Par un jugement n°2003550 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 juin 2021, M. A... représenté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du préfet de l'Oise du 9 juillet 2020 ainsi que la décision implicite du 21 octobre 2020 par laquelle le préfet de l'Oise a rejeté son recours gracieux ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " valable un an, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au profit de la Selarl Eden, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 5 juin 1999, entré sur le territoire français le 30 octobre 2015 selon ses déclarations, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à compter du 6 novembre 2015. Après avoir bénéficié d'une carte de séjour " étudiant " valable du 19 octobre 2018 au 18 octobre 2019, il a présenté le 13 octobre 2019, une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 9 juillet 2020, le préfet de l'Oise a rejeté cette demande, a assorti ce refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination. Le 13 août 2020, M. A... a formé un recours gracieux contre cet arrêté se prévalant notamment d'une nouvelle promesse d'embauche en qualité d'électricien en contrat à durée indéterminée à temps plein pour un salaire mensuel brut de 1 539,42 euros et sollicitant une carte de séjour temporaire mention " salarié " sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code précité. Il relève appel du jugement du 21 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2020 et de la décision de rejet implicite de son recours gracieux du 21 octobre 2020.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. M. A... reprend en appel le moyen tiré de l'insuffisance de motivation. Il ne se prévaut toutefois devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
3. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention "salarié ". / (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a émis le 30 juin 2020 un avis défavorable à la demande de changement de statut présenté par M. A... le 13 octobre 2019 aux motifs que la société Dotech qui souhaitait l'embaucher comme câbleur pour un contrat à durée déterminée de sept mois n'avait pas répondu à ses courriers des 24 janvier et 15 mars 2020. Si M. A..., se prévaut d'une promesse d'embauche d'une autre société, la société 3M Aménagement dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité d'électricien, ce document est postérieur à l'arrêté contesté et l'intéressé n'allègue pas avoir présenté un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Ainsi, le préfet de l'Oise, qui a procédé à un examen particulier de la situation de M. A..., a pu légalement refuser de lui délivrer pour ce motif le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté.
5. Aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. Les instructions et circulaires sont réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. / Un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission mentionnée au titre IV précise les autres modalités d'application du présent article. " Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. / (...) ". Aux termes de l'article D. 312-11 : " Les sites internet mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-3 sont les suivants : / (...) / ; www.interieur.gouv.fr ; (...) " et aux termes de l'article R. 312-10 : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site. / Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : "Conformément à l'article L. 312-3 du CRPA, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ". / (...) ".
6. Il résulte des dispositions précitées que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site www.interieur.gouv.fr par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.
7. M. A... soutient que résidant en France depuis plus de quatre ans à la date de l'acte contesté et justifiant de quatorze mois consécutifs de travail déclarés sur les vingt-quatre derniers mois, il remplissait les conditions énoncées par la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, en vue de la régularisation de sa situation au regard du droit au séjour. Toutefois, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur n'a pas été publiée dans les conditions prévues aux points 5 et 6. Si elle a fait l'objet d'une mise en ligne sur le site Légifrance le 1er avril 2019, elle ne figure toutefois pas parmi la liste des documents opposables. Sa publication ne comporte ainsi aucune date de déclaration d'opposabilité. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le requérant ne pouvait utilement se prévaloir de cette circulaire qui ne comporte au demeurant que des orientations générales.
8. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
9. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., entré mineur en France, a bénéficié d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de l'Oise jusqu'à sa majorité. Il justifie avoir suivi avec sérieux une scolarité à Beauvais du 1er septembre 2016 au 19 février 2020 jusqu'en première professionnelle " métiers de l'électricité et de ses environnements connectés ", et a obtenu en septembre 2019 un certificat d'aptitude professionnelle de " préparation et réalisation d'ouvrages électriques ". Il n'est pas contesté qu'il a par ailleurs travaillé durant ses études en tant qu'employé polyvalent pour la société " My Pizza " puis en tant que câbleur pour la société Dotech jusqu'en mars 2020 et qu'il dispose d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité d'électricien. Toutefois, célibataire et sans enfant à charge, il n'apporte aucun élément pour justifier de l'intensité et de la stabilité des liens qu'il a tissés en France depuis son arrivée et n'établit pas, ni même n'allègue qu'il serait isolé en cas de retour au Pakistan où résident notamment son père et sa mère. Dans ces conditions et en dépit de ses efforts d'intégration notamment scolaires et professionnels dont il a fait preuve, le préfet de l'Oise, en lui refusant un titre de séjour, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'en prenant cette décision, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En application des dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français qui assortit une décision de refus de titre de séjour, n'a pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte de celle de cette décision. La décision portant refus de titre de séjour est, en l'espèce, suffisamment motivée ainsi qu'il a été dit au point 2. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
11. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de M. A... C... la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9.
12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 9 que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Sur la décision fixant le pays de destination :
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 10 à 12 que la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision doit être écarté.
Sur la décision rejetant son recours gracieux :
14. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...)".
15. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
16. Si les dispositions de l'article L. 313-14 du code permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour " salarié " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article, et notamment de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu déroger à la règle rappelée ci-dessus ni imposer à l'administration, saisie d'une demande d'une carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article. Il en résulte qu'un étranger ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre d'un refus opposé à une demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article.
17. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a formé le 13 aout 2020, un recours gracieux à l'encontre de l'arrêté du 9 juillet 2020 en se prévalant notamment d'une promesse d'embauche datée du 27 juillet 2020 établie par la société 3M Agencement en vue d'un contrat à durée indéterminée à temps plein et sollicitant la délivrance d'un titre sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité. Toutefois, le préfet, initialement saisi d'une demande de changement de statut d'étudiant en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-10 du même code n'était pas tenu d'examiner la demande de M. A... à un autre titre que celui sur lequel elle était fondée. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit par suite être écarté.
18. En tout état de cause, ni la circonstance que M. A... dispose d'une promesse d'embauche en qualité d'électricien, ni celle selon laquelle il est présent depuis cinq ans sur le territoire français ne constituent des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels propres à justifier l'admission au séjour, à titre dérogatoire, de l'intéressé sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite le moyen tiré l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
19. Pour les motifs indiqués au point 9, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent également être écartés.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2020 ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Cécile Madeline.
Copie sera adressée à la préfète de l'Oise.
N°21DA01249 2