Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 6 mars 2017, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2016 ;
2°) d'annuler cet arrêté du maire de Tignieu-Jameyzieu du 12 décembre 2013 ;
3°) d'enjoindre au maire de lui délivrer un permis de construire dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'instruire à nouveau sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Tignieu-Jameyzieu la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le maire ne pouvait opposer le classement du terrain d'assiette de son projet en zone Ni du plan local d'urbanisme (PLU), dès lors que ce classement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, le terrain n'étant pas inondable et ne présentant pas les caractéristiques d'une zone naturelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 avril 2018, la commune de Tignieu-Jameyzieu, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le moyen soulevé n'est pas fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 12 juillet 2018 par une ordonnance du 12 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 12 décembre 2013, le maire de Tignieu-Jameyzieu a refusé de délivrer à M. E... un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation sur un terrain situé chemin du Prieuré, au motif que ce terrain est classée en zone Ni par le plan local d'urbanisme (PLU) approuvé en 2009. L'intéressé relève appel du jugement du 31 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus.
2. D'une part, aux termes de l'article R. 123-8 alors en vigueur du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. ". D'autre part, selon le règlement de la zone N du PLU de Tignieu-Jameyzieu : " La zone N recouvre les espaces à protéger pour sauvegarder la qualité des sites, des paysages et des milieux naturels, en fonction notamment de leur intérêt esthétique, historique et écologique. (...) La zone N comprend les secteurs suivants : (...) Ni : zone inondable où la construction est interdite (...) ".
3. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construire. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation du PLU, que les auteurs du plan ont entendu, d'une part, limiter l'étalement urbain en privilégiant l'urbanisation du centre-bourg et, d'autre part, confirmer le classement en zone inconstructible des parcelles non construites situées à proximité de la rivière Bourbre. M. E..., qui ne peut utilement se prévaloir du classement retenu pour d'autres parcelles, soutient que sa parcelle AN 993 n'a jamais été inondée, contrairement aux parcelles voisines, et fait valoir que le commissaire enquêteur s'est montré favorable à son classement en zone constructible, en relevant l'existence d'un remblai au-delà duquel "le terrain serait moins inondable". Il ressort toutefois des pièces du dossier que les terrains situés entre la Bourbre et le chemin du Prieuré sont identifiés comme soumis à un risque d'inondation dans les documents graphiques du schéma de cohérence territoriale de la Boucle du Rhône en Dauphiné approuvé le 13 décembre 2007 et que, compte tenu de leur proximité avec la rivière Bourbre, qui connaît des crues fréquentes, ainsi que de la topographie des lieux, un risque d'inondation de la parcelle du requérant ne peut être exclu. Par ailleurs, il ressort du rapport du commissaire enquêteur établi le 10 mai 1995 dans le cadre de la modification du plan d'occupation des sols, que le classement de cette parcelle en zone inconstructible permettait de mettre en conformité le plan avec les zones inondables constatées lors des crues de 1993. Enfin, la parcelle en litige, d'une superficie de 1 000 m² et non bâtie, est située en dehors de l'enveloppe urbaine de Tignieu, dont elle est séparée au nord par une parcelle non construite, également classée en zone Ni, et à l'est par une route, et dans le prolongement d'une vaste zone naturelle longeant la rivière Bourbre. Dans ces conditions, et alors même que deux maisons, éloignées du village, se sont implantées au sud du terrain d'assiette du projet, le classement de celui-ci en zone naturelle inondable, qui répond aux objectifs du PLU visant à limiter l'étalement urbain et à éviter l'urbanisation du secteur, n'apparaît entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. Par suite, M. E... n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le refus de permis de construire du 12 décembre 2013, de l'illégalité de ce classement.
5. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte :
6. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de la requête tendant à l'annulation du refus de permis de construire en litige, n'appelle pas de mesure d'exécution. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'une telle mesure soit prescrite sous astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. E... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Tignieu-Jameyzieu, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Tignieu-Jameyzieu.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : M. E... versera à la commune de Tignieu-Jameyzieu la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... et à la commune de Tignieu-Jameyzieu.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 décembre 2018.
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N° 17LY00959
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