choix ". Il ressort par ailleurs du " Document unique des délégations au sein des papillons blancs de Bergerac ", dans sa version validée en conseil d'administration le 5 mars 2013, applicable au présent litige, que s'agissant du licenciement des personnels cadres et non cadres, le président de l'association Les papillons blancs a délégué ses pouvoirs aux membres du comité de direction, composé du " siège/direction générale " et des " directeurs de complexe ", dans les conditions suivantes : le " siège/direction générale " " valide, coordonne et co-signe le licenciement " et le " directeur de complexe " concerné " notifie et co-signe le licenciement ". Ces dispositions confient explicitement à la direction générale, installée au siège, et à la direction de chaque complexe, le pouvoir conjoint de prononcer le licenciement d'un salarié et, par suite, celui de demander l'autorisation de licencier un salarié protégé. En conséquence, la demande d'autorisation de licencier Mme E... devait être signée à la fois par la direction générale et par le directeur de complexe.
6. Le directeur général adjoint de l'association, M. C..., signataire de la demande d'autorisation de licenciement en litige, n'avait donc pas qualité pour solliciter seul une telle autorisation. Dès lors, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social était tenu de refuser l'autorisation de licenciement sollicitée. Par suite, les moyens présentés par l'association requérante sont inopérants.
7. Il résulte de ce qui précède que l'association Les papillons blancs n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions en injonction et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association Les papillons blancs est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les papillons blancs, à Mme G... E... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme B... A..., présidente-assesseure,
Mme D... F..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2021.
Le rapporteur,
Sylvie F...
Le président,
Dominique Naves
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 19BX01333