Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 22 mai 2018, Mme H..., représentée par Me A..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 décembre 2017 ;
2°) d'annuler les décisions du directeur du centre hospitalier universitaire de Grenoble du 12 février 2015 et du 6 août 2015 ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble le paiement à son avocat d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient qu'en refusant de la placer en congés de longue maladie, le directeur du centre hospitalier universitaire a commis une erreur d'appréciation et méconnu l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2019, le centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes, représenté par Me C... (I... et associés), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme H... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 16 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 octobre 2019.
Mme F... H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;
- l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 14 mars 1986 ;
- l'arrêté du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale du 1er août 1988 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... G..., première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me J... représentant le centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme H..., agent des services hospitaliers qualifié au sein du centre hospitalier universitaire de Grenoble depuis 1990, a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 4 avril 2013 puis en disponibilité d'office à compter du 4 avril 2014. Par décisions du 12 février 2015 et du 6 août 2015, le directeur du centre hospitalier a refusé de lui accorder un congé de longue maladie, en prolongeant son placement en disponibilité d'office pour les périodes du 9 décembre 2014 au 3 avril 2015 et du 4 avril 2015 au 3 avril 2016. Mme H... relève appel du jugement du 11 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux décisions.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence (...) ". L'article 18 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière prévoit que : " Pour l'application de l'article 41 (3°) de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le ministre chargé de la santé établit par arrêté, après avis du comité médical supérieur, une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre aux critères définis par ces dispositions législatives, peuvent ouvrir droit à congé de longue maladie après avis du comité médical. Toutefois le bénéfice d'un congé de longue maladie demandé pour une affection qui n'est pas inscrite sur la liste prévue à l'alinéa précédent peut être accordé après l'avis du comité médical compétent ". Selon l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 1986 du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie, applicable aux agents de la fonction publique hospitalière en vertu de l'arrêté du 1er août 1988 susvisé : " Un fonctionnaire est mis en congé de longue maladie lorsqu'il est dûment constaté qu'il est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions au cours d'une des affections suivantes lorsqu'elle est devenue invalidante : (...) 9. Rhumatismes chroniques invalidants, inflammatoires ou dégénératifs (...) ". L'article 2 de ce même arrêté prévoit également que : " Les affections suivantes peuvent donner droit à un congé de longue maladie dans les conditions prévues aux articles 29 et 30 des décrets susvisés : (...) - maladies mentales (...) ".
3. Le 3° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 prévoit des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans quand la maladie rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée.
4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des certificats médicaux établis le 16 août 2011, le 22 avril 2013, le 26 février 2014 et le 8 avril 2015 par la rhumatologue qui la suit, que Mme H... souffre, depuis 2008, d'un syndrome polyalgique diffus invalidant, se manifestant par des rachialgies chroniques, des douleurs cervico-dorsales sur un terrain arthrosique, une gonarthrose bilatérale, des tendinopathies, une pathologie de coiffe des rotateurs de l'épaule droite avec tendinopathie et une rupture partielle du supra épineux. Ces pathologies constituent un rhumatisme chronique invalidant dégénératif, au sens des dispositions précitées de l'arrêté du 14 mars 1986, et revêtent dès lors un caractère de gravité confirmée, ainsi qu'il ressort du certificat délivré par ce même spécialiste le 13 janvier 2016, lequel, bien que délivré postérieurement aux décisions en litige, est de nature à établir la situation telle qu'elle existait à la date de leur adoption. Par ailleurs, il ressort de ces différents certificats que l'état de santé de Mme H... nécessite un traitement et des soins prolongés. Par suite, et quel qu'ait pu être le contenu de sa demande d'attribution et des certificats médicaux produits à son appui, Mme H... est fondée à soutenir qu'en lui refusant le bénéfice d'un congé de longue maladie, le directeur du centre hospitalier universitaire de Grenoble a méconnu les dispositions du 3° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme H... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme H..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me A..., avocat de Mme H..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes le versement à ce dernier d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 décembre 2017 et les décisions du directeur du centre hospitalier universitaire de Grenoble du 12 février 2015 et du 6 août 2015 sont annulés.
Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes versera à Me A..., avocat de Mme H... une somme de 2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'État.
Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... H..., à Me A... et au centre hospitalier universitaire de Grenoble Alpes.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020, à laquelle siégeaient :
Mme E... B..., présidente de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme D... G..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
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N° 18LY01837