Procédure devant la cour
I. Par une requête enregistrée le 8 septembre 2020 sous le n° 20LY02630, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à défaut, "salarié" ou "travailleur temporaire" dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente, à défaut d'établir que la secrétaire générale de la préfecture de l'Allier était absente ou empêchée ;
- le préfet a omis de saisir la commission du titre de séjour ;
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé en fait dans la mesure où il n'indique pas les raisons pour lesquelles les services de la police aux frontières ont émis un avis défavorable ;
- l'analyse documentaire de la police aux frontières est insuffisante pour renverser la présomption posée par l'article 47 du code civil car elle a seulement émis un avis défavorable sans pour autant conclure à une falsification des documents ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation globale de sa situation au regard du caractère réel et sérieux du suivi d'une formation professionnelle qualifiante, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis du département de l'Allier ; il a donc méconnu l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du même code, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi sont illégales en conséquence des illégalités successives.
Un mémoire enregistré le 16 novembre 2020 présenté pour M. C... n'a pas été communiqué.
Par une ordonnance du 17 septembre 2020, la requête a été dispensée d'instruction par application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Par une décision du 23 septembre 2020, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
II. Par une requête enregistrée le 8 septembre 2020 sous le n° 20LY02631, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1901681 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 juillet 2020.
Il soutient que les moyens qu'il soulève dans la requête au fond sont sérieux et l'exécution du jugement attaqué, qui le contraindrait à retourner en Côte d'Ivoire où il serait isolé, risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables.
Par une ordonnance du 17 septembre 2020, la requête a été dispensée d'instruction par application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Par une décision du 23 septembre 2020, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
M. C... ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme E... ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1 Par la requête n° 20LY02630, M. C..., ressortissant ivoirien, relève appel du jugement du 25 juillet 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juillet 2019 du préfet de l'Allier portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi. Par la requête n° 20LY02631, il demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
2. Les requêtes analysées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'une même décision.
Sur la requête n° 20LY02630 :
3. En premier lieu, en vertu d'un arrêté du 6 juin 2019, publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, Mme G... F..., sous-préfet de Monltuçon, signataire de l'arrêté contesté, disposait d'une délégation de signature pour signer au nom de la secrétaire générale de la préfecture de l'Allier en cas d'absence ou d'empêchement de cette dernière. M. C... n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles la secrétaire générale n'aurait pas été à cette date absente ou empêchée.
4. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé ".
5. D'autre part, selon le premier alinéa de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.
6. M. C..., entré irrégulièrement en France le 1er janvier 2017, a déclaré être né le 12 janvier 2001 à Foanga-Kongasso (Côte d'Ivoire). A l'appui de sa demande de mise en place d'une mesure de protection à son égard, présentée en invoquant un statut de mineur isolé qui a justifié qu'il soit confié le 4 janvier 2018 au service de l'aide sociale à l'enfance de l'Allier, il a produit un extrait du registre des actes de l'état civil ivoirien et un certificat de nationalité ivoirienne selon lesquels il serait né le 12 janvier 2001. Il ressort de l'analyse documentaire de la police aux frontières de Clermont-Ferrand sur laquelle s'est fondé le préfet de l'Allier pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le fond d'impression et le texte pré-imprimé du premier document ne sont pas conformes et que le second est un duplicata qui présente des incohérences avec l'acte de naissance mentionné, dont l'analyse a conclu à son irrégularité. En cours d'instance devant le tribunal administratif, M. C... a produit un jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance du tribunal de première instance de Daloa du 3 mai 2017. Ce jugement mentionne qu'il a été rendu à la demande de M. A... C... pour son fils, B... C..., alors que selon un certificat médical du 16 octobre 2012 également produit devant le tribunal administratif, le dénommé Doua C... est décédé depuis le 15 octobre 2012. Dans ces conditions et compte tenu des éléments recueillis par l'administration, bien que le requérant ait également versé au dossier la copie du passeport qui lui a été délivré par la République de Côte d'Ivoire le 17 juillet 2019, dont l'authenticité n'a pas été vérifiée, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Allier, dont l'arrêté est suffisamment motivé sur ce point, a refusé de lui délivrer le titre sollicité au motif qu'il avait présenté à l'appui de sa demande de faux documents d'identité.
7. Eu égard à ce qui vient d'être dit, M. C... n'est fondé à soutenir ni que le préfet de l'Allier a méconnu l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni, en tout état de cause, le 7° de l'article L. 313-11 du même code et ni qu'il était tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ce second fondement.
8. Compte tenu des incertitudes sur la situation de M. C..., qui était sans charge de famille à la date de l'arrêté contesté, et de la durée de son séjour en France, le préfet de l'Allier, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris cet acte. Il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de l'intéressé.
9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions.
Sur la requête n° 20LY02631 :
10. Le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 1901681 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 juillet 2020, la requête n° 20LY02631 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement est devenue sans objet.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution de la requête n° 20LY02631 de M. C....
Article 2 : La requête n° 20LY02630 est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
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Nos 20LY02630, 20LY02631