Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 août 2017 et le 1er mars 2019, la SARL Jean-Luc Fallet, représentée par Me C...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 9 juin 2015 en tant qu'elle a fixé à 11 622 euros au lieu de 34 630 euros le montant de l'aide qui lui a été accordée et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au directeur général de l'établissement FranceAgriMer de lui verser la somme de 23 008 euros manquante à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'établissement FranceAgriMer à lui verser une somme de 10 000 euros en indemnisation des préjudices moral, financier et matériel qu'elle estime avoir subis ;
5°) de mettre à la charge de l'établissement FranceAgriMer une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 479/2008 du 29 avril 2008 ;
- le code civil ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le décret n° 2009-178 du 16 février 2009 ;
- l'arrêté du 17 avril 2009 définissant les conditions de mise en oeuvre de la mesure de soutien aux investissements éligibles au financement par les enveloppes nationales en application du règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil du 29 avril 2008 portant organisation commune du marché vitivinicole ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,
- et les observations de Me D...B..., représentant l'établissement FranceAgriMer.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Jean-Luc Fallet a déposé auprès de l'établissement FranceAgriMer, le 18 décembre 2013, une demande d'aide pour la réalisation d'investissements portant sur l'acquisition d'un pressoir à membrane et de cuves en inox dans le cadre des aides aux programmes d'investissement vinicole relevant du règlement (CE) n° 479/2008 du 29 avril 2008 portant organisation commune du marché vitivinicole. Cette aide lui a été accordée par une décision du 8 septembre 2014 pour un montant maximum de 34 345,50 euros. A la suite d'un contrôle effectué sur place, une aide d'un montant plafonné à 11 622 euros lui a été versée par une décision du 9 juin 2015. La SARL Jean-Luc Fallet relève appel du jugement du 20 juin 2017 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, ensemble la décision du 23 septembre 2015 de rejet de son recours gracieux et à la condamnation de FranceAgriMer à lui verser une somme de 10 000 euros en indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret n° 2009-178 du 16 février 2009 définissant les modalités de mise en oeuvre des mesures retenues au titre du plan national d'aide au secteur vitivinicole modifié par le décret du 25 février 2013 relatif au programme d'aide national au secteur vitivinicole pour les exercices financiers 2014 à 2018 : " Le programme d'aide national au secteur vitivinicole mentionné à l'article 103 decies du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 susvisé et rendu applicable dans les conditions prévues à l'article 103 duodecies de ce règlement et à l'article 2 du règlement (CE) n° 555/2008 de la Commission du 27 juin 2008 susvisé pour les exercices financiers 2014 à 2018 est mis en oeuvre par l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret du 16 février 2009 modifié par ce décret du 25 février 2013 : " Des arrêtés conjoints des ministres chargés de l'agriculture et du budget précisent les conditions et les modalités d'attribution des aides mentionnées aux articles 10, 11, 15, 16, 18 et 19 du règlement (CE) n° 479/2008 du 29 avril 2008. / Toutefois, sont précisées par décision du directeur général de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) les conditions et modalités d'attribution : / - des aides aux investissements, lorsque la demande a été déposée à compter du 1er janvier 2013 ; (...) / Ces arrêtés et décisions déterminent à ce titre : / 1. La procédure et les critères de sélection des demandes d'aides à la promotion sur le marché des pays tiers mentionnés à l'article 5 du règlement (CE) n° 555/2008 susvisé et des demandes d'aides aux investissements mentionnés aux articles 17 et 18 de ce règlement ; (...) ".
3. D'autre part, il résulte de l'article 3 de la décision FILITL/SEM/D 2013-76 du 4 décembre 2013 que le bénéficiaire s'engage à ce que le projet pour lequel la subvention est demandée ne reçoive aucun commencement d'exécution avant la réception de l'accusé de réception de la demande d'aide.
4. Il ressort des pièces du dossier que les dépenses d'acquisition du pressoir ont été exclues de l'aide éligible au motif que leur acquisition avait reçu un commencement d'exécution antérieurement au 6 janvier 2014, date d'autorisation de commencer les travaux figurant sur l'accusé de réception de la demande d'aide. Si la SARL Jean-Luc Fallet avait commandé un pressoir le 12 novembre 2013, il ressort des pièces du dossier que ce contrat a été révoqué d'un commun accord entre les parties qui y ont substitué un nouvel engagement résultant d'un bon de commande daté du 14 mars 2014. La révocation d'un commun accord d'un contrat à exécution instantanée entre deux personnes privées a pour effet de l'anéantir rétroactivement. Il s'ensuit que FranceAgriMer ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, exclure les dépenses d'acquisition du pressoir au motif que le contrat né du bon de commande du 12 novembre 2013 avait reçu un commencement d'exécution. La société requérante est ainsi fondée à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, la SARL Jean-Luc Fallet est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 juin 2015 en litige.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Eu égard aux motifs du présent arrêt, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est pas allégué par FranceAgrimer que le montant accordé par la décision du 8 septembre 2014 devrait faire l'objet d'autre réduction que celle en litige, il y a lieu d'enjoindre à l'établissement FranceAgrimer de procéder au versement à la SARL Jean-Luc Fallet de la somme de 22 723,45 euros correspondant à la différence entre le montant de l'aide attribuée par la décision du 8 septembre 2014 et l'aide effectivement versée en juin 2015, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions indemnitaires :
6. La SARL Jean-Luc Fallet demande la condamnation de l'établissement FranceAgriMer à l'indemniser des préjudices subis à raison de la décision en litige. Toutefois, ainsi que le faisait valoir à titre principal FranceAgriMer devant les premiers juges, la société appelante n'établit pas avoir adressé à cet établissement une demande tendant à cette fin, de nature à lier le contentieux. Dès lors, l'établissement FranceAgriMer est fondé à soutenir qu'elles sont irrecevables. Elles doivent, par suite, être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SARL Jean-Luc Fallet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à l'établissement FranceAgriMer une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'établissement FranceAgrimer une somme de 1 500 euros à verser à la SARL Jean-Luc Fallet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1503434 du 20 juin 2017 du tribunal administratif d'Amiens et la décision du 9 juin 2015 du directeur général de l'établissement FranceAgriMer, ensemble la décision du 23 septembre 2015 rejetant le recours gracieux, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint à l'établissement FranceAgrimer de verser à la SARL Jean-Luc Fallet la somme de 22 723,45 euros, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.
Article 3 : L'établissement FranceAgriMer versera une somme de 1 500 euros à la SARL Jean-Luc Fallet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Jean-Luc Fallet et les conclusions de l'établissement FranceAgrimer présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Jean-Luc Fallet, à l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
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N°17DA01730