- a mis les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 650 euros à la charge de l'ONIAM ;
- a mis à la charge de l'ONIAM une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 18 mars 2015, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Saône-et-Loire, représentée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or, par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 janvier 2015 en tant qu'il rejette ses propres conclusions ;
2°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 415 302,06 euros au titre des prestations servies à Mme H...F..., outre intérêts de droit à compter de la première demande ;
3°) de condamner les Hospices civils de Lyon au paiement de l'indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 1 037 euros ;
4°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient :
- que faute pour les Hospices civils de Lyon de rapporter la preuve d'une cause étrangère s'agissant de l'infection nosocomiale contractée par MmeF..., ceux-ci doivent être condamnés à prendre en charge ses débours, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'ONIAM a été condamné à indemniser MmeF... des préjudices qu'elle a subis ;
- qu'en tout état de cause, les Hospices civils de Lyon ont commis un manquement caractérisé à l'origine de l'infection nosocomiale.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2016, l'ONIAM s'en rapporte à la sagesse de la cour et demande, au cas où la cour retient la responsabilité pour faute des Hospices civils de Lyon, que ceux-ci soient condamnés à le garantir des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du 20 janvier 2015.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 avril 2016, les Hospices civils de Lyon, représentés par MeG..., concluent au rejet de la requête.
Ils font valoir :
- que le régime issu du I de l'article L. 1142-1 et celui issu du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique sont exclusifs l'un de l'autre, de sorte que, la charge de l'indemnisation du préjudice subi par Mme F...reposant sur l'ONIAM, la CPAM de Saône-et-Loire ne peut obtenir le remboursement de ses débours auprès de l'établissement hospitalier, sauf manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ;
- qu'en l'occurrence, aucun manquement de la sorte ne saurait lui être reproché.
Par une ordonnance du 20 juin 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 18 juillet 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.
1. Considérant qu'il est constant que Mme F...a souffert d'une cirrhose hépatique pour laquelle elle a été prise en charge à compter de février 2006 par le service de gastro-entérologie de l'Hôtel-Dieu du Creusot ; qu'elle a été transférée le 10 mars 2006 à l'hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon, où elle est restée en soins jusqu'au 27 octobre 2006, puis à nouveau du 7 novembre au 7 décembre 2006 ; que son état a pu être stabilisé sur le plan hépatique et viscéral, ce qui a permis d'envisager une greffe hépatique ; que, toutefois, le 3 mai 2006 a été constaté la présence d'une escarre au talon gauche, qui a évolué défavorablement en ostéite ; qu'une biopsie osseuse a été réalisée le 6 décembre 2006, révélant la présence d'un staphylocoque doré ; que cet état infectieux contre-indiquait la réalisation d'une greffe ; qu'il a alors été proposé à MmeF... d'amputer la partie infectée de son membre inférieur gauche, ce qu'elle a accepté le 31 janvier 2007 ; que l'amputation réalisée le 1er mars 2007 a permis d'éliminer le foyer infectieux et, par suite, de faire bénéficier la patiente d'une transplantation hépatique le 6 juillet 2007 ; que par un jugement du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Lyon a condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à indemniser Mme F...des préjudices consécutifs à cette infection nosocomiale ; que par la présente requête, la CPAM de Saône-et-Loire relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la couverture de ses débours ;
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. " ; que, toutefois, aux termes de l'article L. 1142-1-1 issu de la loi du 30 décembre 2002 : " Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : / 1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d' atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) " ; que la réparation au titre de la solidarité nationale prévue par ces dernières dispositions incombe à l'ONIAM en vertu de l'article L. 1142-22 ; que les dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17 et du deuxième alinéa de l'article L. 1142-21 prévoient que lorsque l'ONIAM a assuré cette réparation en indemnisant la victime ou ses ayants-droit, il ne peut exercer une action en vue d'en reporter la charge sur l'établissement où l'infection s'est produite qu'en cas " de faute établie à l'origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17 et du deuxième alinéa de l'article L. 1142-21 du code de la santé publique que le législateur, dérogeant dans cette hypothèse aux dispositions du second alinéa du I de l'article L. 1142-1, qui prévoit un régime de responsabilité de plein droit des établissements de santé en cas d'infection nosocomiale, a entendu que la responsabilité de l'établissement où a été contractée une infection nosocomiale dont les conséquences présentent le caractère de gravité défini à l'article L. 1142-1-1 ne puisse être recherchée qu'en cas de faute établie à l'origine du dommage, notamment un manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ; qu'il suit de là que, lorsque le degré de gravité des dommages résultant de l'infection nosocomiale excède le seuil prévu à l'article L. 1142-1-1, et que l'ONIAM se trouve en situation de devoir assurer la réparation des préjudices constatés, c'est seulement au titre d'une faute de l'établissement de santé où l'infection a été contractée qu'une caisse de sécurité sociale ayant versé des prestations à la victime peut exercer une action subrogatoire contre ledit établissement ;
4. Considérant que l'amputation subie par Mme F...en raison de l'infection nosocomiale contractée à l'hôpital de la Croix-Rousse a entraîné pour elle une incapacité permanente excédant le seuil de 25 % prévu à l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique ; que la CPAM de Saône-et-Loire ne peut dès lors rechercher la responsabilité de l'hôpital qu'au titre d'une faute établie ; qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise des Dr. Roux et Rousset et de celle du Pr. Stahl, que l'infection nosocomiale à l'origine de l'amputation subie par MmeF... ne trouve pas son origine dans un manquement caractérisé de l'hôpital de la Croix-Rousse aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ; que les experts ont au contraire noté que, compte tenu de l'état de santé fragile de la patiente, et en présence des facteurs de risque qu'elle présentait, tels que son traitement par Glypressine et de la durée de son alitement, la survenue d'une infection nosocomiale était en l'espèce prévisible ; qu'il s'ensuit que, en l'absence de faute commise par l'hôpital de la Croix-Rousse, la responsabilité de cet établissement ne peut être recherchée ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CPAM de Saône-et-Loire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la CPAM de Saône-et-Loire est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire, aux Hospices civils de Lyon et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Beytout, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
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N° 15LY01128