1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 mai 2018 et la décision du 18 décembre 2015 ;
2°) d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Isère de le réintégrer et de le titulariser, le cas échéant sous astreinte ;
3°) de condamner le SDIS de l'Isère à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts ;
4°) de mettre à la charge du SDIS de l'Isère la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige a été rédigé le 8 décembre 2015 avant la demande de contrevisite et lui a été notifié le 18 décembre ;
- la décision de licenciement n'est pas motivée en méconnaissance de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le SDIS de l'Isère n'a pas saisi la commission administrative paritaire de la seconde prolongation de stage qui est ainsi irrégulière ; en tout état de cause son stage ne pouvait pas être prolongé sans méconnaître les dispositions de l'article 9 du décret n° 2012-521 du 20 avril 2012 ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il doit être indemnisé d'une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2018, le SDIS de l'Isère représenté par Me G... conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros.
Il soutient que les moyens de M. B... doivent être tous écartés.
Par ordonnance du 18 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 3 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- l'arrêté du 6 mai 2000 fixant les conditions d'aptitude médicale des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires et les conditions d'exercice de la médecine professionnelle et préventive au sein des services départementaux d'incendie et de secours ;
- le décret n° 2012-521 du 20 avril 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des sous-officiers de sapeurs-pompiers professionnels ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me C... représentant le SDIS de l'Isère ;
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de sa réussite au concours national des sapeurs-pompiers, M. D... B... a été nommé sapeur-pompier professionnel stagiaire au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Isère le 1er octobre 2013. Il a été affecté à Grenoble en février 2014. Victime d'une luxation du genou gauche le 24 mai 2014, il a été placé en congé maladie du 24 mai 2014 au 8 mars 2015 et sa période de stage a été prolongée pour une année à compter du 1er octobre 2014 par un arrêté du 16 septembre 2014. Par arrêté du 18 décembre 2015, il a été mis fin au stage de M. B... en raison de son inaptitude physique et celui-ci a été rayé des effectifs. M. B... relève appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ainsi que ses conclusions à fin d'indemnisation de son préjudice.
Sur la légalité externe de l'arrêté du 18 décembre 2015 :
2. En premier lieu, la nomination dans un corps en tant que fonctionnaire stagiaire ne confère à son bénéficiaire aucun droit à être titularisé. Ainsi, la décision refusant de le titulariser à l'issue du stage n'a pour effet, ni de refuser à l'intéressé un avantage qui constituerait pour lui un droit ni, dès lors que le stage a été accompli dans la totalité de la durée prévue par la décision de nomination comme stagiaire, de retirer ou d'abroger une décision créatrice de droits. Une telle décision n'est, dès lors, pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979. Il s'ensuit que M. B... ne peut utilement se prévaloir du défaut de motivation de l'arrêté du 18 décembre 2015, lequel, en tout état de cause, comporte l'indication suffisante des éléments de fait et droit qui la fonde.
3. En second lieu, ainsi qu'il a été mentionné au point 1 du présent arrêt, la période de stage de M. B..., qui devait normalement s'achever le 1er octobre 2014, a été prolongée d'une année, en application de l'article 9 du décret n° 2012-521 du 20 avril 2012 susvisé, en raison de l'affection de M. B... l'ayant éloigné du service pendant plusieurs mois. A l'issue de cette année de prolongation, son stage a été implicitement prolongé jusqu'à la décision litigieuse du 18 décembre 2015. Toutefois, cette prolongation n'a conféré à M. B... aucun droit à titularisation. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est d'ailleurs pas même soutenu, que cette décision implicite de prolongation du stage aurait eu pour effet de priver M. B... d'une garantie ou d'une chance sérieuse d'être titularisé. Les circonstances que cette prolongation implicite a conduit à ce que la durée totale de prolongation du stage excède celle d'une seule année prévue par l'article 9 du décret du 20 avril 2012 et qu'elle ait, en tout état de cause, été décidée sans saisine de la commission administrative paritaire est dès lors sans influence sur la légalité de la décision de ne pas le titulariser.
Sur la légalité interne de l'arrêté du 18 décembre 2015 :
4. En premier lieu, en vertu de l'article 1er de l'arrêté du 6 mai 2000 susvisé, le sapeur-pompier professionnel doit, pour participer aux missions et accomplir les fonctions qui lui sont dévolues, remplir les conditions d'aptitude médicale appréciées par un médecin sapeur-pompier habilité. L'habilitation, suivant l'article 2 de ce texte, est subordonnée à l'acquisition d'une formation à la détermination de l'aptitude médicale définie par cet arrêté. L'article 3 dispose que " L'évaluation médicale s'appuie sur un document d'orientation spécifique ou, à défaut, sur l'instruction en vigueur lors de cette évaluation n° 2100/DEF/DCSSA/AST/AME rédigée par la direction centrale du service de santé des armées relative à la détermination de l'aptitude médicale à servir en s'aidant de la cotation des sigles S, I, G, Y, C, O et P. ". L'article 4 prévoit que l'évaluation médicale en s'aidant de la cotation des sigles S, I, G, Y, C, O et P permet la détermination d'un profil médical individuel classé selon cinq types (A, B, C, D, E) et l'article 9 que " Pour être déclaré apte à un premier emploi de sapeur-pompier professionnel ou à un premier contrat de sapeur-pompier volontaire du service civil, le candidat doit remplir les conditions médicales correspondant au minimum à un profil B. ".
5. Il ressort de l'ensemble des examens médicaux pratiqués par les médecins du SDIS de l'Isère auxquels M. B... a été soumis, que ce dernier a été considéré, en mai 2015, comme inapte à une majorité des fonctions dévolues aux sapeurs-pompiers professionnels nécessitant des capacités physiques et, à la suite des examens des 9 juillet, 31 juillet, 23 septembre et 17 décembre 2015, comme inapte à toutes ces fonctions sauf administratives. De sa propre initiative, M. B... a par ailleurs consulté le docteur Gaio, le 26 juin 2015, le professeur Saraglia, le 11 septembre 2015, et le docteur Van der Hulst, le 15 septembre 2015. Si ces derniers ont constaté une amélioration notable de ses capacités motrices ils n'en ont pas moins relevé, en juin " un déficit conséquent " et en septembre une " laxité résiduelle indiscutable " et ne se sont pas prononcés sur ses capacités à exercer les activités physiques propres aux sapeurs-pompiers. M. B... produit également un certificat établi le 7 décembre 2015 par le docteur Roadszycki qui, tout en relevant des déficits tels que l'absence de récupération totale des releveurs du pied gauche, le manque de flexion du genou gauche et la marche sur le talon impossible du pied gauche, a estimé que M. B... était apte à l'ensemble des fonctions des sapeurs-pompiers professionnels. Ce seul certificat, rédigé par un médecin non habilité conformément aux prescriptions de l'arrêté précité du 6 mai 2000, et dans un contexte où l'évolution récente de l'état de santé de M. B... permettait de douter de sa totale stabilisation, n'est pas à lui seul de nature à remettre en cause les constats opérés avec constance par les médecins du SDIS de l'Isère et dont le dernier est intervenu le 17 décembre 2015 après transmission du rapport du docteur Roadszycki.
6. En second lieu, si M. B... soutient que des données relatives à sa santé ont été effacées de la base de donnée du SDIS de l'Isère, ses seules affirmations ne permettent pas d'en établir la réalité, alors au demeurant qu'il n'est pas précisé en quoi cette circonstance aurait faussé l'appréciation portée par l'autorité responsable sur son aptitude à la titularisation. Il ressort de l'avis rendu le 6 novembre 2015 par le comité médical que celui-ci s'est borné à mentionner la possibilité de demander un avis spécialisé, sans solliciter un tel avis contrairement aux affirmations de l'appelant. La seule circonstance, par ailleurs, que la date inscrite au tampon sur l'arrêté litigieux comporte un défaut de lisibilité, source d'ambiguïté, ne permet pas d'en déduire, contrairement aux affirmations de M. B..., que cet arrêté aurait été pris dès le 8 décembre sans tenir compte de l'examen pratiqué le 17 décembre. Ainsi que l'a relevé le tribunal administratif de Grenoble, ledit arrêté comporte en effet le visa de cette contrevisite médicale du 17 décembre 2015, laquelle a été programmée seulement le 10 décembre 2015 à la demande du requérant. Enfin, si M. B... expose que la Commission zonale d'aptitude aux fonctions de sapeur-pompier volontaire a déclaré le 10 juillet 2017 qu'il était apte avec restriction et inapte incendie et opérations diverses, cette circonstance, postérieure à la date de la décision attaquée, est sans influence sur la légalité de la décision litigieuse et confirme, en tout état de cause, la persistance d'inaptitudes de M. B... plus d'un an et demi après celle-ci.
7. Il résulte ainsi des points 4 à 6 du présent arrêt que le moyen tiré de ce que la décision du 18 décembre 2015 est entachée d'une erreur d'appréciation doit être écarté, et de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et, par voie de conséquence, ses conclusions indemnitaires.
Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les conclusions à fin d'annulation de M. B... devant être rejetées, doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge.
9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par le SDIS de l'Isère, au titre des frais non compris dans les dépens que ce dernier a exposés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du SDIS de l'Isère relatives aux frais non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme H... A..., présidente de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme F... I..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
No 18LY025992