Procédure devant la cour :
Par une requête du 1er août 2016, Mme C...B...représentée par Me H... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 juin 2016.
2°) l'annulation de la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement.
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en premier lieu, s'agissant de la compétence du ministre pour autoriser son licenciement, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le ministre n'était pas incompétent pour se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement au motif que son contrat de travail ne pouvait être regardé comme résilié compte tenu de ce que si le conseil des prud'hommes de Limoges, par un jugement du 7 avril 2014, a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail, il n'a pas prononcé l'exécution provisoire de son jugement en ce qui concerne la résiliation ; en effet, le Conseil d'Etat juge de façon constante depuis un arrêt du 14 novembre 2001 n° 219365 et un arrêt du 17 décembre 2008, n° 310889, que si la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée, l'inspection du travail et le ministre ne sont pas compétents pour statuer sur une demande d'autorisation de licenciement ; cette jurisprudence du Conseil d'Etat est également celle de la Cour de Cassation 29 septembre 2010, n° 09-41.127 ; le ministre du travail, compte tenu de la résiliation de son contrat de travail, était donc incompétent pour statuer sur sa demande d'autorisation de licenciement ; en deuxième lieu, le ministre ne pouvait se fonder sur le constat de l'huissier, MeE..., retranscrivant la vidéo, ce constat étant lui-même nul, dès lors que l'enregistrement vidéo était nul ; si la SAS Cora a produit en appel (lors de l'audience de référé de décembre 2011 devant la chambre sociale) l'arrêté préfectoral du 17 février 2011 ayant autorisé l'installation des caméras de surveillance, cet arrêté prévoit en son article 3, que les enregistrements seront détruits dans un délai maximum de trente jours ; la société Cora, n'a pas lors de son dépôt de plainte communiqué aux enquêteurs l'enregistrement vidéo supposer prouver les faits de filouterie et de complicité de filouterie reprochés aux salariées, la société ayant choisi de déposer plainte sur la foi des seules déclaration de M. G..., responsable de la sécurité, qui a donné sa version des faits particulièrement subjective, sans donner aux enquêteurs l'enregistrement vidéo ; si l'employeur n'a pas communiqué cette bande vidéo, c'est bien parce qu'elle ne comportait pas d'éléments compromettants pour les salariés ; en toute hypothèse l'enregistrement vidéo aurait du être détruit le 30 octobre 2011 et ne pouvait être produit à l'appui des demandes d'autorisation de licenciement ni devant les juridictions ; la société ne pouvait en aucun cas dresser procès-verbal par Me E...du contenu de cette vidéo alors qu'elle aurait du être détruite le 30 octobre 2011 et le ministre du travail ne pouvait se fonder sur ce constat d'huissier, d'autant plus que ce constat d'huissier omet certains détails de la vidéo notamment quant au comportement de Mme B..., et quant à la présence des vigiles aux caisses où le vol est censé s'être produit ;
- en ce qui concerne l'information des salariés quant au recours à l'enregistrement vidéo des lieux de travail, si une information a été donnée lors des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010, à aucun moment, il n'est précisé que le système mis en place servira à surveiller les salariés ; or une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, indique que les enregistrements à l'insu du salarié, ne peuvent constituer un mode de preuve licite ; Mme B... a bien été filmée à son insu dès lors que le système de vidéosurveillance a été présenté au comité d'établissement comme étant seulement un moyen de surveiller la surface de vente et non le travail des caissières en particulier ; le ministre ne pouvait donc fonder sa décision d'autorisation de licenciement sur cette preuve illicite ;
- en deuxième lieu, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le ministre avait pu s'appuyer pour prendre la décision d'autorisation de licenciement, sur les éléments résultant de l'enregistrement de vidéosurveillance du 30 septembre 2011, tels qu'ils ont été décrits lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011 alors que l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011, aurait du être détruit dans le délai d'un mois à compter de sa création, soit le 30 octobre 2011 ;
- c'est également à tort que les premiers juges ont retenu qu'il n'y avait pas eu de la part du ministre, une confusion entre Mme B...et Mme A...et que les faits permettraient d'établir la réalité de l'intention de Mme B...de ne pas régler le prix de la console de jeu sans qu'y fasse obstacle l'abandon par l'employeur de la plainte pénale à l'encontre des deux salariées ; dès lors que le parquet a classé l'affaire sans suite, aucun vol ne peut être reproché aux salariées par le ministre du travail ; la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société Cora dans son courrier du 12 octobre 2011 fondée sur l'existence d'une filouterie n'a aucun sens, dès lors que la notion de filouterie est inappropriée ; il n'y a jamais eu ni vol, ni filouterie ni aucun fait répréhensible pouvant être invoqué à l'encontre de MmeB... ; dans son courrier du 12 octobre 2011, Cora ne demande l'autorisation de licencier MmeB..., que pour des faits de filouterie et de vol et non pour l'ensemble des griefs fondant la demande d'autorisation de licenciement à l'origine, ce qui démontre que l'employeur a souhaité licencier des salariés qui devenaient gênantes ; l'employeur était par ailleurs convaincu ainsi qu'il apparait dans l'attestation de Mme F...et dans la plainte déposée par M. G...devant les services de police, que Mme B...ne pouvait pas avoir les moyens financiers d'effectuer les achats qu'elle faisait de sorte qu'elle avait nécessairement volé les articles en cause ;
- la requérante n'a pas pu avoir accès aux images, ce qui constitue la violation la plus élémentaire des droits de la défense et se trouve en violation de l'arrêté préfectoral du 17 février 2011 qui rappelle le droit d'accès aux images prévu par la loi du 21 janvier 1995 ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les faits de vol étaient établis à l'encontre de Mme B...et que ces faits " ne portaient pas sur un produit de première nécessité et qui ne résultent pas d'un geste impulsif présentant un caractère suffisant pour justifier d'un licenciement " ; le ministre du travail a interverti la situation de Mme B...et de MmeA..., dans l'enchainement des faits ; le ministre reproche à Mme B...d'avoir donné plusieurs bulletins de participation pour jouer à la tombola organisée dans le magasin, sans plus de précisions quant aux bénéficiaires de ces bulletins, tout en indiquant que " la participation des employés du magasin est exclue " mais sans pour autant lui reprocher d'avoir joué elle-même ; en ce qui concerne la carte " malin " qui aurait été donnée par Mme B...à MmeA..., à supposer même ce fait établi, il ne constituerait ni un vol, ni une filouterie ni une faute suffisamment grave pour justifier le licenciement compte tenu de ce que ce genre de pratiques était admis par la société Cora, comme l'a retenu l'inspection du travail ; c'est donc à tort que la société Cora s'est fondée sur ce point dans sa demande d'autorisation du licenciement ; le vol qui lui est reproché n'est pas établi et elle n'aurait eu aucun intérêt à commettre un tel vol compte tenu de ce qu'elle avait été promue dans son travail, et entretenait de très bonnes relations avec ses collègues ; le parquet a d'ailleurs classé sans suite la procédure ; la décision d'octroi d'autorisation de licenciement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle entend par ailleurs reprendre à son compte l'ensemble des arguments et moyens de droit développés par l'inspecteur du travail dans sa décision du 6 décembre 2011.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 octobre 2016, la société Cora Limoges représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête de Mme B...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- en premier lieu, le principe de séparation des pouvoirs réserve aux juridictions administratives, le jugement de la légalité des autorisations administratives de licenciement concernant les salariés protégés et interdit dès lors au conseil des prud'hommes de juger de la validité des autorisations administratives ; le conseil des prud'hommes devait donc surseoir à statuer sur la requête de MmeB..., dans l'attente du jugement définitif par les juridictions administratives, de la légalité de l'autorisation de licenciement de MmeB... ; c'est ce qu'a d'ailleurs fait la Cour d'appel de Limoges dans son arrêt du 11 mai 2015 ; en tout état de cause, le conseil des prud'hommes n'a prononcé qu'une exécution provisoire sur le versement d'un certain nombre de sommes au bénéfice de Mme B...et non sur la rupture du contrat ; contrairement à ce qu'invoque la requérante, il n'y a donc pas eu de rupture du contrat de travail ; en tout état de cause en l'espèce, le juge administratif a été saisi avant que Mme B...ne demande une résiliation judiciaire de son contrat ;
- en ce qui concerne en deuxième lieu, l'utilisation de l'enregistrement vidéo comme fondement de la procédure de licenciement, il est inexact d'affirmer que la décision du ministre serait fondée exclusivement sur cet enregistrement vidéo dès lors qu'il ressort de la décision du ministre, qu'elle se fonde sur l'intégralité du dossier ; lors de la réunion exceptionnelle du comité d'établissement le 11 octobre 2011, les membres du comité habilités à voter se sont prononcés à l'unanimité en faveur du licenciement ;
- en troisième lieu, la matérialité des faits est établie, dès lors qu'une console de jeux non payée a été trouvée dans le caddie de MmeB..., et le manquement aux autres règles du règlement intérieur est également avéré ; M.G..., responsable de la sécurité, entendu par la police, a été lui-même témoin des agissements fautifs et les a décrits de manière concordante ; à la date de la demande d'autorisation de licenciement du 12 octobre 2011, l'enregistrement vidéo était parfaitement visible ; il est faux d'indiquer que les salariées auraient été filmées à leur insu dès lors que le système de vidéosurveillance a été autorisé par arrêté du 17 février 2011 et qu'une information a cet égard a été donnée lors de la réunion du 22 juillet 2010 du comité d'établissement ; la requérante ne démontre pas avoir exercé son droit d'accès aux images ; l'entretien préalable ne lui permettait pas de se voir communiquer les éléments en possession de la société ; Mme B...a pu avoir accès aux images, lors de la séance du comité d'établissement du soumettant pour avis son projet de licenciement, et n'a pas présenté d'observations ;
- les faits sont établis et justifiaient le licenciement de MmeB..., sans que n'ait d'incidence à cet égard, le fait que la société a retiré sa plainte pénale contre MmeB....
Par un mémoire en défense enregistré au greffe de la cour le 31 août 2017, la ministre du travail, demande le rejet de la requête de MmeB....
Elle indique se référer aux écritures présentées en première instance ; en ce qui concerne la compétence de l'autorité administrative, tant que le contrat de travail du salarié protégé n'est pas rompu, l'autorité administrative ne peut décliner sa compétence au seul motif que le salarié aurait saisi le juge judiciaire d'une demande en résiliation ; en tout état de cause le conseil des prud'hommes n'a pas prononcé une exécution provisoire sur la rupture du contrat de Mme B...et la Cour d'appel de Limoges dans son arrêt du 11 mai 2015, a indiqué surseoir à statuer sur la requête de Mme B..., dans l'attente du jugement définitif par les juridictions administratives, de la légalité de l'autorisation de licenciement de MmeB... ; en ce qui concerne la licéité des modes de preuve, en application de l'article L. 1121-1 du code du travail, les méthodes de surveillance de l'employeur doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché et les dispositifs de surveillance doivent être préalablement portés à la connaissance du comité d'entreprise et des salariés ; en l'espèce, comme l'a jugé le tribunal administratif, ces conditions sont réunies ; pour ce qui est de l'erreur d'appréciation invoquée quant à la gravité des faits, le tribunal administratif a à juste titre, retenu l'intention dolosive et estimé que les faits reprochés et imputables à Mme B...étaient suffisamment graves pour justifier son licenciement ; l'autorisation administrative de licenciement n'est donc pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la société Cora.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., salariée de la société Cora, et déléguée du personnel suppléante, relève appel du jugement du 2 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de la licencier pour faute.
Sur le bien-fondé du jugement et de la décision attaquée :
2. En vertu des dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives, bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi.
3. En premier lieu, MmeB... soutient comme en première instance, que le ministre du travail n'aurait pas été compétent pour prendre une décision d'autorisation de son licenciement dès lors qu'à la date de la décision en litige du 4 juin 2014, son contrat de travail avait fait l'objet d'une résiliation judiciaire par le conseil des prud'hommes de Limoges par son jugement du 7 avril 2014. Toutefois, ce jugement indique que l'exécution provisoire n'est prononcée que sur les sommes auxquelles la société Cora est par ailleurs condamnée par le même jugement et non sur la résiliation judiciaire du contrat de travail. En tout état de cause, la cour d'appel de Limoges par un arrêt du 11 mai 2015, en appel du jugement du 7 avril 2014 du conseil des prud'hommes de Limoges a prononcé un sursis à statuer sur le litige dans l'attente du jugement du tribunal administratif de Limoges sur la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de licencier Mme B...pour motif disciplinaire. Dans ces conditions, à la date de la décision du 4 juin 2014 à laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de licencier pour faute MmeB..., la résiliation pour motif disciplinaire de son contrat de travail ne peut être regardée comme ayant été prononcée.
4. En deuxième lieu, la requérante soutient que c'est à tort que le ministre du travail, dans sa décision d'autorisation du licenciement, et le tribunal administratif, dans son jugement se sont fondés sur l'existence de l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011, alors qu'un tel enregistrement devait être considéré comme nul dès lors que l'arrêté préfectoral du 17 février 2011 ayant autorisé l'installation des caméras de surveillance, prévoit en son article 3, que les enregistrements seront détruits dans un délai maximum de 30 jours. Toutefois, cet arrêté prévoit une exception à l'obligation de détruire les enregistrements dans un délai maximum de 30 jours dans " (...) le cas d'une enquête de flagrant délit, d'une enquête préliminaire ou d'une information judiciaire " et en l'espèce, une plainte pénale a été déposée dès le 30 septembre 2011 par le magasin ayant conduit à une convocation en justice de Mme B...le 5 octobre 2011 alors qu'en tout état de cause ainsi que l'ont considéré les premiers juges, l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 a fait l'objet d'une description lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011, soit dans le délai d'un mois d'autorisation de conservation des images. Dans ces conditions, le ministre a pu fonder sa décision d'autorisation du licenciement sur l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 alors même que cet enregistrement n'aurait pas été transmis à la police ou à la justice. La circonstance par ailleurs alléguée selon laquelle l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 a fait l'objet d'une transcription par un huissier de justice le 30 janvier 2012, soit au-delà du délai autorisé de conservation des images est sans incidence sur la légalité de l'autorisation administrative de licenciement dès lors qu'en tout état de cause, ainsi qu'il est susmentionné, une plainte pénale ayant été déposée, le délai de trente jours de conservation des images n'était pas opposable à la société Cora. Par ailleurs, contrairement à ce que soutenait la requérante en première instance elle a pu visionner l'enregistrement, lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011 qui s'est prononcé sur le projet de son licenciement. Si elle soutient que les droits de la défense auraient été méconnus dès lors qu'il n'a pas été fait droit à sa demande de visionner les images dès le jour des faits, le 30 septembre 2011 et en tout cas lors de l'entretien préalable du 10 octobre 2011, elle ne se prévaut - alors qu'au demeurant elle ne justifie pas avoir présenté une demande de visionnage des images - d' aucune disposition législative ou réglementaire, ni d'aucun principe qui imposerait une telle communication avant l'enquête contradictoire organisée par l'inspecteur du travail dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation du licenciement.
5. En troisième lieu, la requérante soutient que si une information a été donnée lors des séances des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010 quant à l'existence du dispositif de vidéosurveillance, à aucun moment, il n'a été précisé que le système mis en place servirait à surveiller les salariés et que dès lors l'autorisation de licenciement accordée par le ministre est entachée d'illégalité pour se fonder sur un enregistrement effectué à l'insu du salarié, constituant un mode de preuve illicite. Il ressort des pièces du dossier, que si les comptes-rendus des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010 indiquent une information des salariés quant à l'installation de systèmes de vidéosurveillance sans toutefois spécifier expressément que les salariés aient été informés de ce qu'ils seraient visés par ces dispositifs, l'information donnée aux salariés quant à la mise en place du dispositif, qui incluait notamment les réserves du magasin, impliquait nécessairement que les salariés étaient concernés par le dispositif. La société Cora indique par ailleurs, sans être contredite par la requérante, qu'un courrier explicatif a été adressé à chaque salarié, quant à l'utilisation de la vidéosurveillance. Dans ces conditions, ainsi que l'ont considéré les premiers juges, l'information des salariés et notamment de Mme B...qui a au surplus indiqué lors de l'enquête effectuée par les services de l'administration du travail dans le cadre du recours hiérarchique, qu'elle était au courant de l'existence des caméras, a été suffisante.
6. En quatrième lieu, en ce qui concerne la matérialité des faits sur lesquels repose l'autorisation ministérielle de licenciement, il ne ressort tout d'abord pas des pièces du dossier, que concernant MmeB..., le ministre et le tribunal auraient commis une confusion entre Mme B... et MmeA..., quant à l'imputabilité des faits relatifs à la journée du 30 septembre 2011, au cours de laquelle a été opérée, la soustraction du magasin, sans autorisation, d'une console de jeu Nintendo. En effet, tant le ministre que le tribunal administratif se sont fondés sur la circonstance selon laquelle le 30 septembre 2011, alors que sa collègue Mme A...supervisait les caisses en libre-service, MmeB..., s'est présentée à 16h19 à la caisse où Mme A...a ôté les antivols apposés sur les consoles, a passé à plusieurs reprises en compagnie de Mme A...son caddie, dans lequel elle avait placé divers articles dissimulant les consoles de jeu, au système de détection, et a finalement été interpellée par le service de surveillance, qui avait suivi le déroulement des faits au moyen du système de vidéosurveillance. Il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de retranscription par l'huissier de l'enregistrement vidéo, ainsi que du témoignage du 31 décembre 2012 du responsable de la surveillance du magasin, produit par le ministre en défense, que Mme B...a présenté au service de surveillance le 30 septembre 2011, à 16h19 trois tickets de caisse concernant trois des consoles de jeu se trouvant dans son caddie et, s'agissant de la quatrième console, un ticket de caisse dont le service de surveillance a constaté qu'il était daté du matin. Si MmeB..., a ensuite soutenu, après discussion, qu'elle avait oublié de régler cet achat, compte tenu des circonstances dans lesquelles s'est opérée cette soustraction de la console de jeux, dont Mme B... a cherché à justifier l'achat par la production d'un ticket de caisse afférent à l'achat antérieur d'un produit identique, cette soustraction d'une console de jeux par MmeB..., qui dans sa requête d'appel, ne conteste pas sérieusement les faits qui lui sont reprochés, a présenté le caractère d'un acte volontaire. Cette soustraction d'un produit appartenant à la société qui l'emploie, et d'un montant significatif, présente un caractère fautif, et d'une gravité suffisante pour justifier l'autorisation de licenciement contestée, alors même que l'employeur avait retiré sa plainte pénale à l'encontre de Mme B...et de sa collègue, MmeA..., et que la requérante fait état de ses difficultés familiales et de l'absence d'antécédent disciplinaire.
7. Par ailleurs, la circonstance invoquée par la requérante, selon laquelle le terme de " filouterie " employé dans la demande d'autorisation de licenciement serait inapproprié, se trouve sans incidence sur la légalité de la décision attaquée d'autorisation du licenciement laquelle se fonde à juste titre sur la soustraction frauduleuse d'une console Nintendo.
8. Si la décision d'autorisation du licenciement se fonde également sur la circonstance pour Mme B...d'avoir passé à MmeA..., en vue d'effectuer des achats une carte " Malin " appartenant à la soeur de MmeB..., contrairement aux instructions de l'employeur qui interdisent la transmission de ces cartes aux salariés, qui permettent de bénéficier de bons d'achat, et sur le fait pour Mme B...d'avoir donné à Mme A...des billets de tombola, alors que cette tombola n'était pas ouverte aux salariés de Cora, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que le ministre aurait pris la même décision d'autorisation du licenciement pour faute sur le fondement du premier motif tenant à la soustraction volontaire de la console de jeux.
9. En cinquième lieu, si Mme B...soutient que la demande d'autorisation du licenciement serait en lien avec le mandat, dès lors qu'elle ne répondrait qu'à la volonté d'évincer " des salariées qui deviendraient gênantes du fait de leur engagement syndical ", elle n'apporte à cet égard aucun élément factuel, et il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la demande d'autorisation de licenciement reposerait en réalité sur d'autres faits que ceux fautifs, qui sont indiqués dans cette demande. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'existence d'un lien entre la demande d'autorisation et le mandat, doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède, que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 2 juin 2016 et de la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. La société Cora Limoges n'étant pas dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de Mme B...tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Cora Limoges sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Cora Limoges sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à la société Cora Limoges et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Axel Basset premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 octobre 2018.
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 16BX02677