Par un arrêt n° 18DA00450 du 21 mai 2019, la cour administrative d'appel de Douai, saisie d'un appel interjeté contre ce jugement par M. B..., a rejeté sa requête.
Par une décision n° 432960 du 11 février 2021, le Conseil d'Etat, sur le pourvoi de M. B..., a annulé l'arrêt de la cour, en tant qu'il statue sur la majoration pour manquement délibéré dont a été assortie une partie des impositions et contributions en litige et lui a renvoyé, dans cette mesure, le jugement de l'affaire.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2018, M. B..., représenté par la SCP Zribi-Texier, demande à la cour, dans la limite des conclusions qui lui ont été renvoyées :
1°) d'annuler le jugement du 21 décembre 2017 du tribunal administratif de Lille ;
2°) de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, portant sur les années 2009 et 2010. Par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 27 août 2012, à l'issue de ce contrôle, l'administration a réintégré dans son revenu imposable au titre de l'année 2009, d'une part, des revenus fonciers non déclarés pour un montant de 13 974 euros, selon la procédure de rectification contradictoire, et, d'autre part, des sommes regardées comme des revenus d'origine indéterminée pour un montant de 117 449 euros, selon la procédure de taxation d'office, et l'a en conséquence assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts. M. B... ayant formulé des observations qui n'ont pas conduit l'administration à revoir sa position et la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ayant, à l'issue de sa séance du 22 octobre 2013, émis un avis favorable au maintien du rehaussement en matière de revenus d'origine indéterminée, les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant des rectifications ainsi notifiées ont été mis en recouvrement le 31 janvier 2014, à hauteur d'une somme totale de 243 267 euros en droits et pénalités.
2. Sa réclamation ayant été rejetée, M. B... a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009. Par un jugement du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de cette demande, à concurrence du dégrèvement intervenu en cours d'instance et résultant de la substitution de la majoration de 10 % prévue, en cas d'inexactitude ou d'omission de déclaration, à l'article 1758 A du code général des impôts à la majoration de 40 % pour manquement délibéré qui avait été appliquée au rappel notifié en matière de revenus fonciers. Par ce même jugement, le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de la demande de l'intéressé. M. B... en a relevé appel dans cette mesure. Par un arrêt du 21 mai 2019, la cour administrative d'appel de Douai, après avoir notamment estimé que la majoration de 40 % pour manquement délibéré, que l'administration avait maintenue en ce qui concerne les suppléments d'impôt et de contributions sociales résultant de la rectification en matière de revenus regardés comme d'origine indéterminée, était fondée, a rejeté sa requête. Par une décision du 11 février 2021, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi en cassation introduit par M. B..., a annulé l'arrêt de la cour, en tant qu'il a statué sur la majoration pour manquement délibéré, et lui a renvoyé, dans cette mesure, le jugement de l'affaire.
Sur la motivation de la pénalité en litige :
3. En vertu de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales doivent être motivées, c'est-à-dire comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement des sanctions prononcées.
4. Pour justifier que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre de l'année 2009, en conséquence de la réintégration, dans ses revenus imposables de cette année, de revenus regardés comme d'origine indéterminée, soient assorties de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu, dans la proposition de rectification qu'elle a adressée le 27 août 2012 à l'intéressé, que M. B... n'avait apporté aucune explication précise, ni aucune justification, aux nombreux versements qu'il avait reçus sur son compte bancaire par l'encaissement de chèques émis par des particuliers, qu'il n'avait aucunement collaboré, au cours du contrôle dont il avait fait l'objet, aux recherches effectuées par le vérificateur et que les sommes encaissées atteignaient un montant important, presque équivalent au montant des revenus annuels qu'il portait habituellement sur ses déclarations, de sorte que l'absence de mention des sommes en cause sur la déclaration de revenus que le contribuable avait souscrite au titre de l'année 2009 ne pouvait être regardée comme procédant d'un oubli ni d'une erreur. Ces motifs, quel qu'en soit le bien-fondé, constituent, au regard de l'exigence posée par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, une motivation suffisante pour justifier l'application de cette pénalité.
Sur le bien-fondé de la pénalité :
5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".
6. D'une part, il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir ce manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt. Si l'administration se fonde également sur des éléments tirés du comportement du contribuable pendant la vérification, la mention d'un tel motif, qui ne peut en lui-même justifier l'application d'une telle pénalité, ne fait pas obstacle à ce que le manquement délibéré soit regardé comme établi dès lors que les conditions rappelées ci-dessus sont satisfaites.
7. D'autre part, alors même que, dans le document comportant la motivation des pénalités, l'administration se serait bornée à invoquer des indices insuffisants, à eux seuls, à lui permettre d'apporter la preuve de l'intention délibérée d'éluder l'impôt qu'elle prête au contribuable, l'administration est en droit d'apporter, devant le juge de l'impôt, tous indices de nature à établir que le contribuable avait effectivement cette intention, sous réserve toutefois que ces indices nouveaux reposent sur des éléments de fait qu'elle avait initialement retenus pour motiver la pénalité.
8. En ajoutant, dans ses écritures contentieuses, aux indices précédemment exposés dans la proposition de rectification adressée à M. B... et énoncés au point 4, que les sommes regardées comme constituant des revenus d'origine indéterminée avaient été reçues par l'intéressé, au cours de l'année 2009, au moyen de 31 versements effectués par chèque, à une fréquence régulière, sur son compte bancaire, par des particuliers et que, malgré la répétition de ces versements, l'intéressé avait omis de porter les sommes correspondantes sur sa déclaration de revenus, le ministre, qui ne se fonde pas sur des faits nouveaux, mais sur l'existence de crédits bancaires d'origine non identifiée et non déclarés mis en évidence par la proposition de rectification du 27 août 2012, doit, ce faisant, être regardé comme se prévalant du caractère répété des dissimulations, consistant en la perception réitérée de sommes de plusieurs origines ne se rapportant à aucune opération identifiable et sans que le contribuable soit en mesure de justifier de leur nature ni de leur objet. Dans ces conditions, alors même que le comportement adopté par M. B... au cours du contrôle dont il a fait l'objet n'était pas de nature à justifier l'application de la pénalité contestée, les autres indices invoqués par l'administration dans la proposition de rectification adressée à l'intéressé, ajoutés à l'élément ainsi avancé par le ministre devant la cour, sont, pris dans leur ensemble, de nature à apporter la preuve de l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a été celle de M. B... au cours de l'année d'imposition en litige. L'administration était, dès lors, fondée à assortir les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à la charge de l'intéressé en conséquence de la réintégration, dans ses revenus imposables de l'année 2009, des revenus d'origine indéterminée qu'il a perçus au cours de cette année, de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la majoration pour manquement délibéré restant en litige après le dégrèvement prononcé devant les premiers juges. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du 21 décembre 2017 en tant que, par celui-ci, le tribunal administratif de Lille a statué sur la majoration pour manquement délibéré, demeurant en litige, dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009, ainsi que celles tendant à la décharge de cette majoration et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°21DA00351