Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 4 avril 2018, Mme C... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 mars 2018 ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 19 décembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai de quinze jours ou, à titre subsidiaire et dans le délai de huit jours, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Elle soutient que :
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne procèdent pas d'un examen complet de sa situation et sont intervenues en violation du secret médical et de son droit d'être entendue ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif et alors que sa fille Jonida ne peut voyager sans risque, les décisions en litige méconnaissent les dispositions combinées de l'article L. 311-12 et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions critiquées violent les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, portent une atteinte disproportionnée au droit des membres de sa famille au respect de leur vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi procède d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 avril 2018.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 octobre 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
La clôture de l'instruction a été fixée au 5 novembre 2018 par une ordonnance du 17 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., ressortissante albanaise née en 1982, est entrée en 2013 en compagnie de son époux et de leurs deux filles mineures en France, où sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 juin 2015. Par arrêté du 19 décembre 2016, le préfet du Rhône a rejeté la demande de titre de séjour formée par Mme A... à raison de l'état de santé de sa fille Jonida et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Mme A... relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 décembre 2016 :
2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle (...). ".
3. Pour refuser de délivrer à Mme A... un titre de séjour à raison de l'état de santé de sa fille Jonida, le préfet du Rhône, qui n'a pas fait sien l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 29 juin 2016, s'est fondé, comme il pouvait légalement le faire sans pour autant méconnaître les exigences du secret médical, sur la circonstance que cet état de santé pouvait faire l'objet d'un suivi approprié en Albanie. Si Mme A... explicite devant la cour la pathologie de sa fille, qui est suivie pour un diabète de type 1 insulino-dépendant diagnostiqué en 2013, le préfet du Rhône fait pour sa part état d'éléments relatifs à l'offre médicale et hospitalière en Albanie, notamment à Tirana, ainsi qu'à la disponibilité dans ce pays des médicaments requis et permettant de considérer que le suivi de l'état de santé de l'enfant Jonida peut être assuré de façon appropriée en Albanie. Dans ces conditions, alors que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués au soutien de ce moyen et que les éléments produits au dossier ne suscitent pas d'interrogation sur la capacité de sa fille à supporter le voyage vers son pays d'origine, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Rhône a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 311-12 et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Au soutien de sa contestation de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 décembre 2016, Mme A... réitère pour le surplus et sans les assortir d'éléments nouveaux ses moyens de première instance tirés du défaut d'examen de sa situation particulière, de la violation de son droit d'être entendue, de la violation des stipulations des articles 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'erreur manifeste d'appréciation par l'autorité préfectorale des conséquences de ses décisions. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Le présent arrêt confirme le rejet des conclusions de Mme A... dirigées contre l'arrêté préfectoral du 19 décembre 2016 et n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.
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N° 18LY01216
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