Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2014, la société GDF Suez Énergie Services qui vient aux droits de la société Elyo, représentée par la SCP Camille Beziz - Cléon -Fabrice Charlemagne, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 5 juin 2014 ;
2°) de rejeter les demandes présentées par le département de la Côte-d'Or et la compagnie Aréas Dommages ;
3°) de mettre à leur charge la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société soutient que :
- la société COFELY (dénomination commerciale de GDF Suez Énergie Services) a signé un contrat de maintenance rédigé par le maître de l'ouvrage, elle ne peut être tenue responsable du contenu du programme de maintenance ;
- aucune faute technique lui incombant ne peut être démontrée ;
- le contrat, contrairement à la norme Afnor X 60-010, ne définit aucun niveau de prestation, elle n'était débitrice que d'une obligation de moyen, non de résultat, et ne peut être tenue responsable de la déficience d'un matériel qui, selon le laboratoire, a été changé en 2002 ; rien ne permet d'affirmer que la fragilité des pièces à l'origine du sinistre était détectable ;
- l'ampleur du sinistre est la conséquence de manquements imputables à la personne publique qui est responsable des modalités de fonctionnement du laboratoire et du respect de la réglementation, d'ailleurs de nouveaux dispositifs ont été installés depuis le sinistre.
Par trois mémoires en défense enregistrés le 15 juin et le 9 juillet 2015 ainsi que le 29 janvier 2016, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le département de la Côte-d'Or et la compagnie Aréas Dommages, représentés par MeA..., demandent à la cour de :
1°) rejeter la requête comme irrecevable ;
2°) subsidiairement confirmer le jugement du 5 juin 2014 ;
3°) juger que les sommes que la société GDF Suez Énergie Services a été condamnée à leur verser porteront intérêts à compter du 2 novembre 2006 et que les intérêts seront capitalisés ;
4°) mettre à la charge de la société GDF Suez Énergie Services la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, somme portée à 5 000 euros dans le dernier état de leurs écritures.
Le département de la Côte-d'Or et la compagnie Aréas Dommages font valoir que :
- la requête est irrecevable en l'absence de production de la décision attaquée ;
- la cause du sinistre, dû à la faiblesse structurelle des vis maintenant le corps de la soupape de sécurité, a été reconnue par toutes les parties et le montant des dommages n'a jamais été contesté ;
- la responsabilité contractuelle de la société Elyo est engagée, cette dernière n'ayant jamais contesté lors des opérations d'expertise que l'entretien de la soupape était une opération de maintenance ; l'analyse de la faiblesse potentielle des vis était réalisable par tout technicien d'Elyo ;
- le laboratoire départemental n'a commis aucune faute, des améliorations ont été apportées postérieurement au sinistre pour diminuer encore les risques.
Par un mémoire enregistré le 4 septembre 2015, la société GDF Suez Énergie Services demande à la cour :
1°) de lui donner acte de ce qu'elle offre d'indemniser les intimés à concurrence d'une somme de 65 000 euros représentant sa participation aux frais directs sur le montant total de 114 414 euros ;
2°) de laisser à la charge d'Aréas Dommages et du département de la Côte-d'Or la somme correspondant à la différence existant entre la somme qui lui incombe et le montant total du préjudice ;
3°) de condamner le département de la Côte-d'Or et la compagnie Aréas Dommages, in solidum, à lui rembourser la somme de 51 214 euros avec intérêts de droit à compter de la date à laquelle l'arrêt interviendra ;
4°) de mettre à leur charge la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'il convient de distinguer les frais directs liés au fait générateur (rupture de la soupape sur la pompe d'acide chlorhydrique), pour lesquels, dans le cadre de l'expertise amiable, elle avait prévu une indemnisation de 65 000 euros auprès du laboratoire départemental, et l'aggravation du sinistre liée à cette défectuosité structurelle qui ne lui est pas imputable et relève de la responsabilité du laboratoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gondouin, rapporteur,
- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que pour assurer la maintenance des installations techniques de son laboratoire d'analyses, le département de la Côte-d'Or a conclu un marché de prestations de services à la fin de l'année 2003 avec la société Elyo qui assurait cette prestation depuis 1994 dans le cadre de précédents engagements ; que cette maintenance portait en particulier sur le système de traitement et de rejet des effluents par acidification et neutralisation ; qu'en mars 2005, du fait de la rupture de deux des quatre gougeons de fixation de la soupape de sécurité située en aval de la pompe à acide chlorhydrique, une fuite d'acide s'est produite dans la pièce où est située l'installation de traitement des effluents ; qu'il s'en est suivi d'importants dommages dans cette pièce mais aussi dans d'autres locaux du sous-sol du laboratoire, plusieurs réactions chimiques ayant provoqué des projections de gouttelettes d'acide ainsi qu'une vaporisation de l'acide chlorhydrique puis des phénomènes de corrosion ; que le cabinet d'expertise de la compagnie Aréas, assureur du département, a évalué le montant des dommages à la somme de 115 214 euros ; que cette somme a été versée au département par la compagnie Aréas sous réserve d'une franchise de 800 euros ; que la compagnie Aréas, subrogée dans les droits du département de la Côte-d'Or et ce département, qui a gardé à sa charge la somme de 800 euros, ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la société Elyo à verser 114 414 euros à la première et 800 euros au second ; que le tribunal administratif a fait droit à leur demande par un jugement du 5 juin 2014 dont la société GDF Suez Énergie Services, qui vient aux droits de la société Elyo, relève appel et qu'elle a produit à l'appui de sa requête ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par sa requête enregistrée le 22 août 2014, la société GDF Suez Énergie Services demandait à la cour d'annuler le jugement du 5 juin 2014 et de rejeter les demandes présentées par le département de la Côte-d'Or et la compagnie Aréas Dommages ; que, dans son mémoire enregistré le 4 septembre 2015, elle demande à la cour de lui donner acte " qu'elle offre d'indemniser les intimés à concurrence d'une somme de 65 000 euros représentant la participation aux frais directs sur le montant total de 114 414 euros relatif à l'ensemble du coût du sinistre " et de juger que les intimés " devront supporter la différence existant entre la somme qui incombe à GDF Suez Énergie Services au titre de sa participation et le montant total du préjudice " ; que ces conclusions doivent s'analyser comme un désistement partiel de la société GDF Suez Énergie Services ; que, dès lors, il y a lieu pour la cour de ne statuer que sur les conclusions dirigées contre le jugement en tant qu'il a condamné la société Elyo à verser une somme excédant 65 000 euros ;
Sur la responsabilité :
3. Considérant, ainsi que l'a relevé le tribunal administratif et comme le reconnaît également la société GDF Suez Énergie Services dans ses dernières écritures, que les dommages en litige sont directement liés à la fuite d'acide chlorhydrique provoquée par la rupture de deux des quatre gougeons de fixation de la soupape de sécurité située en aval de la pompe ; que si la société requérante soutient que l'aggravation du sinistre survenu dans la nuit du 10 mars 2005 est due à une " défaillance structurelle " du système, il n'est nullement établi que l'installation en question n'était pas conforme aux normes de sécurité alors en vigueur ; qu'en outre il ne résulte pas de l'instruction que le dispositif de traitement des effluents du laboratoire d'analyses était dépourvu de dispositif d'alerte ni que l'installation de bacs de rétention et d'un système de ventilation auraient pu empêcher la survenue du dommage liée à un phénomène de vaporisation de l'acide ; que la circonstance que le laboratoire d'analyses a apporté des améliorations à son système de sécurité depuis la survenue de ce sinistre n'est pas de nature à établir que le département de la Côte-d'Or a commis une faute ou eu un comportement qui a pu aggraver les conséquences du dommage ; que la cause du sinistre étant imputable uniquement à la mauvaise exécution par la société Elyo de ses prestations contractuelles, la société GDF Suez Énergie Services n'est pas fondée à demander à la cour de laisser à la charge d'Aréas Dommages et du département de la Côte-d'Or la somme correspondant à la différence existant entre la somme qui lui incombe et le montant total du préjudice ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GDF Suez Énergie Services n'est, dès lors, pas fondée à demander l'annulation du jugement ;
Sur les intérêts et la capitalisation de ceux-ci :
5. Considérant, d'une part, que, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que, par suite, la compagnie Aréas Dommages et le département de la Côte-d'Or ont droit aux intérêts au taux légal afférent aux sommes de 114 414 euros pour la première et de 800 euros pour le second à compter de la date d'enregistrement de leur demande devant le tribunal administratif, le 14 juin 2013, en l'espèce seule date certaine de réception de leur demande par la débitrice et non, contrairement à ce qu'ils soutiennent, à compter du 2 novembre 2006 date à laquelle le cabinet TEXA a déposé son rapport chiffrant le montant des dommages ;
6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière " ; que ces dispositions sont applicables dans le cas où le débiteur, s'étant acquitté de sa dette en principal, a interrompu le cours des intérêts mais ne les a pas payés, sous réserve que ces intérêts portent sur une période qui a duré au moins une année entière ; qu'il résulte de l'instruction que la société GDF Suez Énergie Services a réglé les sommes dues à la fin de l'année 2014 ; que la capitalisation a été demandée pour la première fois en appel le 15 juin 2015, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande de capitalisation à compter de cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Côte-d'Or et de la compagnie Aréas Dommages qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, quelle que somme que ce soit ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société GDF Suez Énergie Services la somme globale de 1 500 euros à verser au département de la Côte-d'Or et à la compagnie Aréas Dommages ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions de la société GDF Suez Énergie Services dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a condamné la société Elyo à verser une somme à hauteur de 65 000 euros.
Article 2 : La requête de la société GDF Suez Énergie Services est rejetée pour le surplus.
Article 3 : Les sommes de 114 414 euros et de 800 euros que le jugement attaqué a condamné la société GDF Suez Énergie Services à verser respectivement à la compagnie Aréas Dommages et au département de la Côte-d'Or porteront intérêt à compter du 14 juin 2013. Les intérêts dus par la société GDF Suez Énergie Services sur ces sommes seront capitalisés à la date du 15 juin 2015 ainsi, éventuellement, qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : La société GDF Suez Énergie Services versera la somme totale de 1 500 euros à la compagnie Aréas Dommages et au département de la Côte-d'Or en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société GDF Suez Énergie Services, au département de la Côte-d'Or et à la compagnie Aréas Dommages.
Délibéré après l'audience du 4 février 2016 où siégeaient :
- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,
- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
- Mme Gondouin, rapporteur.
Lu en audience publique, le 25 février 2016.
Le rapporteur,
G. GondouinLe président,
G. Verley-Cheynel
La greffière,
M-T. Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 14LY02688