Procédure initiale devant la cour
Par une requête enregistrée le 30 octobre 2017, M. et Mme C..., représentés par la Selarl MBH Associés, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 septembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à raison de la réduction d'impôt remise en cause au titre de l'impôt sur les revenus de 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance n° 17LY03763 du 9 février 2018, le président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé contre ce jugement.
Procédure devant le Conseil d'État
Par une décision n° 419827 du 18 décembre 2019, le Conseil d'Etat a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire devant la présente cour.
Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'État
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2020, M. et Mme C..., représentés par la Selarl MBH Associés, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 septembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à raison de la réduction d'impôt remise en cause au titre de l'impôt sur les revenus de 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. et Mme C... soutiennent que :
- la décision de rejet de leur réclamation du 23 avril 2015 est entachée d'incompétence ;
- le jugement attaqué a, par des motifs contradictoires, reconnu qu'au moins une centrale photovoltaïque était raccordée au réseau électrique au 31 décembre 2011 tout en refusant le bénéfice de la réduction d'impôt sur le revenu pour 2011 en totalité ;
- la preuve du raccordement au réseau électrique au 31 décembre 2011 des installations de production d'électricité a été rapportée ;
- la restriction découlant de la loi de finance pour 2011 ne peut concerner les investissements pour lesquels le processus a débuté en 2010 ; le tribunal administratif aurait dû interpréter l'article 199 undecies B du code général des impôts conformément au principe d'égalité devant l'impôt et au principe de sécurité juridique.
Par un mémoire enregistré le 6 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à compter du 29 septembre 2010, la réduction d'impôt a été supprimée pour les investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil ;
- les requérants n'apportent aucun élément permettant de déterminer la date exacte d'acquisition des parts dans chacune de ces SEP ;
- seul l'investissement effectué par la SEP PVOLTEUS 52 correspondant à l'acquisition et la mise en service de la centrale photovoltaïque située au Gosier est considéré comme étant réalisé au sens de l'article 199 undecies B du code général des impôts ; ce seul constat n'est pas de nature à établir que l'ensemble de l'opération de défiscalisation doit bénéficier de l'avantage fiscal, ce dernier étant lié à la réalisation de tous les investissements pour lesquels il a été accordé ;
- les autres moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., première conseillère,
- et les conclusions de Mme H..., rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C..., associés des sociétés en participation, PV147, PV148, PV149, PV150, PV151, PV152 et PV153, ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, sur le fondement de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant d'investissements réalisés par ces sociétés en participation consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à d'autres sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique. Par une proposition de rectification du 15 novembre 2012, cette réduction d'impôt a été remise en cause par l'administration fiscale au motif qu'en l'absence de raccordement au réseau électrique géré par la société Electricité de France (EDF) au 31 décembre 2010, les investissements considérés ne pouvaient ouvrir droit à une réduction d'impôt au titre de l'année 2010. M. et Mme C... ont alors demandé à bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011. Après le rejet de deux réclamations préalables portant respectivement sur l'année 2010 et sur l'année 2011, M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à concurrence de la réduction d'impôt sollicitée. Par un jugement du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Par une décision du 18 décembre 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'ordonnance du 9 février 2018 par laquelle le président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé contre ce jugement et lui a renvoyé l'affaire pour qu'elle y soit statué à nouveau.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. M. et Mme C... soutiennent que le jugement attaqué est entaché de contradiction de motifs. Toutefois, en jugeant au point 4 que l'administration avait pu, pour l'ensemble des installations photovoltaïques, à l'exception de la centrale située au Gosier et exploitée par la SARL PVOLTEUS 52, refuser à bon droit le bénéfice de la réduction d'impôt en litige au titre de l'année 2011 au seul motif que les requérants n'établissent pas que ces centrales ont été raccordées avant le 31 décembre de cette année, puis, au point 5, estimer que l'administration avait pu refuser à bon droit le bénéfice de la réduction d'impôt en litige pour la centrale située au Gosier et exploitée par la SARL PVOLTEUS 52 au motif que l'investissement avait été réalisé en 2011 par une société en participation, exclue du dispositif par la loi de finance pour 2011, le tribunal administratif n'a entaché son jugement d'aucune contradiction de motifs, ni d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif.
Sur le droit à la réduction d'impôt de l'article 199 undecies B du code général des impôts :
3. En premier lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au 28 septembre 2010 : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...), dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. ". Aux termes du vingtième alinéa du même article : " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2010 : " I. _ Le seizième alinéa du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : / " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa ne s'applique pas aux investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil. (...) / VI. _ 1. Les I et III s'appliquent à compter du 29 septembre 2010. Toutefois, la réduction ou la déduction d'impôt restent applicables, dans les conditions prévues par les dispositions antérieures à la présente loi : / a) Lorsque le bénéfice de la réduction ou de la déduction d'impôt n'est pas subordonné à l'agrément préalable du ministre chargé du budget prévu aux II de l'article 199 undecies B et II quater de l'article 217 undecies du code général des impôts, d'une part, aux investissements pour l'acquisition desquels le bénéficiaire de la réduction ou de la déduction a accepté un devis et versé un acompte avant le 29 septembre 2010 et, d'autre part, à ceux réalisés par les sociétés et groupements mentionnés aux dix-neuvième et vingt-septième alinéas du I de l'article 199 undecies B et à l'avant-dernière phrase du premier alinéa du I et au II de l'article 217 undecies, lorsque la réduction d'impôt ou la déduction à laquelle ils auraient ouvert droit en application de ces mêmes articles a été obtenue à raison d'acquisitions ou de souscriptions de parts faites avant le 29 septembre 2010 ; (...) ". Aux termes de l'article 98 de cette même loi : " I. _ Le même code est ainsi modifié : / 1° A la première phrase du dix-neuvième alinéa du I de l'article 199 undecies B et à l'avant-dernière phrase du premier alinéa du I de l'article 217 undecies, après la référence : " article 8 ", sont insérés les mots : " , à l'exclusion des sociétés en participation, " ; / 2° A la première phrase du premier alinéa du IV de l'article 199 undecies C, après les mots : " présent code ", sont insérés les mots : " , à l'exclusion des sociétés en participation, ". / II. _ Le présent article est applicable à compter de l'imposition des revenus de l'année 2011 ".
5. Il résulte des dispositions du a du 1 du VI de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 que la réduction d'impôt sur le revenu prévue par le premier alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts demeure acquise, pour un contribuable ayant réalisé, avant le 29 septembre 2010, par acquisition ou souscription de parts d'une société en participation, un investissement dans une installation de production d'électricité située dans les départements et collectivités d'outre-mer et utilisant l'énergie radiative du soleil, dans les conditions prévues par ces dispositions, dans leur version applicable jusqu'au 28 septembre 2010, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 98 de cette même loi qui ont exclu du bénéfice de cette réduction d'impôt, à compter de l'imposition des revenus de l'année 2011, les investissements réalisés par l'intermédiaire de sociétés en participation. Par suite, un contribuable qui a réalisé, par l'intermédiaire d'une société en participation dont les parts ont été souscrites avant le 29 septembre 2010, un investissement dans des installations de production d'électricité situées en Guadeloupe, utilisant l'énergie radiative du soleil, peut utilement invoquer les dispositions du a du 1 du VI de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010.
6. En l'espèce, l'administration qui a refusé à M. et Mme C... le bénéfice de la réduction d'impôt sur le revenu sollicitée au seul motif du défaut de productivité des investissements avant le 31 décembre 2010, ne conteste pas sérieusement que M. et Mme C... ont réalisé les investissements au titre desquels ils demandent la réduction de leur imposition de l'année 2011 par l'intermédiaire de sociétés en participation dont les parts ont été souscrites avant le 29 septembre 2010. M. et Mme C... doivent, par suite, être regardés comme remplissant la condition prévue au a du 1 du VI de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010.
7. En second lieu, aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".
8. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer concerné. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés locales en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite être productives de revenus qu'à compter de cette date.
9. Il résulte de l'instruction que l'administration a procédé à un droit de communication auprès de la société EDF, par lequel il a été demandé à EDF Archipel de produire la liste des demandes de raccordement présentées, du 1er janvier 2009 au jour de l'exercice du droit de communication, par les sociétés PVOLTEUS 01 à 167 ou pour leur compte, et précisant, pour chaque demande reçue, la date de sa recevabilité, la puissance en watt crête de la centrale, la date de réception du certificat du CONSUEL, la date de mise en service de l'installation. Il résulte des éléments transmis en réponse par EDF Archipel que la centrale située au Gosier et exploitée par la SARL PVOLTEUS 52, dans laquelle la SEP PV152, dont M. et Mme C... sont associés, a investi 132 767 euros HT, avait fait l'objet d'une attestation de conformité délivrée par le CONSUEL le 4 octobre 2011 et avait été mise en service le 21 octobre 2011, ce dont il se déduit qu'elle avait fait l'objet d'un raccordement préalable. En revanche, il ressort de ces mêmes éléments que les autres centrales en cause n'étaient pas raccordées au 31 décembre 2011. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à demander le bénéfice, au titre de l'année 2011, de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B à concurrence de l'investissement qu'ils ont réalisé via la SEP PV152 dans la centrale située au Gosier et exploitée par la SARL PVOLTEUS 52.
10. Si les requérants soutiennent enfin que la décision du 23 avril 2015 portant rejet de leur réclamation émane d'une autorité incompétente, les vices qui entachent soit la procédure d'instruction par l'administration de la réclamation du contribuable, soit la décision par laquelle cette réclamation est rejetée, qui sont postérieurs à la mise en recouvrement de l'imposition, sont sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de cette imposition. Le moyen doit, par suite, et en tout état de cause, être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas fait droit à leur demande à concurrence de l'investissement réalisé via la SEP PV152 dans la centrale située au Gosier et exploitée par la SARL PVOLTEUS 52.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C... dans l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : M. et Mme C... sont déchargés de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à raison de l'investissement réalisé par la SEP PV152 via la SARL PVOLTEUS 52, dans la centrale située au Gosier, à proportion des parts qu'ils détiennent dans la SEP PV152.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera 1 500 euros à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.
Article 4 : Le surplus de la requête de M. et Mme C... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et Mme F... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme D... présidente-assesseure,
Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 18 mars 2021.
2
N° 19LY04657