Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 4 juin 2021, Mme A... B... épouse C..., représentée par Me Barioz, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2020 ;
2°) d'annuler ces décisions du 6 juillet 2020 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2021, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
Par décision du 13 avril 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de Mme B... épouse C....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante russe née en 1991, est entrée en France le 25 janvier 2019. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de sa vie privée et familiale. Par décisions du 6 juillet 2020, le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire et a fixé le pays de destination. Mme B... épouse C... relève appel du jugement du 31 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;(...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la requérante s'est mariée le 20 avril 2019 avec un ressortissant arménien qui vit en France depuis 2004 et est titulaire de titres de séjour régulièrement renouvelés, et qu'ils ont eu un enfant né en février 2020. Toutefois, Mme C... n'était entrée en France que depuis un an et demi à la date du refus de titre de séjour en litige et sa relation avec son mari était très récente. Dans ces conditions, et compte tenu de la possibilité pour l'intéressée de solliciter le bénéfice du regroupement familial, la décision de refus de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En second lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme B... épouse C... aurait sollicité une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, elle ne peut utilement soutenir que le refus de séjour a été pris en méconnaissance de ces dispositions.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte en premier lieu de ce qui précède que Mme B... épouse C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
6. En deuxième lieu, pour les motifs exposés au point 3, le moyen selon lequel la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Mme B... fait valoir que la décision l'obligeant à quitter le territoire aura pour effet de séparer son enfant en bas âge d'un de ses parents. Toutefois, compte tenu d'une part de la possibilité pour elle de solliciter le bénéfice du regroupement familial, d'autre part de ce qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans un autre pays, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations citées au point précédent.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... épouse C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.
Le rapporteur,
Thierry Besse
La présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01835