- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Un incendie survenu le 5 juin 2010 sur un véhicule situé au premier sous-sol du parc de stationnement du centre commercial du Puy du Roy a entraîné des dommages sur des bâtiments municipaux adjacents de la ville de Compiègne. La société MMA Iard Assurances a, en sa qualité d'assureur, versé à la commune de Compiègne une somme de 88 629,01 euros à la suite de ce sinistre. Estimant l'incendie provoqué par deux mineurs dont le département de l'Oise avait la garde, la société MMA Iard Assurances l'a saisi, le 19 janvier 2015, d'une demande d'indemnisation préalable tendant au remboursement de la somme ainsi versée. Le département de l'Oise relève appel du jugement du 4 avril 2017 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamné à verser à la société MMA Iard Assurances une somme de 88 328,18 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2015 en indemnisation des préjudices subis par la commune de Compiègne.
Sur la responsabilité du département de l'Oise :
2. Il appartient au juge administratif, saisi d'une action en responsabilité pour des faits imputables à un mineur pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance, de déterminer si, compte tenu des conditions d'accueil du mineur, notamment la durée de cet accueil et le rythme des retours du mineur dans sa famille, ainsi que des obligations qui en résultent pour le service d'aide sociale à l'enfance et pour les titulaires de l'autorité parentale, la décision du président du conseil général, devenu conseil départemental, prise sur le fondement de ces dispositions et aujourd'hui sur celui de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, avec le consentement des titulaires de l'autorité parentale, s'analyse comme une prise en charge durable et globale de ce mineur, pour une période convenue, par l'aide sociale à l'enfance. Si tel est le cas, cette décision a pour effet de transférer au département la responsabilité d'organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur durant cette période. Ni la circonstance que la décision de prise en charge du mineur prévoie un retour de celui-ci dans son milieu familial de façon ponctuelle ou selon un rythme qu'elle détermine, ni celle que le mineur y retourne de sa propre initiative ne font par elles-mêmes obstacle à ce que cette décision entraîne un tel transfert de responsabilité. En raison des pouvoirs dont le département se trouve, dans ce cas, investi, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur, y compris lorsque ces dommages sont survenus alors que le mineur est hébergé par ses parents, dès lors qu'il n'a pas été mis fin à cette prise en charge par le service d'aide sociale à l'enfance par décision des titulaires de l'autorité parentale ou qu'elle n'a pas été suspendue ou interrompue par l'autorité administrative ou judiciaire. A l'égard de la victime, cette responsabilité n'est susceptible d'être atténuée ou supprimée que dans le cas où le dommage est imputable à une faute de celle-ci ou à un cas de force majeure. En outre, dans le cadre d'une action en garantie, le département peut, le cas échéant, se prévaloir de la faute du tiers ayant concouru à la réalisation du dommage.
3. En premier lieu, il ressort en particulier des attestations établies respectivement les 23 janvier 2014 et 13 octobre 2016 par la directrice adjointe de la protection de l'enfance du département de l'Oise, que les jeunes Nicolas C... et Christopher Holderbaum, mis en cause dans le cadre de l'incendie du véhicule survenu le 5 juin 2010 dans le parc de stationnement du centre commercial du Puy du Roy, étaient confiés, au moment des faits, à l'aide sociale à l'enfance dans le cadre, pour le premier, d'une mesure administrative adoptée sur le fondement de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles et, pour le second, d'une mesure de placement judiciaire prévue par les articles 375 et suivants du code civil. Il n'est pas établi que cette prise en charge par le service d'aide sociale à l'enfance aurait été suspendue ou interrompue par l'autorité administrative ou judiciaire. Il en résulte que la responsabilité du département est susceptible d'être engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ces mineurs.
4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances du sinistre établi par plusieurs experts contradictoirement le 22 mars 2011 en présence de celui du département, qu'à la suite de l'incendie d'un véhicule, les deux mineurs mentionnés précédemment, qui s'étaient introduits à l'intérieur du parc de stationnement, ont été appréhendés le 8 juin 2010 et entendus par le juge pour enfants. Par un jugement du 1er octobre 2014, devenu définitif sur l'action publique et dont les constatations de fait s'imposent au juge administratif, le tribunal pour enfants de Beauvais a jugé que Nicolas C... avait volontairement détérioré un véhicule dans ce parc de stationnement souterrain provoquant un incendie de nature à créer un danger pour les personnes et à l'origine de la détérioration d'un bien appartenant à la commune de Compiègne, l'a déclaré coupable de ces faits et l'a condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis. Le département de l'Oise étant responsable, même sans faute, des dommages causés par le jeune B... C... dont il avait la garde, la circonstance que la culpabilité de Christopher Holderbaum ne serait pas établie est sans incidence sur son obligation de réparer, intégralement, les dommages subis par les victimes. Dans ces conditions, tant la matérialité des faits que l'existence d'un lien de causalité entre ceux-ci et les dommages subis par la commune de Compiègne doivent être regardés comme établis.
5. En troisième lieu, les circonstances selon lesquelles la commune de Compiègne a, au mois d'avril 2007, interdit l'accès au parc de stationnement en cause en raison de sa vétusté et du non-respect des normes relatives à la lutte contre l'incendie, y serait propriétaire de plusieurs places de stationnement, et aurait bénéficié d'une subvention publique attribuée dans le cadre de sa restauration ne sont de nature à établir ni qu'elle serait propriétaire de ce parc, au demeurant inséré dans un ensemble immobilier comprenant un centre commercial et relevant du régime de la copropriété, ni qu'elle en serait, à un titre quelconque, responsable de la gestion. Le département de l'Oise n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il lui appartenait d'interdire, outre au titre des pouvoirs de police administrative du maire, l'accès à ce parc de stationnement en sa qualité de propriété ou de gestionnaire, ni qu'il lui appartenait d'assurer, seule, la mise aux normes du parc s'agissant de la prévention et de la lutte contre les risques d'incendie, ni de s'assurer de l'absence de tout véhicule. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que le dommage soit imputable même partiellement à une faute de la commune.
Sur le préjudice :
6. La société MMA Iard Assurances justifie par le document intitulé " évaluation des dommages imputables au sinistre " qu'elle produit, établi par les experts mentionnés au point 4 et qui a été signé par le cabinet Texa, représentant le département de l'Oise, de la description des dommages en lien avec l'incendie ainsi que de leur montant. En outre, celui-ci, contrairement à ce qui est soutenu, a été calculé après application d'un coefficient de vétusté dont il n'est pas établi par la seule affirmation de la fermeture du parc de stationnement depuis 2007 qu'il devrait s'élever à 70 % et s'élève ainsi à la somme totale de 88 328,18 euros. Par suite, et dans la mesure où il n'est pas établi que la société MMA Iard aurait déjà été indemnisée, c'est à bon droit que les premiers juges ont mis à la charge du département de l'Oise cette somme.
Sur les intérêts :
7. La somme de 88 328,18 euros mise à la charge du département de l'Oise portera intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2015, date de réception de la réclamation préalable de la société MMA Iard Assurances.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le département de l'Oise n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens l'a condamné à verser à la société MMA Iard Assurances une somme de 88 328,18 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2015. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du département de l'Oise le versement à la société MMA Iard Assurances d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du département de l'Oise est rejetée.
Article 2 : Le département de l'Oise versera à la société MMA Iard Assurances une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département de l'Oise et à la société MMA Iard Assurances.
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N°17DA01125