Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 8 juin 2020, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour d'annuler le jugement n° 1801386 du 7 avril 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et de rejeter la demande de la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision attaquée sur le moyen tiré du défaut du respect du contradictoire ;
- les autres moyens soulevés par la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières sont infondés.
Par un mémoire enregistré le 9 septembre 2020, la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières, représentée par Me Cormier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Elle fait valoir que :
- le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand est fondé ;
- la décision attaquée est entachée d'autres irrégularités tenant à l'absence de communication du procès-verbal de constat des manquements, au bref délai accordé pour répondre à la lettre de pré-injonction du 29 mars 2018, divers vices de procédure, l'absence de co-signature des deux inspecteurs en charge du contrôle, l'erreur de droit pour application erronée de l'article L. 111-3-4 du code de la santé publique.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la consommation ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gayrard, président assesseur,
- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Suite à un contrôle exercé les 13 et 14 mars 2018 par les services de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations du Cantal au sein des locaux du centre médico-chirurgical de Tronquières, exploité par la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières, cette dernière s'est vue adresser une lettre du 29 mars 2018 de deux inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes relevant deux manquements tenant, d'une part, à la facturation d'une prestation intitulée " forfait parcours patient " et, d'autre part, l'information erronée d'une prestation de " chambre particulière Solo confort plus MC " alors indisponible. Par lettre du 25 avril 2018, la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières a adressé des observations et sollicité une rencontre. Par lettre du 21 juin 2018, l'inspectrice de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a enjoint à cette société de cesser toute facturation de la prestation " forfait parcours patient " dans les dix jours suivant notification. Par jugement du 7 avril 2020, dont le ministre de l'économie et des finances relève appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 521-1 du code de la consommation : " Lorsque les agents habilités constatent un manquement ou une infraction avec les pouvoirs prévus au présent livre, ils peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre à un professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable qu'ils fixent, de se conformer à ses obligations ". Aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique. ". Il résulte de ces dispositions qu'une injonction à un professionnel fondée sur l'article L. 521-1 du code de la consommation ne peut être prononcée sans que ce dernier ait été mis en mesure de présenter ses observations écrites ou orales et, notamment, sans qu'il ait été fait droit à la demande d'audition qu'il aurait formée en vue de présenter des observations orales, alors même qu'il aurait également présenté des observations écrites.
3. D'autre part, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. Il n'est nullement contesté qu'ainsi qu'il a déjà été indiqué au point 1, suite à la notification d'une lettre du 29 mars 2018 faisant part de l'intention des inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de faire usage de l'injonction prévue à l'article L. 521-1 du code de la consommation et invitant l'intéressée à présenter des observations écrites ou orales, la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières a adressé, par lettre du 25 avril 2018, ses observations écrites mais également sollicité une rencontre afin d'exposer sa position. Contrairement à ce que soutient le ministre, la faculté de présenter des observations orales constitue une garantie pour la personne visée par l'injonction. Par suite, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la décision attaquée était entachée d'une illégalité tenant au non-respect de la procédure contradictoire. Il s'ensuit que le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision du 8 juin 2018 de l'inspectrice de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes prise en application de l'article L. 521-1 du code de la consommation.
Sur les frais liés au litige :
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'économie et des finances est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société de gestion et d'exploitation du centre médico-chirurgical de Tronquières.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
N° 20LY01567 2