Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juin 2016 et 13 février 2018, Mme A...D..., représentée par Me B...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Airion le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les insuffisances du rapport de présentation :
1. Aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le plan local d'urbanisme (...) comprend un rapport de présentation (...) ". Aux termes de l'article L. 123-1-2 du même code : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services. / Il présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers. / Il justifie les objectifs compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques ". Aux termes de l'article R. 123-2 de ce code : " Le rapport de présentation : / 1° Expose le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-1-2 ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement, présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et justifie les objectifs de modération de cette consommation et de lutte contre l'étalement urbain arrêtés dans le projet d'aménagement et de développement durables (...) ".
S'agissant du diagnostic :
2. Les dispositions de l'article L. 123-1-2 du code de l'urbanisme citées au point précédent prévoient que le rapport de présentation s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement dans différents domaines notamment celui de l'habitat et du commerce.
3. D'une part, il ressort du rapport de présentation que celui-ci comporte un bilan démographique complet, comportant des prévisions d'évolution de la population de la commune et qui s'est traduit, dans les orientations du projet d'aménagement et de développement durable (PADD), par un objectif consistant, dans le cadre fixé par le schéma de cohérence territoriale du Clermontois - Plateau picard, à favoriser le maintien de la population en permettant l'accueil de nouvelles constructions dont le nombre tient compte de la diminution de la taille des ménages.
4. D'autre part, le rapport de présentation a constaté qu'il n'y avait aucun commerce ou service dans la commune, ni d'activité industrielle. Il mentionne en revanche la présence de quelques artisans. En outre, des développements importants ont été consacrés à l'agriculture qui est l'activité principale du village. Il n'est d'ailleurs pas contesté que les auteurs du rapport de présentation ont fait un recensement complet des exploitations agricoles. Cette analyse s'est d'ailleurs traduite dans le PADD par un objectif de maintien de l'activité agricole existante sur le territoire communal. Le fait que ne soit pas précisée la nature exacte de l'activité menée par chacune des exploitations concernées, et notamment celles exercées sur les parcelles composant la zone 1AUhb, ne constitue pas une insuffisance au regard des dispositions précitées, dès lors qu'il n'est pas démontré que cette précision aurait pu influer sur les choix des auteurs du plan local d'urbanisme.
5. De même, s'il est vrai que, comme le fait valoir MmeD..., le rapport de présentation se borne, s'agissant des activités économiques menées sur le territoire de la commune, à un diagnostic descriptif, sans exprimer de prévisions économiques au sens strict, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette omission, qui relève de la motivation, a pu, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu en particulier des caractéristiques des activités recensées, révéler une insuffisance qui aurait été de nature à fausser les choix retenus par les auteurs du plan local d'urbanisme, le moyen de l'appelante n'étant, à cet égard et en tout état de cause, assorti d'aucune précision.
6. Dès lors, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que le rapport de présentation serait, en ce qui concerne le diagnostic requis par l'article L. 123-1-2 du code de l'urbanisme, entaché d'insuffisances de nature à entraîner l'illégalité du plan local d'urbanisme.
S'agissant de l'analyse de l'état initial de l'environnement :
7. Le rapport de présentation comporte près de cinquante pages consacrées à l'analyse de l'état initial de l'environnement, conformément aux dispositions du 2° de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme citées au point 1. La description de la nature des activités agricoles menées sur le territoire de la commune est étrangère à l'analyse de l'état initial de l'environnement et n'avait donc pas à être réalisée à ce titre. En tout état de cause, il est constant, ainsi qu'il a été dit au point 4, que les auteurs du rapport de présentation ont réalisé un recensement complet des activités agricoles menées sur le territoire de la commune.
En ce qui concerne la motivation des conclusions du commissaire enquêteur :
8. Aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement (...) ". Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / (...) / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". Si cette règle de motivation n'implique pas que le commissaire enquêteur soit tenu de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, elle l'oblige néanmoins à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.
9. L'avis favorable au projet de plan local d'urbanisme émis en l'espèce par le commissaire enquêteur n'est motivé que par une référence à des considérations générales relatives, notamment, à la large concertation ayant précédé l'élaboration de ce document, la bonne information du public et sa compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale. Le commissaire enquêteur n'a pas exposé les raisons qui le conduisaient à émettre un avis favorable, en méconnaissance des dispositions citées au point précédent, ni, au demeurant, consigné ses conclusions dans un document séparé.
10. Toutefois, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
11. En l'espèce, il ressort de la lecture du rapport du commissaire enquêteur qu'il a répondu précisément aux observations formulées par le public lors de l'enquête. A cette occasion, ainsi que lors de l'analyse des objectifs poursuivis par le projet de plan local d'urbanisme, il a pris position sur les questions les plus débattues. Par son avis favorable, émis au visa, notamment, des avis des personnes publiques associées, et qui n'est assorti d'aucune réserve, il a entendu s'approprier les avis favorables émis par ces personnes. Il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué par Mme D... que l'absence de motivation précise de cet avis favorable a pu, dans les circonstances de l'espèce, exercer une influence sur le sens de la décision prise par le conseil municipal. En outre, dans la mesure où l'enquête s'est tenue dans des conditions satisfaisantes et n'a pas donné lieu, de la part du commissaire enquêteur, à d'autres insuffisances que celle relevée au point 6, cette dernière n'a pas davantage, dans les circonstances de l'espèce, privé les intéressés d'une garantie.
12. Dès lors, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que l'insuffisante motivation des conclusions du commissaire enquêteur est de nature à justifier l'annulation du plan local d'urbanisme en litige.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme :
13. L'article L. 121-1 du code de l'urbanisme dispose que : " les plans locaux d'urbanisme (...) déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : / 1° L'équilibre entre : / a) (...) le développement urbain maîtrisé (...) ; / b) (...) la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières (...) ".
14. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme de la commune d'Airion, qui est le premier document d'urbanisme de la commune, classe en zone agricole près de 60 % du territoire de celle-ci, tandis que les zones urbaines et les zones à urbaniser représentent approximativement 6 % de son territoire. Les zones à urbaniser, qui représentent un total de 5,36 hectares, soit 0,8 % du territoire de la commune, traduisent les objectifs de développement urbain limité poursuivis par les auteurs du plan local d'urbanisme et dont l'appelante ne conteste pas le bien-fondé. Dans ces conditions, le plan local d'urbanisme, notamment en tant qu'il définit ces zones à urbaniser, qui, contrairement à ce qui est soutenu, ne correspondent pas dans leur totalité à des surfaces faisant l'objet d'une exploitation agricole, ne saurait être considéré comme incompatible avec l'objectif d'équilibre au regard de la préservation des espaces affectés aux activités agricoles prévu par l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation qui affecterait la zone 1AUhb :
15. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation sur ces différents points peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
16. Aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites "zones AU". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation (...) ".
17. Il ressort des énonciations du rapport de présentation qu'en vue de répondre à l'objectif de maintien de la population communale, la commune a décidé de créer une zone 1AUhb, d'une surface de 1,41 hectare et destinée à recevoir une quinzaine de constructions à usage d'habitation. Cette zone a été identifiée comme propice au développement de la commune d'Airion dès lors qu'elle est située dans le prolongement du bâti existant et se situe en dehors de la zone à dominante humide qui couvre le fond de vallée.
18. Le fait que cette zone recouvre notamment deux parcelles faisant actuellement l'objet d'une exploitation agricole ne constitue pas, par lui-même, un obstacle à son classement en zone à urbaniser, dès lors que les auteurs du plan local d'urbanisme ne sont pas liés, ainsi qu'il a été dit au point 12, par les modalités existantes d'utilisation des sols. Au demeurant, il n'est pas démontré, ni même d'ailleurs allégué par l'appelante que le classement en zone à urbaniser de la parcelle qu'elle exploite, qui représente 2,35 % de la surface agricole utile de son exploitation, serait de nature à entraver gravement le fonctionnement de celle-ci.
19. Contrairement à ce que soutient MmeD..., cette zone 1AUhb ne se situe pas dans la zone à dominante humide située de part et d'autre de la rivière de l'Arré.
20. Il ressort enfin des pièces du dossier que la zone 1AUhb fait l'objet d'une orientation d'aménagement et de programmation qui prévoit notamment l'aménagement d'un espace vert au sud de la zone afin d'éloigner les futures constructions d'une autre exploitation agricole située à cet endroit, conformément aux dispositions combinées du règlement sanitaire départemental et de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime. Si l'appelante soutient que cette orientation d'aménagement et de programmation ne serait " pas opposable ", elle n'assortit cet argument d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.
21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 17 que Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'en prévoyant la création d'une zone 1AUhb, d'une surface d'ailleurs limitée, les auteurs du plan local d'urbanisme auraient commis une erreur manifeste d'appréciation.
22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune d'Airion, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme à MmeD....
24. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D...le versement à la commune d'Airion de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Mme D...versera la somme de 1 500 euros à la commune d'Airion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et à la commune d'Airion.
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.
N°16DA01082 2