Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 mars 2021, Mme B... C... A..., représentée par Me Michel Tamba, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 du préfet de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761 1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... C... A..., ressortissante de la République du Congo, née le 16 avril 1963, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 16 décembre 2015, selon ses déclarations. Elle a présenté, le 29 juin 2016, une demande d'asile qui a été rejetée par une décision du 26 octobre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 juillet 2018. Elle a sollicité, le 1er décembre 2018, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Après avis du 10 mai 2019 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le préfet de la Seine-Maritime lui a délivré une autorisation provisoire l'autorisant à séjourner sur le territoire français du 20 juin au 10 novembre 2019. Le 22 juin 2020, Mme A... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un avis du 3 juin 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, elle pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Par un arrêté du 18 août 2020, le préfet de la Seine-Maritime a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de la Seine-Maritime s'est fondé pour rejeter la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par Mme A... sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, cet arrêté, après avoir visé les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise les éléments retenus par le préfet de la Seine-Maritime, notamment l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 3 juin 2020, pour estimer qu'elle pourrait bénéficier d'un traitement approprié en République du Congo et qu'un refus de titre de séjour ne porte pas au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée alors qu'elle n'établit pas être particulièrement insérée sur le territoire français et être dépourvue d'attaches familiales dans son pays où réside son conjoint et où elle a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-deux ans. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté du préfet de la Seine-Maritime, qui n'était pas tenu de faire état de tous les éléments relatifs à la situation personnelle de Mme A..., doit, par suite, être écarté.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment des termes mêmes de l'arrêté contesté, que le préfet de la Seine-Maritime aurait omis d'examiner les éléments propres à la situation particulière de Mme A... avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour et de prendre à son encontre une mesure d'éloignement.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit: (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur leur fondement, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qu'elles mentionnent, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays d'origine de l'étranger. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
6. En l'espèce, Mme A... ne produit aucune pièce, aussi bien en appel qu'en première instance, permettant de remettre en cause l'appréciation portée par le préfet de la Seine-Maritime, sur la base notamment de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 3 juin 2020, quant à la possibilité pour elle de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il s'ensuit que le préfet de la Seine-Maritime, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. Si Mme A... se prévaut de sa présence sur le territoire français, depuis plus de quatre ans à la date de l'arrêté contesté, et de la présence de ses deux filles, qui y résident régulièrement, et de ses petits-enfants, elle ne fait état d'aucune insertion particulière en France et n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-deux ans et où résident encore son époux ainsi que ses deux sœurs. Dans ces conditions, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A....
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. Il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été énoncé au point 6 du présent arrêt, que Mme A... ne pourrait effectivement accéder à un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. Par ailleurs, la requérante, dont la demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile, ne fait valoir aucun élément susceptible d'établir le bien-fondé des craintes pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
11. En dernier lieu, si Mme A... soutient que la mesure d'éloignement méconnaît le principe de non-discrimination reconnu par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
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N°21DA00559