Par requête enregistrée le 15 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Petit, demandent à la cour :
1°) le cas échéant après avoir enjoint au préfet du Rhône de verser les extraits de l'application Thémis se rapportant à la procédure concernant leur fille, d'annuler ce jugement du 30 juillet 2021 et les arrêtés du 18 mars 2021 susvisés ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à titre subsidiaire, de leur délivrer dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour les autorisant à travailler jusqu'au réexamen de leur situation ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- les décisions portant refus de séjour sont entachées d'un vice de procédure en méconnaissance des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faute de délibération collégiale des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et en l'absence de garantie quant à l'identité des signataires de l'avis ;
- elles sont entachées d'un défaut d'examen particulier de leur situation individuelle ;
- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation médicale de leur enfant ;
- elle méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont illégales en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour ;
- elle méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions fixant le pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;
- et les observations de Me Simonin pour M. et Mme B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... née E... et M. B..., ressortissants albanais nés respectivement les 25 janvier 1995 et 31 décembre 1979, sont entrés en France en juin 2017 pour y solliciter l'asile. Leurs demandes ont été définitivement rejetées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 21 février 2018. M. et Mme B... ont alors sollicité, le 5 décembre 2018, leur admission au séjour en raison de l'état de santé de leur fille mineure et ont bénéficié de la délivrance de deux autorisations provisoires de séjour successives de trois mois chacune. Par des arrêtés du 18 mars 2021, le préfet du Rhône a refusé de renouveler leurs autorisations provisoires de séjour, a assorti ces refus d'obligations de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. M. et Mme B... relèvent appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur la légalité du refus de séjour :
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis émis le 20 janvier 2020 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) concernant la jeune A..., fille des requérants, née le 27 juillet 2015, indique que si l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale, un éventuel défaut de soins ne devrait pas être de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Cet avis est signé par les trois médecins composant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et porte la mention : " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ". Aucun élément figurant au dossier n'est de nature à remettre en cause le caractère collégial de cette délibération, alors notamment que la délibération du collège de médecins peut prendre la forme d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. Si les signatures des trois médecins composant le collège de l'OFII sont des fac-similés, aucun élément du dossier ne permet de douter que les signataires, dont l'identité est précisée, n'auraient pas siégé au sein du collège de médecins de l'OFII et que ces signatures ne seraient pas authentiques comme l'allèguent les requérants. Par suite, et sans qu'il soit besoin de solliciter la communication des extraits du logiciel de traitement informatique Themis, les moyens tirés de la méconnaissance de la garantie liée au caractère collégial de la délibération du collège de médecins de l'OFII et à l'identité des signataires de cet avis doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la seule circonstance que le préfet du Rhône n'ait pas fait état dans ses décisions de l'intégration sociale des requérants et professionnelle de M. B... ne caractérise pas un défaut d'examen de leur situation. Le préfet a, dans les décisions en litige, fait état des éléments afférents à la situation personnelle des requérants. Il s'en suit que le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle des intéressés doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites ".
5. Il ressort des pièces versées au dossier que l'enfant A..., atteinte d'un lipoméningiocèle, a bénéficié d'une intervention chirurgicale en octobre 2018. Les derniers éléments médicaux produits par les appelants, en l'occurrence deux certificats médicaux datés des 13 et 15 avril 2021, soit quelques semaines après l'édiction des décisions en litige, mais révélant l'état de santé de leur enfant à la date des décisions attaquées, font état uniquement de la nécessité d'une prise en charge médicale de l'enfant et d'un suivi régulier. Ainsi, le certificat rédigé par le pédiatre urologue qui suit l'enfant mentionne la nécessité d'une surveillance régulière sur le plan uro-néphrologique avec consultation tous les six à neuf mois avec échographie rénale de contrôle et bilan uro-dynamique. Il n'est pas établi par les pièces versées que ce suivi et cette surveillance seraient impossibles voire même rendus difficiles en Albanie, pays d'origine des membres de la famille. En outre, si le certificat du neurochirurgien pédiatre, daté du 13 avril 2021, indique que l'interruption du suivi de l'enfant pourrait avoir des conséquences graves, il n'est pas de nature, à lui seul, à remettre en cause l'analyse du collège de médecins de l'OFII s'agissant de l'absence de conséquence d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de l'état de santé de la fille des requérants doivent être écartés.
6. En quatrième lieu, M. et Mme B... réitèrent en appel les moyens tirés de la méconnaissance par les refus d'autorisations de séjour qui leur ont été opposées des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste commise par le préfet du Rhône dans l'appréciation de leur situation. Il y a lieu pour la cour d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge au point 14 de son jugement.
Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français :
7. Compte tenu de la légalité des décisions portant refus de séjour opposées à M. et Mme B..., ceux-ci ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'encontre de celles portant obligation de quitter le territoire français.
8. Pour les mêmes motifs que ceux visés au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance par les mesures d'éloignement édictées des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du 1° de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9 En raison de l'absence d'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la fixation du pays de destination est dépourvue de base légale doit être écarté.
10. M. et Mme B... réitèrent devant la cour leurs moyens dirigés contre les décisions susvisées tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Il y a lieu pour la cour d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux points 18 à 20 de son jugement.
11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Les conclusions qu'ils présentent aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... née E..., à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
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N° 21LY03677