Par une requête, enregistrée le 4 mai 2016, M.C..., représenté par Me D...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 5 janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer le titre de séjour sollicité à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour a été signé par une autorité incompétente ;
- le préfet a commis une erreur de droit en méconnaissant la portée de sa compétence de régularisation ;
- il remplit les conditions de la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée pour prononcer une mesure d'éloignement ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est privée de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-857 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la décision refusant le titre de séjour :
1. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision aurait été signée par une autorité incompétente doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges figurant au point 2 du jugement attaqué ;
2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre époux " ; que ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
3. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 6 de l'accord franco-algérien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant algérien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 précitées à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant algérien qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;
4. Considérant que c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que le préfet de l'Oise ne pouvait se fonder sur les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il a substitué à cette base légale erronée celle tirée du pouvoir, dont dispose le préfet, de régulariser ou non la situation d'un étranger ; qu'en effet, l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation que lorsqu'elle examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 et cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie ; qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé le tribunal, que le préfet a examiné la situation de M. C... en faisant usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation avant de rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ; que, dès lors, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Oise aurait méconnu l'étendue de sa compétence ;
5. Considérant que M. C...ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation dans la circulaire du 28 novembre 2012 ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré en France le 1er novembre 2009 muni d'un visa de court séjour, puis à nouveau le 7 avril 2010 dans les mêmes conditions et qu'il s'est ensuite maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il est célibataire et sans enfant ; que si son frère et cinq de ses cousins demeurent..., il ne justifie pas de la nécessité de sa présence à leurs côtés ; qu'il ne démontre pas avoir noué en France des liens d'une particulière intensité ou être isolé en cas de retour en Algérie où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-six ans ; que le contrat de travail en qualité de cuisinier dont il se prévaut est relativement récent ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas exercer le même métier en Algérie ;
7. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ou que le refus de séjour opposé par le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige est entaché d'illégalité ;
Sur la décision portant obligation de quitter de territoire français :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;
10. Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que le préfet de l'Oise se serait cru en situation de compétence liée pour assortir sa décision de refus de séjour d'une mesure d'éloignement et qu'il n'aurait pas pris en compte la situation particulière de M. C...avant de prononcer une obligation de quitter le territoire français ;
11. Considérant que, pour les motifs mentionnés aux points 4 et 5, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
13. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;
14. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 10 que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire serait privée de base légale ;
15. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, si, en application du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et eu égard à la situation personnelle d'un étranger, l'autorité préfectorale peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de motiver son choix de ne pas faire usage de cette possibilité ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation sur ce point est inopérant ;
16. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 5, l'autorité préfectorale n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant un délai de départ volontaire de trente jours pour l'exécution de la mesure d'éloignement ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision octroyant à M. C...un délai de départ volontaire de trente jours n'est pas entachée d'illégalité ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
18. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 12 que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ;
19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Oise du 5 janvier 2016 ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 24 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 décembre 2016.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°16DA00844 4