Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 mars 2019, M.C..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant algérien né le 14 octobre 1985, est entré régulièrement en France le 7 novembre 2015 sous couvert d'un passeport muni d'un visa de court séjour en cours de validité. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 mai 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 février 2017. Le 19 mai 2017, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'une année sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêté du 5 février 2018, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure. M. C... relève appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions de procédure s'appliquent aux demandes présentées par les ressortissants algériens sur le fondement des stipulations précitées : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. / (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ".
3. M.C..., en invoquant les dispositions de l'article 1er de l'arrêté du 9 novembre 2011, qui organisaient les conditions dans lesquelles le ressortissant étranger ayant déposé une demande d'admission au séjour pour motif médical faisait établir un rapport médical par un médecin agréé ou par un médecin praticien hospitalier, conteste que le rapport le concernant ait été établi par une autorité compétente. Toutefois, selon les dispositions de l'article 13 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les dispositions du présent arrêté entrent en vigueur le 1er janvier 2017 pour les demandes enregistrées en préfecture à compter de cette date. ". Il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour introduite par M. C...a été enregistrée à la préfecture du Nord le 19 mai 2017. En conséquence, il résulte des dispositions précitées de l'article 13 de l'arrêté du 27 décembre 2016 que cette demande devait être examinée selon la procédure prévue par ce nouveau texte, qui prévoit désormais qu'un collège de médecins placés auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émette un avis. En revanche, les dispositions de l'arrêté du 9 novembre 2011 dont se prévaut le requérant n'étaient pas applicables à sa demande de titre de séjour. Par suite, tel qu'il est invoqué, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en raison de l'incompétence du médecin agréé qui a émis le rapport médical destiné à éclairer le médecin de l'agence régionale de santé ne peut qu'être écarté.
4. Il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté du 5 février 2018 en litige que ceux-ci, qui ne se limitent pas à reproduire des formules préétablies, énoncent les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement du refus de séjour prononcé à l'égard de M. C.... Le préfet du Nord, qui n'avait pas à faire mention de toutes les circonstances de fait caractérisant la situation de l'intéressé, a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent sa décision. En outre, la décision comporte les éléments sur lesquels le préfet du Nord s'est fondé pour conclure à l'effectivité d'un traitement approprié à la pathologie du requérant en Algérie. Par suite, la décision doit être regardée comme étant suffisamment motivée.
5. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un Algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis désormais émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale en Algérie. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le certificat de résidence algérien sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que le requérant fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie.
6. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à M. C...le certificat de résidence qu'il sollicitait pour raison de santé, le préfet du Nord s'est prononcé au vu notamment d'un avis émis le 21 octobre 2017 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Selon les termes de cet avis, si l'état de santé de M. C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et son état de santé lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Pour contester l'appréciation portée sur sa situation par le préfet du Nord, qui a estimé que les éléments portés à sa connaissance n'étaient pas de nature à remettre en cause cet avis, M. C...soutient qu'il ne pourrait pas bénéficier, en Algérie, de l'un des médicaments qui lui sont prescrits, à savoir le Seresta 50mg. S'il n'est pas contesté que cette spécialité ne figure pas parmi les traitements disponibles en Algérie, il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment des éléments d'information produits par le préfet du Nord, que plusieurs principes actifs susceptibles d'être substitués au Seresta y sont disponibles. En invoquant seulement l'effet de dépendance susceptible de résulter de la prescription du Seresta sur une longue période, M. C..., qui justifie seulement d'une prescription de ce médicament à compter du 12 avril 2018, soit au demeurant à compter d'une date postérieure à celle de l'arrêté en litige, n'apporte pas d'éléments suffisants permettant d'établir qu'il pourrait être confronté à un tel phénomène de dépendance, ni, par suite, qu'une telle substitution ne serait pas envisageable dans sa situation. En outre, s'il évoque la contrefaçon de médicaments qui sévirait en Algérie et qui serait de nature à y perturber l'accès effectif aux soins, il n'apporte aucun élément suffisamment précis permettant d'établir qu'il pourrait personnellement en pâtir. Enfin, l'attestation médicale qu'il verse au dossier, qui a été établie le 11 avril 2017 par un psychiatre exerçant au sein de l'établissement public de santé mentale de Lille-Métropole, selon laquelle le trouble anxieux sévère dont il souffre serait en lien avec des traumatismes psychologiques vécus à l'occasion des attentats perpétrés dans sa ville natale, se limite à reprendre les dires de M. C...sur ce point. Ainsi, cette seule attestation ne peut suffire à elle seule à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet du Nord, selon laquelle l'intéressé peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, pour refuser de délivrer à M. C...un titre de séjour pour raison de santé, le préfet du Nord n'a pas méconnu les stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne s'est pas davantage mépris dans l'appréciation de la situation de l'intéressé.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6, que la décision portant refus de délivrer un titre de séjour à M. C...n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision obligeant le requérant à quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté.
8. En second lieu, aux termes des dispositions du 10° de l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 doit être écarté le moyen tiré de ce que le préfet du Nord aurait fondé la décision portant obligation de quitter le territoire français sur des considérations de fait matériellement inexactes en ce qui concerne l'offre de soins disponible en Algérie. Pour ces mêmes motifs, doivent également être écartés les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que, pour faire obligation à M. C... de quitter le territoire français, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de M.C....
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles qu'il présente sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.C..., au ministre de l'intérieur et à Me A....
Copie en sera transmise au préfet du Nord.
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N°19DA00695