Procédure devant la cour :
Par une requête du 31 mars 2017, le Pavillon de la Mutualité, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 février 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de rejeter la demande de Mme F...présentée devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
3°) de mettre à la charge de Mme F...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la décision du 17 mars 2015 d'autorisation de licenciement est suffisamment motivée ; en effet, le contrôle de l'inspecteur du travail doit porter sur les efforts de reclassement engagés par l'employeur ; dans l'hypothèse comme en l'espèce, d'une demande de licenciement portant sur une inaptitude physique médicalement constatée, comme l'indique la circulaire du ministre du travail du 30 juillet 2012, l'exigence de motivation est moindre qu'en matière de licenciement économique ; il n'appartient pas à l'inspecteur du travail d'indiquer dans sa décision, de manière circonstanciée, l'ensemble des postes proposés, ni même de décrire l'ensemble des initiatives prises par le Pavillon de la Mutualité afin d'étudier les solutions d'aménagement de poste, en concertation avec la médecine du travail ; la décision d'autorisation de licenciement satisfait pleinement à l'obligation de motivation prescrite par les articles R.2421-5 et R. 2421-12 du code du travail dès lors que le Pavillon de la Mutualité a effectué les recherches de reclassement, plusieurs propositions ont été formulées à MmeF..., qui n'y a pas donné suite, le projet de reconversion n'a pas abouti faute de VAP et ce malgré l'obtention du financement par l'employeur ; dès lors le Pavillon de la Mutualité était dans l'impossibilité de reclasser MmeF..., et il n'y a pas de lien entre le licenciement et les mandats détenus par l'intéressée ; en tout état de cause, la réalité des efforts de reclassement entrepris par le Pavillon de la Mutualité est établie, sous forme en interne de notes de service à l'ensemble des entités du groupe, à savoir le GIE Pavillon-Radiologie, le Secrétariat Général, le service de SSIAD, les cliniques mutualistes de Pessac et de Lesparre, la SAS Masson Domital, les centres optiques ; pour ce qui est des recherches de reclassement externe, un certain nombre de courriers ont été adressés à différentes institutions ;
- en ce qui concerne les autres moyens invoqués en première instance par Mme F..., pour ce qui est de la prétendue violation de la consultation des personnels, si la salariée soutient que les délégués du personnel n'auraient pas bénéficié d'une information suffisante " pour leur permettre de donner un avis éclairé ", et que des solutions de reclassement auraient été proposées à Mme F...avant consultation des délégués des personnels, ces derniers ont été convoqués à une première réunion extraordinaire le 12 novembre 2012 ; ce n'est que le 14 novembre 2013 que Mme F...a été destinataire de propositions de reclassement accompagnées de projets d'avenant à son poste de travail et de l'ensemble des informations relatives aux cinq postes concernés ; elle a donc bien été destinataire des propositions de reclassement postérieurement à la première consultation des délégués du personnel ; lors de la nouvelle consultation des délégués du personnel le 17 juin 2014, l'employeur a rappelé l'ensemble des postes proposés à Mme F...dont au sein de la clinique de Pessac, le poste d'infirmière à temps plein dans le service des consultations et celui en hémovigilance à mi-temps, ces propositions portant sur des postes aménagés ; le poste à temps plein de secrétaire médicale lui était également proposé ; les délégués du personnel ont été également consultés sur le projet de reconversion de Mme F... en qualité d'ergonome, dans le cadre d'un reclassement externe et ont le 17 juin 2014, émis un avis favorable ; par courrier du 17 juin 2014, il a été transmis à Mme F... les propositions de reclassement ; la salariée n'est donc pas fondée à soutenir que les propositions de postes seraient intervenues avant la seconde consultation des délégués du personnel ; par ailleurs, contrairement aux allégations de l'intéressée, la réunion du 17 juin 2014 a bien eu lieu, comme en attestent notamment la signature des sept délégués présents, et il ne saurait être reproché à l'employeur d'avoir permis aux délégués de faire connaitre leur avis par courrier dans l'hypothèse où ils ne se rendraient pas à la réunion ; la fiche d'information remise aux délégués du personnel est suffisamment complète, dès lors qu'elle reprend les préconisations et avis du médecin du travail ; de plus les délégués du personnel ne pouvaient ignorer le statut de travailleur handicapé de MmeF..., la fiche d'information précisant que cette dernière a présenté un dossier de maintien dans l'emploi par reconversion professionnelle auprès de l'organisme OETH, " Obligation d'emploi des travailleurs handicapés " ; par ailleurs, il n'existe aucun texte ni jurisprudence imposant la communication par l'employeur des courriers échangés avec la salariée ou avec le médecin du travail ; concernant le poste d'ergothérapeute, le 30 septembre 2013, le Pavillon de la Mutualité a indiqué au docteur Velly, qu'un ergothérapeute était déjà présent sur le site de la clinique de Lesparre, et qu'aucune création de poste n'était envisagée ; même s'il était prévu de former un professionnel de santé en qualité de référent PRAP ( " prévention des risques liés à l'activité physique "), il ne s'agissait que de fonctions accessoires à la fonction d'infirmière, ne représentant que quelques demi-journées dans le mois, ce qui ne permet pas d'envisager un reclassement à ce titre ; par ailleurs, l'occupation de ce poste de PRAP nécessitait des manutentions des personnes, ce qui était incompatible avec les préconisations du médecin du travail ; en ce qui concerne la formation au DU Santé et Sécurité au Travail au sein de l'université de Bordeaux IV, au titre de la DIF, si cette demande a été acceptée, Mme F... a abandonné ce projet ; pour ce qui est de la formation en Master II d'ergonomie à l'université de Bordeaux, pour l'année 2014/2015, accepté par l'employeur, l'inscription de Mme F...n'a pas été admise en l'absence de diplômes suffisants et d'absence de validation des acquis professionnels (VAP), l'employeur n'ayant aucune responsabilité dans cette absence d'inscription ; si Mme F...estime qu'elle aurait dû bénéficier d'un reclassement sur le poste d'infirmière coordonnatrice à mi-temps au sein du SSIAD de Saint-Hélène et qu'il existait d'autres postes vacants qui ne lui ont pas été proposés à savoir, le poste d'infirmière d'accueil et d'orientation aux urgences (" IAO "), le poste d'infirmière sur les fonctions de " Tim ", et différents postes figurant sur les " fiches médicales " ; si Mme F...fait grief au Pavillon de la Mutualité de ne pas avoir indiqué avec précision les salaires correspondant aux postes proposés et de ne pas avoir envisagé d'aménagement du poste d'infirmière qu'elle occupait jusqu'alors, le médecin du travail n'a envisagé une reprise du travail qu'à la condition que soit apportée une double restriction tenant d'une part aux contraintes posturales du poste (station debout prolongée, mouvements de torsion du buste) et aux efforts de manutention ; ces recommandations sont particulièrement restrictives pour les établissements de santé et limitent considérablement les solutions de reclassement ; dans ces conditions, au vu de l'organisation interne, de l'impossibilité financière de créer un nouveau poste et de son refus des postes proposés, la tentative de reclassement de Mme F...au sein du groupe et des partenaires, n'a pas abouti ; le poste d'infirmière Coordonnatrice à mi-temps au sein du SSIAD de Sainte-Hélène a été écarté par le médecin du travail dans son courrier du 6 mai 2014 au motif du trop grand nombre de déplacements quotidiens (Lesparre se trouve à 30kms de Sainte-Hélène) ; en ce qui concerne le poste d'infirmière d'accueil et d'orientation aux urgences (IAO), il ne s'agit pas d'un poste à proprement parler, mais de missions confiées alternativement aux infirmières du service des urgences consistant à assurer une sélection et un ordre de passage des patients qui se présentent au service des urgences ; ce poste qui nécessite de la manutention n'est mis en place qu'à partir d'un certain volume de patients compris entre 15000 et 18000 patients alors qu'à l'époque le service des urgences était dans une tranche de 12500 à 13000 patients ; ces fonctions ne pouvaient donc justifier une création de poste ; les fonctions d'infirmière technicienne de l'information (TIM) correspondent à un statut de secrétaire médicale à temps plein, refusé par Mme F...pour des raisons de salaire ; il ne s'agissait pas d'un poste existant, et comme il est indiqué lors de la réunion du CE de janvier 2015, aucun établissement à Bordeaux ne fonctionnait avec d'anciennes IDE au poste de TIM ; par ailleurs, l'inspecteur du travail, dans sa décision du 13 mars 2014 avait considéré que le reclassement devait intervenir sur des postes d'infirmier ; en ce qui concerne les différents postes figurant sur les " fiches médicales ", de secrétaire médicale, d'assistante administrative et de responsable IDE MSS Médoc, il s'agit de départs de personnels et non d'embauche avec des recrutements ; en ce qui concerne la prétendue insuffisance d'information de la salariée quant à la rémunération afférente à différents postes, les moyens invoqués par Mme F...sont inopérants ; en effet, pour chaque poste offert au reclassement un avenant afférent à la rémunération était joint, alors qu'il était rappelé que son ancienneté était conservée avec les conséquences s'y attachant pour la rémunération ; en ce qui concerne la prétendue absence d'aménagement de poste, la rédaction de l'avis d'inaptitude définitive ne permettait pas d'envisager un simple aménagement de poste ; le Pavillon de la Mutualité a donc parfaitement respecté son obligation de reclassement ; en ce qui concerne la question du lien avec le mandat, Mme F...n'apporte aucun élément relatif à l'existence d'un tel lien, qui a été écarté par l'inspectrice du travail ; le Pavillon de la Mutualité ne s'est jamais rendu responsable de discrimination et n'a jamais fait l'objet d'une condamnation à ce titre ; pour ce qui est des prétendus refus de formation, il a été pris en charge de nombreuses formations, toutes les demandes de Mme F...ayant été acceptées ; en ce qui concerne l'importance alléguée du travail de nuit, le travail de nuit a été particulièrement restreint, en moyenne une nuit tous les 15 jours sur les trois dernières années, sachant que les 2/3 du temps de la salariée étaient consacrés à son engagement syndical et non à ses fonctions d'infirmière.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2018, MmeF..., représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête du Pavillon de la mutualité et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la motivation évasive de la décision du 17 mars 2015 ne permet pas de s'assurer que l'inspectrice du travail a effectué un contrôle approfondi sur l'obligation de reclassement incombant à l'employeur avant de prendre sa décision, aucune différence ne devant être faite contrairement à ce qu'allègue la requérante entre la motivation des décisions relatives au licenciement économique et celles relatives à l'inaptitude physique ; pour ce qui est de la consultation des délégués du personnel exigée par l'article L. 1226-10 du code du travail, elle doit concerner les possibilités de reclassement et en conséquence doit être effectuée avant que ne soient adressées au salariés des propositions de reclassement compatibles avec ses capacités physiques ; en l'espèce, les propositions de postes sont intervenues avant la réunion des délégués du personnel qui a eu lieu le 17 juin 2014 ; les délégués du personnel n'ont pas bénéficié d'informations suffisantes permettant de donner un avis sur le reclassement de Mme F...; l'employeur n'a pas produit tous les courriers échangés entre le Pavillon de la Mutualité d'une part, et d'autre part, Mme F...et le médecin du travail ; il n'est pas produit par l'employeur les courriers de demande par Mme F...d'une formation en master 2 d'ergonomie, et notamment ses demandes répétées depuis mars 2014 ; l'article L. 1226-10 du code du travail exige que ce soit les délégués du personnel qui soient saisis pour avis, or en l'espèce, dans la décision attaquée du 17 mars 2015, l'inspectrice du travail fait référence à la consultation du comité d'établissement du 15 janvier 2015 et il apparait donc que l'employeur n'a pas consulté les délégués du personnel mais les membres du comité d'établissement ; la réunion des délégués du personnel qui a eu lieu le 17 juin 2014 ne peut valoir réunion des délégués du personnel dans le cadre de la seconde procédure de licenciement initiée par une nouvelle convocation à un entretien préalable le 21 novembre 2014 ; ce sont donc les membres du comité d'établissement qui ont été consultés et non les délégués du personnel, lesquels n'ont au demeurant pas reçu tous les éléments nécessaires pour rendre leur avis, ainsi qu'il apparait à la lecture du procès-verbal du 15 janvier 2015, notamment quant aux préconisations du médecin du travail ; l'ordre du jour de cette réunion indique qu'il comporte en pièce jointe uniquement le dossier de consultation comprenant le relevé de la carrière de Mme F...ainsi qu'un récapitulatif de sa situation, mais non les documents d'ordre médical et notamment les fiches d'aptitude ou d'inaptitude du médecin du travail des 18 septembre et 2 octobre 2013, constituant des documents substantiels dès lors que portant sur les restrictions à l'exercice des fonctions ; la décision de l'inspectrice du travail est entachée d'une incompétence de l'auteur de l'acte dès lors que cette décision a été prise par l'inspectrice du travail de l'unité de contrôle n° 5 alors que le siège de l'établissement à Pessac, relève de l'unité de contrôle n° 2 ; en ce qui concerne la préconisation par le médecin du travail sur le fondement de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans la fiche médicale du 2 octobre 2013 d'un suivi d'une formation en ergonomie, Mme F...a engagé des démarches en vue de suivre une formation master 2 en ergonomie ; l'employeur n'a pas donné suite dans les délais à cette demande malgré les 4 relances de la part de MmeF..., ce qui l'a empêché de s'inscrire au master 2 à compter de septembre 2014 ; en ce qui concerne les propositions de reclassement, pour ce qui est du poste d'infirmière coordonnatrice à mi-temps au sein du SSIAD de Sainte-Hélène, si le médecin du travail s'y est opposé c'est parce que l'employeur a exagéré l'importance des déplacements qu'auraient nécessité pour MmeF..., l'occupation de ce poste ; en ce qui concerne le poste d'infirmière d'accueil et d'orientation aux urgences (IAO), l'employeur ne lui a jamais proposé ce poste, bien qu'il ait reconnu qu'il ne nécessitait aucune manutention ; si l'employeur estimait que ce poste pouvait être occupé par roulement par les infirmières des urgences, Mme F...aurait pu occuper ce poste ; par ailleurs, des postes de TIM auraient pu être proposés à Mme F...; par ailleurs de nombreux postes ne lui ont pas été proposés alors qu'ils étaient selon les fiches médicales, disponibles ; certains postes proposés ne mentionnaient pas les salaires, les indemnités et les primes et dans ces conditions, l'obligation de reclassement n'a pas été remplie de manière loyale et sérieuse par le Pavillon de la Mutualité ; en ce qui concerne les restrictions énumérées par le médecin du travail tenant aux contraintes posturales du poste et des efforts de manutention qu'il comporte, cette situation ne concerne que les services de soins, et dans ces conditions l'employeur pouvait lui proposer des postes avec un aménagement pour lui permettre de conserver un emploi ; à aucun moment, l'employeur n'a proposé une adaptation du poste selon les préconisations du médecin du travail, alors que par courrier du 6 mai 2014, le médecin du travail a indiqué que deux postes IDE pourraient être proposés pour le reclassement en tenant compte des restrictions d'aptitude médicale ; si dans son mémoire, l'administration indique qu'au moins huit postes ont été identifiés, mais que ces postes ne pouvaient être proposés à Mme F...dès lors que ces postes correspondent à des qualifications inférieures aux siennes ; toutefois, tout poste doit être proposé à la condition que le salarié puisse l'occuper, y compris des postes à qualification inférieure ; Mme F...pouvait occuper un poste administratif et notamment tous les postes qu'elle a évoqués dans ses écritures de première instance ; l'administration ne saurait se limiter aux deux postes proposés le 17 juin 2014, qui se trouvaient contraires aux préconisations du médecin du travail, sans analyser les autres postes qui auraient dû lui être proposés ; il appartenait à l'employeur de préciser le coefficient et le salaire afférents à ces propositions de postes ; l'employeur reconnait l'existence de nombreux postes qu'il s'est dispensé de lui proposer, et qui étaient connus depuis mai 2014, août 2014 et octobre 2014, dans la mesure où ces postes étaient existants et qu'ils pouvaient correspondre à ses capacités professionnelles ; c'est enfin à tort que l'inspectrice du travail a considéré qu'il n'y avait pas de lien avec le mandat ou l'appartenance syndicale, la motivation à cet égard étant évasive ; en effet, elle a fait l'objet d'une première procédure de licenciement refusée par l'inspectrice du travail, et elle était particulièrement active dans le cadre de l'exercice de ses mandats et interpellait régulièrement l'employeur sur les entraves aux fonctions de délégué du personnel ainsi qu'au titre de la discrimination syndicale ; par ailleurs, dans la lettre qu'elle a adressée le 29 octobre 2014 au directeur de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, elle dénonce la faute inexcusable de son employeur au sujet de son accident du travail le 17 mars 2012, le fait que l'obligation de résultat quant à la sécurité n'est pas respectée, les nombreux refus de formation professionnelle qui lui ont été opposés, l'absence de visite médicale depuis juin 2008, et les nombreux accidents du travail au sein de la société et les nombreuses inaptitudes qui en résultent.
Par un mémoire du 30 octobre 2018, le ministre du travail conclut à ce qu'il fait droit à la requête et à l'annulation du jugement du 2 février 2017 le tribunal administratif de Bordeaux.
Il soutient que la décision attaquée est suffisamment motivée dès lors que l'inspectrice du travail s'est assurée que l'employeur avait satisfait à son obligation de recherche de reclassement, trois postes de reclassement ayant été proposés à la salariée, sur des emplois équivalents intégrant les préconisations du médecin du travail et validées par celui-ci.
Par ordonnance du 30 octobre 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- les observations de MeC..., représentant le Pavillon de la mutualité et de Me A..., représentant MmeF....
Considérant ce qui suit :
1. Mme F...a été recrutée le 2 novembre 1981 par la société Pavillon de la Mutualité, en qualité d'aide-soignante puis d'infirmière au sein de la clinique mutualiste de Pessac. Mme F...élue conseiller du salarié le 6 juillet 2012, et désignée comme représentante syndicale au comité d'établissement et au comité central d'entreprise le 13 décembre 2013 avait la qualité de salariée protégée. Elle a été victime, le 17 mars 2012, d'un accident du travail, reconnu comme tel le 24 mai 2012, et a été placée en arrêt de maladie du 16 avril 2012 au 1er octobre 2013. Lors des deux visites médicales de reprise, des 18 septembre et 2 octobre 2013, le médecin du travail l'a déclarée définitivement inapte au poste occupé, " du fait des contraintes posturales du poste et des efforts de manutention qu'il comporte " et a considéré que " si un autre poste ne présentant pas les mêmes exigences ne peut être proposé, une formation peut être envisagée ". La société a saisi l'inspecteur du travail, le 14 janvier 2014, d'une première demande tendant à obtenir l'autorisation de licenciement pour inaptitude physique de MmeF..., laquelle a été rejetée par une décision du 13 mars 2014, au motif de l'insuffisance des efforts de reclassement de MmeF..., puis la société a saisi l'inspecteur du travail, le 21 janvier 2015, d'une nouvelle demande d'autorisation, à laquelle il a été fait droit par une décision du 17 mars 2015. Le Pavillon de la Mutualité, relève appel du jugement du 2 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, a annulé la décision la décision du 17 mars 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le Pavillon de la mutualité à prononcer le licenciement de Mme F... pour inaptitude physique.
2. En vertu des articles R. 2421-5 et R. 2421-12 du code du travail, les décisions prises par l'inspecteur du travail relatives aux autorisations de licenciement des salariés protégés doivent être motivées.
3. En l'espèce, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, si la décision du 17 mars 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le Pavillon de la mutualité à prononcer le licenciement pour inaptitude physique de MmeF..., vise les textes applicables, énonce la date de l'accident du travail à l'origine de l'inaptitude physique de MmeF..., reprend les dates et conclusions des visites médicales de reprise, et fait état de l'absence de lien entre la demande de licenciement et les mandats exercés, elle se borne à indiquer, s'agissant des efforts de reclassement, que la société " a effectué des recherches de reclassement. que plusieurs propositions de reclassement ont été formulées, propositions refusées par MmeF..., que le projet de formation en Master 2 Ergonomie n'a pas abouti, faute de validation des acquis professionnels et malgré l'obtention du financement de ce projet par l'employeur et que le Pavillon de la mutualité se trouve donc dans l'impossibilité de reclasser Mme F...". Cette décision, ne précise pas sur quels postes portaient les propositions de reclassement faites à MmeF..., ni les critiques portées par cette dernière à ces propositions, et n'évoque pas non plus l'existence d'autres postes au sujet desquels Mme F... avait contesté le fait qu'ils ne lui avaient pas été proposés au titre du reclassement. Par la décision en litige, l'inspecteur du travail n'indique non plus quels ont été les éléments entrant dans son appréciation pour considérer que le Pavillon de la mutualité avait satisfait en l'espèce à son obligation de reclassement. A cet égard contrairement à ce que soutient en appel le Pavillon de la mutualité, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que les décisions prises par l'inspecteur du travail en matière d'inaptitude physique seraient soumises à une obligation de motivation moindre que les décisions prises en matière de licenciement économique alors que par ailleurs le Pavillon de la mutualité ne peut en tout état de cause, utilement se prévaloir de la circulaire du ministre du travail du 30 juillet 2012, faute pour cette circulaire d'avoir une valeur réglementaire.
4. Il résulte de ce qui précède que le Pavillon de la mutualité, n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 2 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 17 mars 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le Pavillon de la mutualité à prononcer le licenciement pour inaptitude physique de Mme F....
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme F...qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont le Pavillon de la mutualité demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du Pavillon de la mutualité une somme de 1 500 euros au profit de Mme F...au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête du Pavillon de la mutualité est rejetée.
Article 2 : Le Pavillon de la mutualité versera une somme de 1 500 euros au profit de Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Pavillon de la mutualité, à Mme E...F...et à la ministre du Travail.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président assesseur,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2019.
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 17BX01043