Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 mars 2021, la société Bisca Bazar, représentée par Me Bluzet, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Pau du 22 janvier 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 19 septembre 2019 prise, sur second examen, par le collège territorial de Bordeaux, relative à l'applicabilité des dispositions de l'article 44 quindecies du code général des impôts ;
3°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande comme irrecevable ; ainsi la décision contestée entraîne des effets notables sur sa situation, autres que fiscaux, et notamment des effets économiques ;
- en effet, elle a racheté le fonds de commerce de la société Hutesa précisément en raison de ce que celle-ci bénéficiait de l'exonération prévue par l'article 44 quindecies du code général des impôts ; de plus, le refus de l'exonérer crée une distorsion de concurrence avec les entreprises exerçant la même activité dans la même zone ;
- s'agissant de la légalité de ce refus, c'est à tort que l'administration se fonde sur la seule existence d'un contrat de franchise, dans la mesure où elle reste libre de s'approvisionner auprès des fournisseurs référencés de son choix.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
- et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Bisca Bazar, créée le 10 septembre 2018 et qui exerce l'activité de commerce de détail d'équipement de la maison et de la personne à Biscarrosse (Landes), a, sur le fondement du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sollicité de l'administration fiscale une prise de position quant au caractère applicable des dispositions de l'article 44 quindecies du code général des impôts. Par décision du 5 juin 2019, il lui a été répondu que l'exonération prévue par ces dispositions n'était pas applicable, en raison de sa situation de dépendance vis-à-vis de la société L3F. Cette position a été ensuite confirmée, après un second examen effectué à la demande de la société, le 19 septembre 2019.
2. La société Bisca Bazar relève appel de l'ordonnance par laquelle le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 septembre 2019.
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal. Elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. (...) ". Aux termes de l'article L. 80 CB du même livre : " Lorsque l'administration a pris formellement position à la suite d'une demande écrite, précise et complète déposée au titre des 1° à 6° ou du 8° de l'article L. 80 B ou de l'article L. 80 C par un redevable de bonne foi, ce dernier peut saisir l'administration, dans un délai de deux mois, pour solliciter un second examen de cette demande, à la condition qu'il n'invoque pas d'éléments nouveaux. (...) Lorsqu'elle est saisie d'une demande de second examen, auquel elle procède de manière collégiale, l'administration répond selon les mêmes règles et délais que ceux applicables à la demande initiale, décomptés à partir de la nouvelle saisine ".
4. Une prise de position formelle de l'administration sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal en réponse à une demande présentée par un contribuable dans les conditions prévues par les dispositions mentionnées au point précédent a, eu égard aux effets qu'elle est susceptible d'avoir pour le contribuable et, le cas échéant, pour les tiers intéressés, le caractère d'une décision.
5. En principe, la décision prise par l'administration à la suite d'un second examen, qui se substitue à la prise de position initiale, ne peut pas, compte tenu de la possibilité d'un recours de plein contentieux devant le juge de l'impôt, être contestée par le contribuable par la voie du recours pour excès de pouvoir. Toutefois, cette voie de droit est ouverte lorsque la prise de position de l'administration, à supposer que le contribuable s'y conforme, entraînerait des effets notables autres que fiscaux et qu'ainsi, la voie du recours de plein contentieux devant le juge de l'impôt ne lui permettrait pas d'obtenir un résultat équivalent. Il en va ainsi, notamment, lorsque le fait de se conformer à la prise de position de l'administration aurait pour effet, en pratique, de faire peser sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet important pour lui ou de l'amener à modifier substantiellement un tel projet.
6. À l'appui de sa demande dirigée à l'encontre de la décision du 19 septembre 2019 précitée, prise sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 CB du livre des procédures fiscales, la société Bisca Bazar soutient que le refus de la faire bénéficier de l'exonération des bénéfices prévue par l'article 44 quindecies du code général des impôts en faveur des entreprises créées dans les zones de revitalisation rurale est de nature à entraîner des effets sur sa situation économique en raison de la distorsion de concurrence qu'elle crée vis-à-vis d'autres sociétés franchisées du même réseau qui ont obtenu cette exonération. Toutefois, elle se borne à indiquer que cela aura un impact financier, sans apporter d'éléments de nature à établir que cet impact excéderait la charge représentée par la soumission à l'impôt de ses bénéfices. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge a estimé qu'elle ne fait valoir aucun effet notable de cette décision autre que fiscal qui ne pourrait être appréhendé par le juge de l'impôt et a, par voie de conséquence, rejeté sa demande comme irrecevable.
7. Il résulte de ce qui précède que la société Bisca Bazar n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Il suit également de là que doivent être rejetées ses conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Bisca Bazar est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée unipersonnelle Bisca Bazar et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Une copie en sera adressée à la direction générale des finances publiques.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2021.
La présidente-assesseure,
Frédérique Munoz-PauzièsLe président-rapporteur,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX01161