Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2020, Mme A..., épouse F..., représentée par la SELARL BS2A B... et Sabatier Avocats associés, agissant par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 28 octobre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du préfet du Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence algérien de dix ans ou, à tout le moins, d'une année portant la mention " commerçant " dans un délai de deux mois courant à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a statué ultra petita en soulevant d'office, sans respect du principe du contradictoire, des moyens qui n'étaient pas d'ordre public alors que le préfet n'avait présenté aucune défense ;
- la décision méconnaît le d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors que son époux est titulaire d'un certificat de résidence de dix ans et qu'elle a été autorisée à le rejoindre dans le cadre du regroupement familial ; elle a bénéficié d'un visa de long séjour délivré à ce titre ; il ressort de sa demande qu'elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour de dix ans sur le fondement des stipulations précitées ; c'est à tort que le tribunal administratif n'a pas tenu compte de sa demande de titre ;
- la décision méconnaît l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'elle a complété sa demande initiale par une demande additionnelle tendant à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 5 de l'accord précité ; les stipulations de l'article 5 se bornent à exiger une inscription au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel sans exiger la preuve de l'effectivité de l'activité indépendante déclarée ; il ne peut lui être reproché d'avoir effectivement déposé sa demande lors du rendez-vous en préfecture fixé au 21 janvier 2019, soit six mois après avoir sollicité un rendez-vous.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... ;
- et les observations de Me G..., substituant Me B..., représentant Mme A... épouse F....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... A..., épouse F..., ressortissante algérienne née le 19 janvier 1990, a épousé le 27 septembre 2016 un compatriote, M. F..., titulaire d'un certificat de résidence de dix ans. A la suite de la demande de M. F..., le préfet du Rhône a autorisé, le 31 janvier 2018, le regroupement familial au bénéfice de son épouse qui est entrée en France le 19 juin 2018 sous couvert d'un visa de long séjour au titre du regroupement familial portant la mention " carte de séjour à solliciter dans le délai de deux mois suivant l'arrivée ". Elle indique avoir sollicité dès le 16 juillet 2018 un rendez-vous auprès des services de la préfecture du Rhône, qui a été fixé au 21 janvier 2019, pour déposer sa demande de titre de séjour. Par un courrier du 11 janvier 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour d'une durée de dix ans sur le fondement des stipulations des articles 4 et du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un courrier du 19 septembre 2019, elle a également sollicité la délivrance d'un titre de séjour d'un an portant la mention " commerçant ". A défaut de réponse dans le délai de quatre mois, deux décisions implicites de rejet sont nées. Mme F... relève appel du jugement du 28 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions implicites de refus de délivrance d'un titre de séjour.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des écritures de première instance que la requérante soutenait que les décisions implicites attaquées méconnaissaient les stipulations de l'articles 4 et du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et les stipulations de l'article 5 de ce même accord.
3. En écartant, d'une part, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 4 et 7 bis d) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 au motif que Mme F... n'avait pas sollicité la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans mais la délivrance d'un certificat de résidence d'un an au vu des mentions du récépissé qui lui avait été délivré et, d'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 5 de ce même accord au motif que l'intéressée ne produisait aucune pièce relative à l'effectivité de son activité à la date de la décision critiquée et qu'en tout état de cause, à la date de sa demande subsidiaire, son visa était expiré de même que le délai de deux mois dont elle disposait, en vertu de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour solliciter un titre de séjour, les premiers juges n'ont pas soulevé d'office des moyens sans avoir respecté les prescriptions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, mais se sont bornés à examiner, comme il le devait, si les conditions posées par ces stipulations étaient remplies. Ils ont pu à cet égard, pour répondre aux moyens dont ils étaient saisis, retenir à bon droit et sans excéder leur office que la requérante, qui demandait le bénéfice des stipulations du d) de l'article 7 bis et de l'article 5 de l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968, n'établissait cependant pas satisfaire à l'une des conditions fixées par ces stipulations, peu important que le préfet du Rhône n'ait pas produit de mémoire en défense. La requérante n'est donc pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient ce faisant entaché leur jugement d'irrégularité.
Sur la légalité des refus de délivrance d'un titre de séjour :
4. Aux termes des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente (....) ". Aux termes de l'article 7 bis du même accord : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. / Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. / Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées. / Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / (...) d) Aux membres de la famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial ; / (...) ". Enfin, aux termes du titre II du protocole annexé au même accord : " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien (...) ".
5. Le regroupement familial, lorsqu'il est autorisé au profit du conjoint d'un ressortissant algérien résidant en France, a pour objet de rendre possible la vie commune des époux, ainsi qu'il résulte notamment des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien. Par suite, le préfet peut rejeter la demande de certificat de résidence lorsque le demandeur est séparé de son conjoint depuis une date antérieure à la décision relative à la demande de certificat de résidence présentée par l'intéressé.
6. Mme A..., épouse F... est entrée en France le 19 juin 2018 sous couvert d'un visa de long séjour au titre du regroupement familial. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a indiqué, le 15 juillet 2019, héberger Mme A... épouse F... à Villeurbanne, cette adresse figurant par ailleurs sur le contrat de travail à durée indéterminée signé entre l'intéressée et son employeur et sur ses bulletins de paie jusqu'au mois de novembre 2019 et ce alors que son époux est domicilié à la Mulatière. Mme A... épouse F... n'explique pas plus en première instance qu'en appel les raisons pour lesquelles elle réside à une adresse différente de celle de son époux. Il s'ensuit qu'elle n'établit pas qu'à la date de la décision contestée elle n'était pas séparée de son conjoint. Par suite, le préfet du Rhône pouvait, pour ce seul motif, refuser de faire droit à la demande présentée par l'intéressée.
7. Aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens s'établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification, selon le cas, qu'ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 9 du même accord : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5,7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) (a à d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... épouse F... a sollicité, postérieurement au courrier du 11 janvier 2019 par lequel elle a demandé la délivrance d'un titre de séjour d'une durée de dix ans sur le fondement des stipulations des articles 4 et du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, par un courrier du 19 septembre 2019, la délivrance d'un titre de séjour d'un an portant la mention " commerçant ". A la date de cette demande, et sans qu'elle puisse utilement se prévaloir de ce qu'elle n'a bénéficié d'un rendez-vous auprès des services de la préfecture que le 21 janvier 2019, Mme F... ne disposait plus d'un passeport muni d'un visa de long séjour en cours de validité, celui-ci ayant expiré le 8 septembre 2018. Le préfet du Rhône pouvait pour ce seul motif refuser de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " commerçant ".
9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... épouse F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... épouse F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2021, à laquelle siégeaient :
M. Gayrard, président de la formation de jugement,
Mme C..., première conseillère,
M. Pin, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.
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N° 20LY03706