Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 4 août 2020, et un mémoire complémentaire enregistré le 9 septembre 2020, M. A... C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2020 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 8 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours et sous la même astreinte, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ; à titre infiniment subsidiaire, et en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de l'assigner à résidence ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'avis de la commission du titre de séjour ne lui a pas été notifié ;
- l'avis de la commission du titre de séjour est irrégulier, le rapporteur de son dossier ainsi que le secrétaire de séance n'étant pas compétents pour assurer leurs fonctions ;
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation familiale ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur de droit en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié au motif qu'il n'avait pas présenté de contrat de travail visé ;
- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de ne pas lui accorder de délai de départ volontaire supérieur à trente jours méconnaît les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 1er juillet 2020, confirmée par une ordonnance du président de la cour du 31 août 2020, la demande d'aide juridictionnelle de M. C... a été rejetée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant bangladais né en 1979, est entré en France en avril 2005. Il a présenté une demande d'asile puis deux demandes de réexamen de sa demande d'asile, qui ont été rejetées. Par décision du 5 mai 2011, le préfet du Val d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une mesure d'éloignement. Le 20 juin 2016, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par arrêté du 8 mars 2019, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 17 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de séjour :
2. En premier lieu, M. C... réitère en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens selon lesquels la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour composée : a) D'un maire ou de son suppléant désignés par le président de l'association des maires du département ou, lorsqu'il y a plusieurs associations de maires dans le département, par le préfet en concertation avec celles-ci et, à Paris, du maire, d'un maire d'arrondissement ou d'un conseiller d'arrondissement ou de leur suppléant désigné par le Conseil de Paris ; b) De deux personnalités qualifiées désignées par le préfet ou, à Paris, le préfet de police. Le président de la commission du titre de séjour est désigné, parmi ses membres, par le préfet ou, à Paris, le préfet de police. / Dans les départements de plus de 500 000 habitants, une commission peut être instituée dans un ou plusieurs arrondissements. " Aux termes de l'article R. 312-1 du même code : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police met en place la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 par un arrêté :1) Constatant la désignation des élus locaux mentionnés au a du même article ; 2) Désignant les personnalités qualifiées mentionnées au b du même article ; 3) Désignant le président de la commission. " Aux termes de l'article R. 312-6 dudit code : " Le chef de service des étrangers de la préfecture, ou son représentant, assure les fonctions de rapporteur auprès de la commission. Il ne prend pas part à sa délibération. / Ledit service assure le secrétariat de la commission. " Et aux termes de l'article R. 312-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Devant la commission, l'étranger fait valoir les motifs qu'il invoque à l'appui de sa demande d'octroi ou de renouvellement d'un titre de séjour. Un procès-verbal enregistrant ses explications est transmis au préfet avec l'avis motivé de la commission. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé. ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la commission du titre de séjour, régulièrement composée, a rendu un avis le 11 décembre 2018 sur la situation de M. C.... La circonstance alléguée selon laquelle la secrétaire de séance et le rapporteur du dossier n'auraient pas fait partie du service des étrangers, ce qui n'est pas constitutif en soi d'une garantie, n'est pas de nature à avoir exercé une influence sur le sens de l'avis. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier et notamment de la copie de l'enveloppe produite à l'instance par le préfet du Rhône, dont les mentions sont suffisamment lisibles et non utilement contredites par le requérant, que le pli contenant cet avis a été présenté le 2 février 2019 à l'adresse de domiciliation communiquée par M. C..., et que ce dernier, absent, a été avisé de ce que le pli était à sa disposition. Faute d'avoir été réclamé, ce pli a été retourné à la préfecture du Rhône. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'irrégularité de l'avis de la commission du titre de séjour et de l'absence de notification régulière de cet avis doivent être écartés.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. C... fait valoir qu'il résidait depuis près de quatorze années en France à la date de la décision en litige et qu'il est dépourvu d'attaches familiales proches au Bangladesh, étant divorcé et son fils étant décédé. Toutefois, l'intéressé est célibataire et ne fait état d'aucune attache familiale ou amicale en France. Il ne démontre pas non plus une particulière insertion dans la société française, même s'il justifie d'une promesse d'embauche dans une société de restauration. Dans ces conditions, et eu égard aux conditions de séjour en France de l'intéressé, la décision de refus de séjour ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas les dispositions et stipulations précitées. Elle n'est pas, non plus, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
8. Pour les motifs exposés au point 6, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. C....
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
9. M. C... réitère en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens selon lesquels la décision de ne pas lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
11. Pour les motifs retenus à bon droit par les premiers juges, et qu'il y a lieu d'adopter, le moyen selon lequel la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme E... D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.
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N° 20LY02163