2°) d'allouer à son père et à sa mère, au titre des frais de scolarité engagés, la somme de 27 319,83 euros et au titre des frais de déplacement et frais divers celle de 11 490 euros ;
3°) d'allouer à sa mère PatriciaJ..., tous postes de préjudices confondus la somme de 600 000 euros ;
4°) d'allouer à Pierre et CarlaJ..., représentés par leurs parents M. et Mme J..., représentants légaux, au titre de leur préjudice moral à chacun, la somme de 10 000 euros ;
5°) d'allouer à M. et Mme J...au titre des frais de procédure la somme de 10 000 euros ;
6°) de mettre les dépens et notamment les frais d'expertise à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon ;
Les consorts J...dans le dernier état de leurs écritures devant le tribunal administratif ont évalué leurs préjudices à la somme globale de 3 812 154,83 euros dont 3 153 345 euros pour Marine et ont subsidiairement demandé une expertise comptable sur le coût annuel complet de prise en charge d'un adulte gravement handicapé dans un foyer de vie.
La caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or a demandé la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dijon à lui rembourser au titre des prestations versées, les sommes de 212 781,85 euros, sous réserve de paiement non encore connus à ce jour, et ce avec intérêt de droit à compter du jugement ainsi que 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996.
Par jugement n° 1400026 du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Dijon a condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser aux consorts J...la somme de 252 081,05 euros. Il a également condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or la somme de 176 197,07 euros, outre la somme de 1 028 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, il a également jugé que la somme de 176 197,07 euros portera intérêts à compter du présent jugement et que les frais futurs (2 AMO 13,5 par semaine) jusqu'au 27 mars 2019, pour un montant de 17 887,50 euros, seront pris en charge par le centre hospitalier universitaire de Dijon, sur présentation des justificatifs, au fur et à mesure qu'ils seront exposés. Le tribunal administratif a mis les frais d'expertise à la charge définitive du centre hospitalier universitaire de Dijon et a rejeté le surplus des demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 février 2015 et des mémoires du 13 juillet 2016, 29 septembre 2016, 28 novembre 2016, 21 mars 2018, 10 octobre 2018, 31 octobre 2018 Mme E...J..., représentée par ses parents, M. C...J..., Mme I...J..., Mme A...J..., M. G...J...représenté par ses parents, représentés par la SCP Dorey-Portalis-Pernelle, demandent, dans le dernier état de leurs écritures, à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Dijon du 22 janvier 2015 en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leurs demandes indemnitaires et de confirmer le jugement en tant qu'il leur alloue la somme de 125 000 euros au titre du préjudice d'incapacité permanente partielle subie par Marine et la somme de 27 319,83 euros au titre des frais de scolarité et en tant qu'il met à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon les frais d'expertise ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser :
- à Marine J...une somme de 11 124 479,40 euros au titre de ses préjudices et subsidiairement une somme de 3 135 051,12 euros au titre de ses préjudices sur la base d'une assistance tierce personne temporaire et permanente de 1 527 345 euros ;
- à son père et à sa mère une somme de 11 490 euros au titre des frais de déplacement et frais divers ;
- à sa mère Patricia J...une somme de 600 000 euros tous postes de préjudices confondus ;
- à ses frère et soeur Pierre et Carla représentés par leurs parents une somme de 10 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
3°) subsidiairement d'ordonner une mesure d'expertise comptable pour renseigner la cour sur le coût annuel complet de prise en charge d'un adulte gravement handicapé dans un foyer de vie ;
4°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Dijon à leur verser 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le tribunal administratif de Dijon, par jugement du 20 septembre 2001 a déclaré le centre hospitalier universitaire de Dijon entièrement responsable du préjudice subi par Marine J...atteinte de phénylcétonurie à la suite d'une négligence commise par cet hôpital dans le dépistage des maladies métaboliques et le dosage de la phénylalanine à la naissance de Marine et a condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à prendre à sa charge l'intégralité des conséquences dommageables subies par Marine et ses parents résultant du retard ;
- différentes sommes soit jusqu'à la majorité de Marine soit provisionnelles en attente de consolidation leur ont été accordées ; 18 293,88 euros ont été versés sous forme de provision à la suite du jugement du tribunal administratif du 6 septembre 2001, 10 000 euros ont été versés le 11 octobre 2005 à la suite de l'arrêt de la cour du 19 avril 2005, 50 000 euros ont été versés le 19 mars 2014 sous forme de provisions à la suite de l'ordonnance de référé du 30 janvier 2014 ; une provision amiable correspondant à la quittance n° 2 a été versée le 1er septembre 2010 d'un montant de 18 500 euros pour des frais de transport et d'un montant de 1 500 euros pour les honoraires du Pr Floret ; des expertises ont été menées sur l'état de santé de Marine et les préjudices subis en 2000, en 2003, en 2006, en 2010 et en 2013 par le Pr Floret, mandaté par le tribunal administratif de Dijon ; la consolidation de Marine a été fixée au 3 décembre 2012 :
- il convient d'appliquer la nomenclature Dinthilhac et non pas la nomenclature Lagier ;
- le poste assistance par une tierce personne avant consolidation (3 décembre 2012 correspondant aux 18 ans de Marine) calculée à compter de la prise d'autonomie de l'enfant fixée à 5 ans doit être évalué à 2 635 607,52 euros ; la circonstance que cette assistance soit assurée par un membre de sa famille est sans incidence sur le droit de la victime à être indemnisée ; Marine est restée à l'entière charge de ses parents jusqu'à la date de sa consolidation et sa mère a dû renoncer à sa carrière professionnelle ; le coût d'une assistance par une tierce personne à domicile s'élève à 16 894,92 euros par mois soit 202 739,04 euros par an ; il y a lieu de prendre en compte l'autonomie de l'enfant fixée à 5 ans soit un montant de 202 739,04 euros multiplié par 13 années ;
- le poste assistance par une tierce personne après consolidation doit être évalué à 6 881 165,76 euros ; l'expert a estimé que Marine manque totalement d'autonomie ; le conseil général de Saône-et-Loire a précisé que les coûts moyens annuels d'hébergement sont de 49 167 euros en foyer d'accueil médicalisé, de 43 593 euros en foyer de vie, de 32 563 euros en foyer d'hébergement traditionnel ; une simulation des droits APL a pu être réalisée à hauteur de 170 euros par mois ; un hébergement en maison de retraite coûterait 3 110,23 euros par mois soit 37 322,76 euros ; ils ont fait le choix de continuer tant qu'ils en ont la possibilité de garder Marine à leur domicile et ce au moins jusqu'à la fin de la présente procédure ; une prestation de garde à domicile s'élève à 16 894,92 euros par mois soit 202 739,04 euros par an ; le coût viager d'une telle prise en charge avec un coefficient de 33,941 s'élève à 6 881 165,76 euros; dans le cadre d'un lourd handicap, le juge administratif encourage une évaluation de l'assistance par une tierce personne sur la base d'un maintien à domicile ; si une orientation en ESAT a été proposée, ils ont décidé de maintenir Marine à domicile où elle bénéficie d'un meilleur accompagnement et d'une meilleure simulation; Marine n'a pas de salaire et perçoit l'allocation aux adultes handicapés d'un montant mensuel de 810,09 euros en février 2018 et de 819 euros à compter de mars 2018 du fait d'un taux d'incapacité compris entre 50 et 80 %; elle continue de suivre des cours particuliers avec MmeL... ; sa mère n'a pas repris d'emploi salarié ; elle vit toujours chez ses parents dont le foyer fiscal est constitué des seuls revenus de son père salarié pour un montant de 24 065 euros ;
- lorsque l'étendue réelle des conséquences dommageables n'est connue que postérieurement au jugement, la partie requérante peut augmenter en appel le montant de ses prétentions par rapport au montant demandé devant les premiers juges ; un requérant qui demande une indemnité provisionnelle en se réservant de chiffrer après expertise ne peut être regardé comme présentant une demande nouvelle en appel ; les informations sur le coût d'une assistance d'une aide à domicile n'ont été obtenues que postérieurement au jugement rendu par le tribunal administratif ; l'étendue réelle du préjudice n'a donc été connue qu'après le jugement de première instance ; elle a demandé en première instance l'organisation d'une mesure d'expertise laquelle a été rejetée, elle peut donc présenter une nouvelle demande chiffrée au titre de l'assistance par une tierce personne ; à titre subsidiaire, il conviendra de lui allouer la somme de 1 527 345 euros sollicitée en première instance ;
- après la consolidation, les préjudices se sont poursuivis ; le dommage de Marine est continu, elle peut donc demander une nouvelle indemnisation au titre de l'assistance tierce personne permanente ;
- l'aide dont doit bénéficier Marine n'est pas "passive " car elle n'a pas conscience du danger dans le cadre de déplacements et souffre de problèmes de synchronisation des mouvements touchant ses fonctions motrices ;
- la brochure Urssaf transmise par le centre hospitalier universitaire de Dijon sur les exonérations des charges patronales pour certains employeurs n'a aucune incidence sur la demande indemnitaire au titre de l'assistance par une tierce personne car Marine n'a pas la qualité d'employeur à l'égard de l'APEF pour une prestation de garde à domicile, l'APEF étant un prestataire de service employant son propre personnel ; dans de telles circonstances, aucune charge patronale n'est payée par le bénéficiaire ;
- le préjudice de formation doit être estimé à 200 000 euros car Marine n'a pas pu dépasser un niveau équivalant à celui du CP, ne peut plus progresser et n'a pas pu se lier d'amitié à des camarades de classe à défaut d'avoir pu suivre une scolarité normale ;
- elle subit un préjudice professionnel lié à la perte de gains actuels et futurs et n'a aucun espoir d'insertion professionnelle ; le tribunal administratif lui a alloué une somme de 70 000 euros, laquelle est sous-estimée, au titre de l'incidence professionnelle ; compte tenu du revenu médian des Français, son préjudice annuel peut être évalué à 25 000 euros par an ; sur la base d'un taux de capitalisation de 33,941 (barème Gazette du Palais de 2011), doit lui être allouée une somme de 850 000 euros ; le préjudice de gains professionnels futurs n'est pas éventuel mais certain, l'expert ayant estimé que son autonomie est limitée car nécessitant la présence d'un tiers en permanence à ses côtés, fonction qui a toujours été assurée par ses parents;
- le déficit fonctionnel temporaire jusqu'à la consolidation de Marine, estimé à 51 800 euros par le tribunal administratif de Dijon, a été sous-évalué; son incapacité temporaire totale à 100 % a été estimée à 20 jours (durée de l'hospitalisation) ; à compter du 15 janvier 1995 jusqu'à la date de consolidation, l'incapacité temporaire a été évaluée à un taux de 60 % ; il convient de fixer cette indemnisation sur la base d'un SMIC à 1 100 euros par mois soit 36 euros par jour ; ce poste doit être estimé à 125 820 euros arrondi à 126 000 euros ;
- le poste souffrances endurées doit être évalué à 25 000 euros, et non à 5 500 euros comme estimé par le tribunal administratif, compte tenu d'un niveau de 4 sur une échelle de 7 estimé par l'expert et du fait de ne pas pouvoir être socialisée ;
- pour les préjudices postérieurs à la consolidation, l'expert a fixé à 50 % son taux d'incapacité permanente partielle définitive ; une somme de 125 000 euros, déjà retenue par les premiers juges, doit être allouée pour ce chef de préjudice à Marine ;
- elle subit un important préjudice d'agrément car ses loisirs sont limités du fait de son absence d'autonomie, de ses difficultés de coordination visio-spatiale et de la nécessité d'avoir à ses côtés une personne protectrice ; ce poste de préjudice peut être évalué à 100 000 euros ;
- son préjudice sexuel et d'établissement a été sous-évalué ; il peut être estimé à 200 000 euros compte tenu de sa totale immaturité ;
- il y a lieu de déduire de la somme demandée de 11 142 773,28 euros l'avance allouée par le tribunal administratif de Dijon dans son jugement du 20 septembre 2001 soit 18 293,88 euros ; doit ainsi être versée à Marine la somme de 11 124 479,40 euros ;
- Marine a fait l'objet d'une prise en charge scolaire à domicile par des cours particuliers, ce choix éducatif a été confirmé par les experts comme étant adapté à son état de santé et lui ayant permis de mieux s'épanouir que dans d'autres structures ; de novembre 2007 à juin 2010, le coût Acadomia a été de 13 246 euros ; après juin 2010 et jusqu'en 2013, les cours ont été réalisés par un professeur particulier rémunéré en chèque emploi service pour un montant de 14 073,83 euros ; il n'y a pas lieu de tenir compte d'une éventuelle réduction d'impôts car la famille J...n'était pas imposable pendant cette période, Mme I...J...ne travaillant plus ; le tribunal administratif a reconnu qu'une somme de 27 319,83 euros devait leur être allouée pour de tels frais de scolarité ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon n'a pas fait droit à la demande d'indemnisation du préjudice salarial de Mme I...J...en relevant qu'elle était inapte physiquement à un emploi et en ne retenant pas que c'est le handicap de Marine qui a empêché sa mère de reprendre un travail ; le Pr Floret, expert judiciaire, a indiqué que Marine souffre d'une dépendance quasi-permanente à un adulte et souffre d'une immaturité psycho-affective ; le maintien à domicile de l'enfant a nécessité la présence constante de sa mère et le sacrifice professionnel de celle-ci ; le préjudice salarial de la mère de Marine est établi par le rapport de l'expert et par le certificat du Dr D...selon lesquels la présence de sa mère a été fondamentale et nécessaire à Marine depuis décembre 1994; c'est le handicap de Marine qui a empêché sa mère de reprendre un travail après son licenciement pour motif économique en 1996 ; sa mère était apte physiquement à temps plein à compter de 2004, date du certificat médical du DrD...; avant la naissance de Marine, sa mère travaillait à temps complet comme caissière dans un hypermarché pour un salaire net de 880 euros en 1993 ; l'équivalent de salaire actuel serait de 1 560 euros ; la mère de Marine a arrêté sa carrière à 30 ans alors qu'elle aurait pu travailler jusqu'à 62 ans ; elle a ainsi perdu 32 ans de salaire soit une somme de 600 000 euros ;
- ils ont eu des frais divers du fait du handicap de Marine : un certificat de mise sous tutelle pour un montant de 160 euros, des frais de déplacements pour se rendre aux consultations médicales : 27 déplacements à Lyon, 161 séances au CASMP de Chalon sur Saône, 169 séances au CMPP de Chalon sur Saône ; les frais de déplacement représentent un montant de 11 490 euros ;
- ses soeur et frère nés en 1997 et 2001 souffrent moralement du handicap de leur soeur et ne peuvent pas mener une vie de famille normale et jouer avec leur soeur comme ils le voudraient ; ce préjudice peut être estimé à 10 000 euros pour chacun de ses frère et soeur ; la circonstance qu'ils sont nés postérieurement après le handicap de Marine ne leur enlève pas de droit à indemnisation de leur douleur morale ou des troubles dans leurs conditions d'existence, ils vivent avec cette dernière au domicile familial;
Par mémoire enregistré le 20 mai 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or, représentée par Me F...K..., demande la confirmation du jugement de première instance et par suite la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dijon à lui verser 176 197,07 euros outre intérêts de droit à compter du premier jour de la demande et une somme annuelle de 17 897,50 euros pour les frais futurs jusqu'au 27 mars 2019 sur présentation de justificatifs. Elle demande également la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dijon à lui verser 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- comme reconnu par le tribunal administratif, les débours demandés sont en lien avec la prise en charge des séquelles liées à la carence fautive sur le test de diagnostic ;
Par des mémoires, enregistrés les 5 janvier 2016, 8 septembre 2016, 4 octobre 2016, 16 mai 2017, 13 décembre 2017, 13 mars 2018, 18 mai 2018, 15 octobre 2018, 22 octobre 2018, non communiqué, et le 30 octobre 2018, le centre hospitalier universitaire de Dijon, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête des consorts J...et présente des conclusions à fin d'appel incident tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il a alloué une indemnité de 8 000 euros au frère et à la soeur de Marine. Il indique que les conclusions en appel des consorts J...qui excèdent le montant de 1 822 116,20 euros pour Marine excèdent les montants dont ont été saisis les premiers juges et sont par suite irrecevables.
Il soutient que :
- en ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire, la jurisprudence alloue 400 euros par mois au titre d'un tel déficit ; la somme de 51 800 euros attribuée par le tribunal administratif est conforme à la jurisprudence ;
- les demandes tendant au versement d'une somme de 200 000 euros au titre de l'incidence scolaire et professionnelle et d'une somme de 850 000 euros au titre des gains professionnels futurs de Marine doivent être rejetées car les préjudices éventuels ne peuvent pas être réparés et l'impossibilité définitive d'exercer une profession ne peut faire l'objet d'une indemnisation spécifique patrimoniale mais peut seulement être indemnisée au titre des troubles personnels de toute nature dans les conditions d'existence ; l'incidence professionnelle résultant de la perte de perspective professionnelle est indemnisée à hauteur de 20 000 euros ; la CAA de Versailles a accordé une indemnité de 40 000 euros pour un déficit fonctionnel permanent entre 60 et 80 % au titre de l'incidence scolaire et professionnelle ; Marine reste atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 50 % ; étant une enfant lors du dépistage de sa pathologie, elle n'a jamais exercé d'activité professionnelle ; c'est donc à bon droit que le tribunal administratif n'a pas accordé d'indemnité au titre de la perte de revenus professionnels ; les indemnités allouées par le tribunal administratif de 30 000 euros pour le préjudice scolaire et de 70 000 euros au titre de l'incidence professionnelle sont conformes à la jurisprudence ;
- l'indemnité de 5 500 euros allouée par les premiers juges pour les souffrances endurées de 4 sur 7 est conforme à la jurisprudence ;
- la demande indemnitaire pour l'accompagnement et l'assistance par une tierce personne n'est pas justifiée, les préjudices éventuels ne pouvant donner lieu à réparation ; Marine J...a toujours résidé chez ses parents et y réside toujours ; elle est relativement autonome pour certains actes de la vie quotidienne ; elle n'est pas accueillie en foyer de vie ou dans un établissement spécialisé ; le préjudice invoqué n'est pas certain ; il appartient aux requérants d'apporter des éléments chiffrés ; une mesure d'expertise complémentaire est inutile ;
- les consorts J...portent en appel la demande de réparation des préjudices de Marine de 1 822 116,20 euros, somme demandée en première instance, à 11 124 479 euros ; les demandes excédant les montants dont ont été saisis les premiers juges sont irrecevables car il y a eu " cristallisation du débat contentieux " ; on ne peut pas ajouter des chefs de préjudice nouveaux ou faire état d'autres causes de responsabilité à l'égard desquels le contentieux ne serait pas regardé comme lié ;les majorations en appel ne sont possibles que s'il y a eu aggravation ou lorsque l'étendue des conséquences dommageables d'un même fait n'est connue que postérieurement au jugement de première instance ; en première instance, ils ont demandé pour l'assistance par une tierce personne avant et après consolidation une somme de 1 527 345 euros sur la base d'un coût annuel de 45 000 euros par an ; l'état de Marine ne s'est pas aggravé et son mode de vie n'a pas changé car elle continue de résider chez ses parents ; la demande n'est pas fondée car l'aide demandée porte sur une aide à temps plein alors que Marine dispose d'une certaine autonomie dans les actes de la vie quotidienne ; quand on ignore si une victime atteinte d'un grand handicap sera placée dans un établissement ou pourra être hébergée à domicile, une rente lui est versée à laquelle s'ajoute une indemnisation forfaitaire pour les nuits passées effectivement au domicile ; on ignore quelle sera l'évolution de la vie de Marine ; il n'y a donc pas lieu de verser un capital ; doit être déduite de l'indemnité pour assistance par tierce personne toutes les prestations perçues par la victime (TP, PCH, AAH), crédits d'impôts en cas de recours à du personnel salarié ; aucun élément n'est apporté sur le montant de telles aides ;
- les consorts J...demandent une indemnisation sur la base d'un temps plein depuis l'âge de 5 ans de Marine ; or un enfant réclame " par nature " l'assistance d'un adulte et seul le surplus de surveillance lié au handicap de l'enfant peut donner lieu à une indemnisation spécifique ; Marine possède un certain degré d'autonomie dès lors qu'elle présente les capacités intellectuelles d'une enfant de 6 ans et n'est pas handicapée motrice ; l'aide dont elle a besoin est une assistance " passive " limitée à une activité de surveillance ; le coût horaire d'une tierce personne non qualifiée varie selon la jurisprudence entre 10 euros et 12,50 euros ; en cas de recours à du personnel salarié pour l'assistance par tierce personne, des allégements de charge sociale et un crédit d'impôt figurant dans les avis d'impôt sont accordés aux bénéficiaires ; le montant indiqué de 16 894,92 euros qui reviendrait à un coût horaire net, après déduction des aides et avantages fiscaux, de 23,33 euros n'est pas réaliste ; ils ne peuvent pas solliciter la prise en charge de dépenses qu'ils n'ont pas exposées ; ils n'apportent pas d'éléments permettant de chiffrer le montant des aides visant à compenser le coût de l'aide d'une tierce personne ;
- les requérants n'établissent pas l'étendue des dépenses exposées au profit de Marine par la production de la déclaration fiscale de l'année 2012 ; le montant de 4 894 euros pour un salarié à domicile est très éloigné des 202 739 euros annuels allégués par les requérants ;
- le recours à du personnel salarié à domicile n'induit pas automatiquement que les sommes versées aient servi à payer du personnel pour Marine ;
- les avis d'imposition produits montrent que les requérants n'ont pas bénéficié d'un crédit d'impôt venant compenser une dépense tierce personne ;
- pour le préjudice d'agrément, la victime doit apporter la preuve d'une renonciation à une activité de loisirs en raison de la faute commise ; Marine peut pratiquer des activités sportives ; le montant de 20 000 euros alloué par les premiers juges n'est pas sous-évalué ;
- l'indemnité de 20 000 euros allouée par les premiers juges pour le préjudice d'établissement est conforme à la jurisprudence ;
- la demande de la mère de Marine au titre de son interruption de carrière doit être rejetée car ce chef de préjudice a été écarté par la cour administrative d'appel de Lyon dans un arrêt du 19 avril 2005 au motif d'un licenciement pour inaptitude physique et l'inaptitude de Mme I...J...n'apparaît pas avoir disparu ; l'absence d'activité professionnelle de celle-ci ne découle pas de la faute du centre hospitalier universitaire ; le maintien de leur fille à domicile est un choix personnel et Mme J...fait office de tierce personne auprès de Marine ;
- les frère et soeur de Marine étant nés postérieurement à la naissance de Marine, aucune indemnisation ne peut leur être allouée et en toute hypothèse, compte tenu de la jurisprudence, la somme accordée de 8 000 euros n'est pas insuffisante;
- une somme de 154 835,32 euros a été versée par le centre hospitalier universitaire de Dijon aux consortsJ... ; cette somme comprend 100 000 francs soit 15 244,90 euros en exécution de l'ordonnance du 31 mars 2000, 10 000 euros de provision au titre du référé du 6 février 2004, 43 719,59 euros réglés le 27 juillet 2005 au titre des indemnités dues après l'arrêt de 2005, 3 110,83 euros dont intérêts en août 2000, 11 960 euros pour le remboursement de frais kilométriques exposés entre 1995 à 2006 inclus, 18 500 euros de provision amiable en septembre 2010, 1 500 euros en remboursement des honoraires du Pr Floret en septembre 2010 et 50 800 euros en exécution de l'ordonnance du tribunal administratif du 30 janvier 2014; le montant des provisions concernant les préjudices de Marine s'élèvent à 93 744,90 euros ; les parents de Marine se sont vu rembourser les frais kilométriques exposés entre 1995 et 2006 par une allocation provisionnelle amiable de 11 960 euros payée le 10 décembre 2007 ainsi que les honoraires du Pr Floret pour un montant de 1 500 euros ; les parents de Marine en exécution de l'arrêt de la cour du 19 avril 2005 ont perçu une somme de 20 000 euros chacun en réparation de leurs préjudices propres et ont perçu 2 219,83 euros d'intérêts et 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; les parents de Marine ont également perçu pour Marine, en exécution de l'arrêt de la cour du 19 avril 2005, la somme de 3 110,83 euros au titre du préjudice moral, d'agrément, du pretium doloris, et ce après déduction de la somme de 15 244,90 euros réglée en exécution de l'ordonnance du 31 mars 2000 ;
Les parties ont été informées, le 11 octobre 2018, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions en appel de la caisse primaire d'assurance maladie tendant à obtenir les intérêts à compter de la date de sa demande devant le tribunal administratif, celles-ci étant nouvelles en appel dès lors que la caisse primaire d'assurance maladie a demandé explicitement en première instance l'attribution des intérêts à compter de la date de jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 8 novembre 2018 :
- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;
- et les observations de Me Fouchard, avocat de M. et Mme J...et de Me Gilbert, avocat du centre hospitalier universitaire de Dijon.
1. Considérant que Mme E...J...est née le 27 mars 1994 à la polyclinique de Bourgogne à Saint-Remy en Saône-et-Loire ; qu'elle y a subi un prélèvement sanguin le jour de sa naissance en vue de doser la phénylalanine (Test de Guthrie) ; qu'à la suite d'une négligence commise par le laboratoire du centre hospitalier universitaire de Dijon, chargé de ce dosage dans la région Bourgogne, ce test n'a finalement pas été réalisé et, en conséquence, l'anomalie existante de phénylcétonurie dont souffre Marine n'a pas été détectée lors de ces tests à la naissance ; que, par un jugement du 20 septembre 2001, le tribunal administratif de Dijon a retenu qu'en omettant de refaire les tests dont les premiers résultats étaient ininterprétables en raison d'un problème technique, le laboratoire de biochimie du centre hospitalier universitaire de Dijon a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, de sorte que l'établissement devait être déclaré intégralement responsable des conséquences dommageables subies par la requérante et ses parents, résultant du retard à diagnostiquer la phénylcétonurie dont elle est atteinte ; que, par un arrêt du 19 avril 2005 devenu définitif, la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé la responsabilité du centre hospitalier universitaire et a annulé partiellement le jugement du tribunal administratif de Dijon en ce qui concerne le montant des sommes dues au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence endurés par les parents de Marine ; que, le Pr. Floret, expert commis par le tribunal administratif, a déposé plusieurs rapports les 10 juillet 2003, 4 décembre 2006 et 8 janvier 2010 sur l'état de santé de Marine ; qu'un dernier rapport d'expertise a été rendu par le Pr. Floret le 5 février 2013 qui a fixé au 3 décembre 2012 la date de consolidation de Marine ; que, le 4 novembre 2013, M. et Mme J... ont présenté une demande indemnitaire préalable au centre hospitalier universitaire de Dijon ; que, dans le dernier état de leurs écritures devant le tribunal administratif de Dijon, ils ont demandé au nom de Marine et de leurs deux autres enfants mineurs ainsi que pour leurs préjudices propres la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dijon à leur verser une somme globale de 3 812 154,83 euros dont 3 153 345 euros au titre des préjudices de Marine ; que, par jugement du 22 janvier 2015, le tribunal administratif de Dijon a condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser aux consortsJ..., après déduction des provisions déjà obtenues, la somme de 252 081,05 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Côte d'Or une somme de 176 197,07 euros, assortie des intérêts à compter du jugement ; qu'il a également condamné ledit centre hospitalier à rembourser à la CPAM, sur justificatifs les frais futurs jusqu'au 27 mars 2019 liés à l'état de santé de MarineJ..., pour un montant de 17 887,50 euros et à lui verser une somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
2. Considérant que les consorts J...font appel de ce jugement du 22 janvier 2015 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs demandes indemnitaires ; qu'ils demandent dans le dernier état de leurs écritures qu'une somme de 11 124 479,40 euros et subsidiairement une somme de 3 135 051,12 euros soit allouée à Marine J...ainsi que diverses sommes aux autres membres de la famille en qualité de victimes par ricochet ; que Mme A...J..., soeur de Marine, devenue majeure, a indiqué reprendre l'instance introduite en son nom par ses parents ; que, par la voie de conclusions en appel incident, le centre hospitalier universitaire de Dijon demande la réformation du jugement en tant seulement qu'il alloué à chacun des soeur et frère de Mme E...J...une somme de 8 000 euros en réparation de leurs préjudices propres ; que la CPAM de la Côte d'Or se borne à demander l'allocation des intérêts à compter du 24 décembre 2014 sur la somme de 176 197,07 euros allouée par le tribunal administratif de Dijon ;
Sur l'appel principal de la familleJ... :
Sur les préjudices de Mme E...J... :
En ce qui concerne l'évaluation des préjudices de Mme E...J... :
3. Considérant que le centre hospitalier universitaire de Dijon fait valoir que les conclusions indemnitaires de Mme E...J... sont irrecevables en tant qu'elles excèdent le montant demandé en première instance de 1 822 116,20 euros et notamment la somme de 1 527 345 euros demandée au titre de l'assistance par une tierce personne avant et après consolidation ;
4. Considérant que la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur ; que cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque ; qu'il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges ; qu'il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué ;
5. Considérant qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que les sommes demandées en première instance par Marine J...en réparation de ses préjudices s'élevaient à 3 153 345 euros et non à 1 822 116,20 euros comme mentionné par le centre hospitalier universitaire ; que, par suite, la fin de non recevoir telle que formulée par le centre hospitalier universitaire de Dijon relative à l'irrecevabilité des conclusions d'appel en tant qu'elles excèdent 1 822 116,20 euros doit être écartée ;
En ce qui concerne les préjudices de Mme E...J... :
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise déposée le 5 février 2013 par le Pr Floret, que l'état de santé de Marine J...peut être considéré comme consolidé au 3 décembre 2012, soit postérieurement à ses 18 ans ;
Quant aux préjudices patrimoniaux :
S'agissant de l'assistance par une tierce personne :
7. Considérant que, lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir ; qu'il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier ; qu'il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime ; que ce taux horaire doit prendre en compte le salaire minimum interprofessionnel de croissance augmenté des cotisations sociales dues par l'employeur, la majoration de rémunération dues les dimanches et jours fériés, ainsi que des congés payés ; qu'afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, il y a lieu, de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours ;
Avant le 3 décembre 2012 :
Du 27 mars 1999 à fin juin 2007 :
8. Considérant que Mme E...J..., sur la base des conclusions des expertises du Pr Floret, demande que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon une somme annuelle de 202 739,04 euros de l'âge de 5 ans à ses 18 ans au titre de l'assistance par une tierce personne sur la base d'une prise en charge de 24h00 par jour ; qu'elle fait valoir que le Pr Floret a indiqué qu'elle n'était pas autonome et devait faire l'objet d'une assistance et d'une surveillance par une personne tierce, ce rôle étant essentiellement dévolu à sa mère ; que le centre hospitalier universitaire de Dijon oppose en défense que cette somme n'est pas justifiée par les documents produits à l'instance et que seuls certains paiements figurant dans des données fiscales concernant MmeL..., réalisant des prestations de scolarisation à domicile à compter de 2014, peuvent être remboursés dans le cadre de l'assistance par tierce personne ; que le centre hospitalier universitaire de Dijon indique également que doivent être déduites du poste " assistance tierce personne " les sommes ayant été versées à Mme E...J...au titre de la prestation de compensation du handicap, de la majoration tierce personne et de l'allocation aux adultes handicapés et que Mme J...doit justifier des sommes ainsi perçues ;
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des expertises du Pr Floret réalisées en 2003, 2006, 2010 et 2013 que si Marine a pu bénéficier d'un encadrement scolaire en maternelle, à l'école primaire jusqu'en septembre 2002 puis en CLIS jusqu'en juin 2007, elle a été ensuite scolarisée à domicile faute de structure éducative correspondant à ses handicaps et à ses spécificités éducatives ; que cette scolarisation à domicile a été recommandée par l'expert au regard notamment de l'immaturité psycho-affective de Marine et de la nécessité de la canaliser et de la protéger d'autres élèves ; que l'expert souligne l'engagement particulièrement fort de sa famille dans son éducation et dans son suivi médical notamment dans le cadre des transports et de l'accompagnement de Marine à de très nombreuses consultations médicales à Lyon et dans les soins de rééducation orthophonique et kinésithérapique pratiqués à Chalon-sur-Saône, d'abord au centre d'action médico-sociale précoce (CASMP) puis au centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) ; que, pour la période comprise entre le 27 mars 1999 et fin juin 2007, les documents produits par les requérants permettent d'identifier la réalisation de 13 déplacements aller-retour, entre janvier 1999 et janvier 2006, entre leur domicile et Lyon pour des consultations médicales spécialisées, soit, sur la base d'un aller-retour de 4 heures, 52 heures consacrées exclusivement aux déplacements en voiture, de 18 déplacements aller-retour en voiture d'une heure pour se rendre entre avril et décembre 1999 au CASMP à Chalon-sur-Saône, soit 18 heures, et 169 déplacements aller-retour en voiture d'une heure pour se rendre entre décembre soit 1999 et mai 2002 au CMPP à Chalon-sur-Saône, soit 169 heures ; que, par suite, eu égard au coût du SMIC augmenté des cotisations sociales aux dates des déplacements et des majorations décrites au point 7, il y a lieu de retenir un taux horaire moyen de 10,50 euros pour les déplacements à Lyon, de 9 euros pour les déplacements au CASMP de Chalon-sur-Saône et de 9,50 euros pour les déplacements au CMPP de Chalon-sur-Saône ; que la somme ainsi due au titre de l'assistance par tierce personne effectuée par les parents de Marine doit être évaluée à la somme arrondie de 2 313 euros ;
10. Considérant que, compte tenu de l'obligation de surveillance spécifique induite par le handicap de Marine qui découle directement du retard fautif commis par le centre hospitalier universitaire de Dijon et qui impose à ses parents notamment une surveillance particulière quant à son régime alimentaire et à la prise de compléments alimentaires et de médicaments ainsi qu'une assistance et surveillance parentale dépassant celle nécessaire pour un enfant non affecté de son handicap, il sera fait une juste appréciation de l'assistance effectuée par la mère et le père de Marine au cours de cette période en la fixant globalement à 2 heures par jour ; que, sur la base de 412 jours par an prenant en compte les congés payés et les jours fériés, il y a lieu de fixer pour la période allant du 27 mars 1999 à fin juin 2007 à 3 061 le nombre de jours à indemniser ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un niveau de technicité important était requis dans le cadre d'une telle assistance familiale ; qu'il sera ainsi fait une juste appréciation du préjudice subi sur la base de ces deux heures quotidiennes en fixant le taux horaire moyen de rémunération tenant compte des charges patronales et des majorations pour le travail du dimanche et jours fériés à 10,50 euros pour la période comprise entre le 27 mars 1999 et fin juin 2007 ; que ce préjudice doit ainsi être évalué à 64 281 euros ; que, suite aux mesures d'instruction menées par la cour, il ne résulte pas de l'instruction que les parents de Marine ou Marine aient perçu une allocation d'éducation de l'enfant handicapé susceptible d'être déduite du montant de l'assistance par une tierce personne au cours de ladite période ou une autre aide susceptible d'être déduite d'un tel chef de préjudice ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de fixer à 66 594 euros l'indemnité due par le centre hospitalier universitaire de Dijon à Mme E...J...au titre de l'assistance par une tierce personne pour la période allant du 27 mars 1999 à fin juin 2007 ;
Du 1er juillet 2007 au 2 décembre 2012 :
12. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise déposé en 2013 par le Pr Floret que l'assistance apportée par sa famille à Marine du fait de son handicap à partir de juillet 2007, fin de sa scolarité en CLIS, dépasse " la fonction parentale normale " ; qu'il indique notamment sans être utilement contredit par le centre hospitalier universitaire de Dijon pour la période postérieure à la consolidation mais qui est également valable pour la période, débutant à compter de juillet 2007, de scolarisation à domicile que Marine doit poursuivre un régime ; qu'il précise que " ce fait est commun à tous les patients atteints de cette maladie. Toutefois du fait de ces troubles cognitifs,[Marine] ne pourra jamais être autonome vis-à-vis de ce régime (préparation des repas,...) " ; qu'il résulte de l'instruction que Marine, qui a le niveau scolaire d'un enfant de 6 ans, soit un niveau de cours primaire, et un quotient intellectuel de 40, ne peut ni effectuer des courses de manière autonome ni payer seule des achats ; qu'elle ne peut pas non plus effectuer seule des sorties à l'extérieur nécessitant de traverser la rue ; que si elle peut réaliser certains actes de la vie courante (manger, se laver), elle doit toutefois être assistée pour certains gestes nécessitant de la coordination et de la synchronisation des mouvements ; qu'elle doit être accompagnée pour des séances de rééducation orthophonique deux fois par semaine et ce jusqu'à ses 25 ans ; que, dans les conditions ainsi décrites, il sera fait une juste appréciation de l'assistance par une tierce personne ayant été effectuée par sa famille et principalement par sa mère en la fixant à 2h30 par jour entre le 1er juillet 2007 et le 2 décembre 2012 ; que, compte tenu de la majoration des jours fériés et des congés payés, il y a lieu de calculer son préjudice annuel sur la base de 412 jours par an ; qu'en l'espèce, 2 234 jours doivent être indemnisés ; que le taux horaire moyen pour la période allant du 1er juillet 2007 au 2 décembre 2012 tenant compte du SMIC chargé et des majorations pour le travail du dimanche et les jours fériés doit être fixé à 12,50 euros ; que ce préjudice doit ainsi être évalué à la somme arrondie de 69 812 euros ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire de Dijon, il n'y a pas lieu de déduire l'allocation aux adultes handicapés, qui constitue une garantie de ressources et n'a pas pour objet de compenser les besoins d'assistance à raison du handicap, du montant de la somme indemnisant le besoin d'assistance de Marine par une tierce personne ; que, suite aux mesures d'instruction menées par la cour, il ne résulte pas de l'instruction que les parents de Marine ou Marine aient perçu une allocation enfant handicapé susceptible d'être déduite du montant de l'assistance par une tierce personne au cours de ladite période ou une autre aide déductible ; qu'il y a lieu par suite de fixer à 69 812 euros la somme ainsi due par le centre hospitalier universitaire à Mme E...J...au titre de l'assistance par une tierce personne pour la période allant de juillet 2007 au 2 décembre 2012, date de sa consolidation ;
Sur la période post-consolidation :
Du 3 décembre 2012 au 14 décembre 2018 :
13. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 10 et les conclusions de l'expert restant identiques pour la période allant jusqu'au 14 décembre 2018, date de l'arrêt, concernant l'assistance nécessaire à Marine en matière de suivi de son régime alimentaire, de préparation de ses repas, de réalisation des achats, d'assistance dans ses sorties et déplacements à l'extérieur notamment lors de ses deux séances hebdomadaires de rééducation orthophonique, il y a lieu de maintenir, lorsque Marine réside à domicile, un volume horaire de 2h30 par jour d'assistance par une tierce personne ; que les requérants indiquent qu'une telle assistance a été, hors cours et accompagnement scolaire, prise en charge par sa mère ; que, sur la base de 6 années à 412 jours et de 12 jours devant être majorés à hauteur de 15 jours, il y a lieu de fixer à 2487 le nombre de jours indemnisables ; que le taux horaire moyen sur la période allant du 2 décembre 2012 au 14 décembre 2018 tenant compte d'un SMIC chargé et de la majoration pour les dimanches et jours féries doit être fixé à 13,50 euros ; que, par suite, il y a lieu de fixer le coût de cette assistance à la somme arrondie de 83 936 euros ; que, compte tenu des éléments fiscaux présents au dossier relatifs à une assistance par Mme L...dans le cadre de cours et d'accompagnement scolaire à domicile prodigués à Marine de 2014 à 2016, il y a également lieu de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon une somme de 12 880 euros ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire de Dijon, il n'y a pas lieu de déduire l'allocation aux adultes handicapés, qui constitue une garantie de ressources et n'a pas pour objet de compenser les besoins d'assistance par une tierce personne à raison du handicap, d'un tel montant résultant du besoin d'assistance de Marine par une tierce personne ; que, suite aux mesures d'instruction menées par la cour, il ne résulte pas de l'instruction que Marine ou ses parents aient perçu une aide susceptible d'être déduite du montant de l'assistance par une tierce personne au cours de ladite période ; que, par suite, pour la période allant du 2 décembre 2012 au 2 décembre 2018, le poste de préjudice assistance par une tierce personne doit être évalué à la somme de 96 816 euros ;
Du 15 décembre 2018 au 27 mars 2019 :
14. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit au point 10 et les conclusions de l'expert restant identiques pour la période allant jusqu'au 27 mars 2019 (date à laquelle Marine atteindra l'âge de 25 ans) concernant l'assistance de Marine en matière de suivi de son régime alimentaire, de préparation de ses repas, de réalisation des achats, d'assistance dans ses sorties et déplacements à l'extérieur notamment lors de ses deux séances hebdomadaires de rééducation orthophonique, il y a lieu de maintenir un volume horaire de 2h30 d'assistance par une tierce personne ; que, sur la base de 412 jours par an prenant en compte les congés payés et les dimanches et jours fériés, il y a lieu de fixer pour la période allant du 15 décembre 2018 au 27 mars 2019 à 116 le nombre de jours à indemniser ; que le taux horaire moyen tenant compte d'un SMIC chargé et de la majoration pour les dimanches et jours fériés doit être fixé à 14 euros pour cette période ; qu'il y a ainsi lieu d'évaluer le coût de cette assistance à 4 060 euros ; qu'il appartiendra à Mme E...J...de justifier des sommes et des restes à charge relatifs à la réalisation de cours à domicile durant cette période pour pouvoir être remboursée desdits restes à charge par le centre hospitalier universitaire de Dijon ;
A compter du 27 mars 2019 :
15. Considérant que, pour les préjudices futurs de la victime non couverts par des prestations, il appartient au juge de décider si leur réparation doit prendre la forme du versement d'un capital ou d'une rente selon que l'un ou l'autre de ces modes d'indemnisation assure à la victime, dans les circonstances de l'espèce, la réparation la plus équitable ; que si le juge n'est pas en mesure de déterminer lorsqu'il se prononce si la victime sera placée dans une institution spécialisée ou si elle sera hébergée au domicile familial, il lui appartient de lui accorder une rente trimestrielle couvrant les frais de son maintien au domicile familial, en fixant un taux quotidien et en précisant que la rente sera versée au prorata du nombre de nuits ou d'heures qu'elle aura passées à ce domicile au cours du trimestre considéré ;
16. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais afférents au besoin d'assistance de Mme E...J...par une tierce personne doivent être réparés par une rente annuelle viagère versée trimestriellement, et non par le versement d'un capital représentatif de ces frais futurs ;
17. Considérant que l'expert ne prévoit pas le maintien de séances orthophoniques au-delà des 25 ans de Marine J... ; que, dans les conditions susdécrites et au regard des autres nécessités d'assistance concernant le suivi de son régime alimentaire et de ses prescriptions médicales, la réalisation des repas et des achats, sa surveillance dans le cadre de sorties extérieures lesquelles, comme il a été dit, ont été assumées essentiellement par sa mère, il sera fait une juste appréciation des besoins d'assistance de Marine par une tierce personne en les fixant à 2 heures par jour ; que le centre hospitalier universitaire de Dijon devra verser une rente à Marine sur la base de cette quotité de 2 heures quotidiennes sur 412 jours par an et d'un taux horaire de 14 euros ; que cette rente ainsi calculée à compter du 27 mars 2019 sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ; qu'il appartiendra à Mme E...J..., dans l'hypothèse où elle occuperait un emploi ou serait placée dans une institution ou hospitalisée, de fournir trimestriellement les justificatifs de ses jours de travail et d'hébergement dans une institution spécialisée ou un établissement hospitalier ; que cette rente sera versée jusqu'au décès de Mme E...J...; que devront être déduites de cette rente les aides d'assistance par une tierce personne ayant le même objet, sauf celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune ; qu'il appartiendra à Mme E...J...de fournir au centre hospitalier universitaire de Dijon les justificatifs relatifs au volume horaire d'assistance par une tierce personne et aux aides perçues ayant le même objet à l'exception de celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune ;
S'agissant de l'incidence scolaire, universitaire et de formation :
18. Considérant que Mme E...J...a été diagnostiquée vers l'âge de 9 mois comme souffrant de troubles cognitifs et neurologiques en lien avec sa phénylcétonurie détectée avec retard ; que de tels troubles sont à l'origine de difficultés très sévères d'apprentissage ; que le professeur Floret a estimé en 2013 que Mme E...J..., dotée d'un quotient intellectuel de 40, ne pourrait pas dépasser le niveau scolaire d'un enfant de 6 ans de classe primaire et a souligné ses importantes difficultés d'apprentissage ; que si Mme E...J...peut écrire en gros caractères et réaliser des additions et des soustractions simples, elle n'a toutefois acquis ni la multiplication ni la soustraction et ne peut pas effectuer une tâche en lien avec l'abstraction ; qu'elle a également des difficultés en matière langagière et doit continuer jusqu'à l'âge de 25 ans des séances de rééducation orthophonique ; que l'expert mentionne qu'elle a dû être scolarisée à domicile pour " pouvoir progresser dans son handicap " dans le cadre de cours donnés par des professeurs privés ; que la requérante a ainsi connu une scolarité très perturbée en dehors du cadre classique ; que, compte tenu de ses difficultés cognitives, la possibilité d'une poursuite d'études de niveau universitaire doit être écartée ; que la possibilité d'une formation complémentaire à l'extérieur de son domicile y compris dans un ESAT apparait limitée, Marine ayant besoin de cours individuels à domicile pour maintenir ses acquis et progresser légèrement ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des indemnités dues au titre du préjudice scolaire, universitaire et de formation en rehaussant la somme allouée par les premiers juges et en la portant à 50 000 euros ;
S'agissant de la perte de revenus professionnels :
19. Considérant que Mme E...J..., atteinte depuis sa naissance d'une phénylcétonurie, a développé, à raison du retard fautif du centre hospitalier universitaire de Dijon à diagnostiquer cette anomalie, des troubles neurologiques et d'apprentissage très sévères ; que si une possibilité de travailler en ESAT a été envisagée, cette hypothèse a été refusée par ses parents désignés tuteurs par décision de justice ; que Mme E...J...n'a jamais exercé d'activité professionnelle ; que, dès lors, la perte de gains professionnels futurs qu'elle allègue, qui ne présente en l'état de l'instruction aucun caractère certain, ne saurait lui ouvrir un droit à indemnité ;
S'agissant de l'incidence professionnelle :
20. Considérant que si, comme il vient d'être dit, l'hypothèse d'un travail en ESAT a été envisagée pour Marine, il résulte de l'instruction que, compte tenu de son niveau scolaire, de certains problèmes de coordination des mouvements et de la nécessité de l'assister pour toutes activités nécessitant des déplacements à l'extérieur, ses possibilités d'acquérir une formation complémentaire et de travailler puis d'évoluer professionnellement en ESAT apparaissent extrêmement faibles ; qu'en ce qui concerne le poste d'incidence professionnelle, il n'est pas contesté que Mme E...J...a perçu depuis le 1er avril 2014 une allocation aux adultes handicapés, laquelle a vocation à compenser au moins partiellement les pertes de revenus et l'incidence professionnelle ; que le montant global de cette allocation jusqu'à l'arrêt peut être estimé, sur la base d'une moyenne de 800 euros par mois pour la période allant du 1er avril 2014 au 30 mars 2018 et de 819 euros par mois à compter d'avril 2018, à la somme arrondie de 45 361 euros ; que, dans ces conditions, les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante évaluation de ce chef de préjudice en allouant une indemnité de 70 000 euros à ce titre ;
Quant aux préjudices extra-patrimoniaux :
21. Considérant que les premiers juges ont accordé au titre de son déficit fonctionnel temporaire avant consolidation une somme de 51 800 euros à Mme E...J... : que, compte tenu des données figurant dans les expertises du Pr Floret relatives à un déficit total pendant une hospitalisation de 20 jours et un déficit temporaire estimé à hauteur de 60 % pendant près de 18 ans, il y a lieu de maintenir cette somme de 51 800 euros laquelle n'apparaît pas sous-évaluée ;
22. Considérant que Mme E...J...demande que la somme de 150 000 euros lui ayant été allouée par les premiers juges au titre de son déficit fonctionnel permanent estimé à 50 % par l'expert soit maintenue ; qu'en l'absence d'appel incident de la part du centre hospitalier universitaire, il y a lieu de maintenir cette somme de 150 000 euros ;
23. Considérant que le Pr Floret a évalué à 4 sur une échelle de 7 les souffrances physiques et psychologiques éprouvées par Marine ; qu'il mentionne également qu'elle est fortement affectée par l'absence d'amis et sa dépendance psycho-affective aux adultes ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une plus juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme ainsi due à la somme de 8 000 euros ;
24. Considérant que si la requérante peut, sous réserve d'être assistée et accompagnée, monter à cheval et a pu malgré des problèmes de coordination suivre quelques cours de danse durant son enfance, il résulte toutefois de l'instruction et notamment des rapports d'expertise du Pr Floret que ses activités de loisirs sont très restreintes compte tenu de son handicap cognitif, de ses défauts de coordination notamment visiospatiale et de son incapacité à pouvoir traverser seule une rue ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément en portant l'indemnité due à ce titre à la somme de 25 000 euros ;
25. Considérant que l'expert relève l'existence certaine d'un préjudice sexuel et d'un préjudice d'établissement en soulignant les difficultés cognitives et l'immaturité psycho-affective de Mme E...J...ainsi que son incapacité à pouvoir en toute hypothèse s'occuper d'enfants ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice sexuel en l'évaluant à 20 000 euros et de son préjudice d'établissement en le fixant à 35 000 euros ; qu'une somme de 55 000 euros doit ainsi être mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon en réparation de ces deux chefs de préjudice ;
26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant des préjudices de Mme E...J..., hors sa rente d'assistance par une tierce personne à compter du 27 mars 2019 et le remboursement de ses restes à charge des cours à domicile entre le 15 décembre 2018 et le 27 mars 2019, s'élève à 647 082 euros ; que, comme il a été indiqué aux points 14 et 17, doivent aussi être mis à la charge du centre hospitalier de Dijon le remboursement des restes à charge des cours à domicile entre le 15 décembre 2018 et le 27 mars 2019 et le paiement de la rente d'assistance par une tierce personne à compter du 27 mars 2019 dans les conditions décrites au point 17 ;
27. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'arrêt n° 01LY02496 du 19 avril 2005 de la cour administrative d'appel de Lyon étant devenu définitif, le centre hospitalier universitaire de Dijon a été condamné définitivement à verser une somme de 18 293,38 euros à Marine J...en réparation de ses préjudices moraux, de souffrances, d'agrément et d'esthétique subis avant ses 18 ans et sa consolidation ; qu'il résulte également de l'instruction que ledit centre hospitalier a versé à M. et Mme J...pour le compte de Marine une somme de 18 355,73 euros sous la forme d'un versement de 15 244,90 euros le 10 avril 2000 et une somme de 3 110,83 euros le 21 juillet 2006 correspondant aux 3 048,98 euros dûs et aux intérêts ; que le centre hospitalier a ainsi exécuté l'arrêt du 19 avril 2005 ; qu'il résulte également des différentes mesures d'instruction menées par la cour que la SHAM, assureur du centre hospitalier universitaire de Dijon, a versé pour Mme E...J...une somme provisionnelle de 10 000 euros le 11 octobre 2005, une somme provisionnelle de 18 500 euros le 1er septembre 2010 dans le cadre d'une démarche amiable et une somme provisionnelle de 50 000 euros le 26 février 2014 en exécution de l'ordonnance n° 1302866 du 30 janvier 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Dijon ; que le montant des provisions versées par la SHAM, assureur du centre hospitalier universitaire de Dijon, à Mme E...J...pour les préjudices non indemnisés par l'arrêt du 19 avril 2005, s'élève ainsi à 78 500 euros ; que cette dernière somme viendra en déduction de l'indemnité définie au point précédent ;
Sur les préjudices de M. et MmeJ..., parents de Marine :
28. Considérant que M. et Mme J...demandent le maintien de la somme de 27 319,83 euros allouée par les premiers juges en 2015 au titre des frais de scolarité et de cours de professeurs particuliers à domicile jusqu'à l'année 2013 incluse ; qu'en l'absence d'appel incident de la part du centre hospitalier universitaire de Dijon, il y a lieu de maintenir cette somme de 27 319,83 euros à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon ;
29. Considérant que les requérants demandent le remboursement du coût du certificat médical de tutelle d'un montant de 160 euros : qu'il résulte de l'instruction que ce document est en lien de causalité direct avec les problèmes cognitifs de Marine à la suite du retard fautif mis à diagnostiquer sa phénylcétonurie ; qu'il y a ainsi lieu de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon le remboursement de cette somme aux parents de Marine ;
30. Considérant que les requérants soutiennent avoir eu à leur charge des frais de déplacement en voiture au titre de 27 déplacements à l'hôpital Édouard Herriot à Lyon et 330 séances à Chalon-sur-Saône au CASMP et CMPP, dans le cadre de la prise en charge médicale et rééducative de leur fille ; qu'ils produisent des justificatifs concernant des consultations médicales et séances de rééducation entre 1995 et 2006 compris ; qu'ils fournissent également des justificatifs sur la puissance fiscale des véhicules utilisés au cours de cette période ; que, compte tenu desdites puissances fiscales, une indemnisation sur la base d'un taux moyen de 0,5 euro du kilomètre n'apparaît pas surévaluée ; que, dès lors, le montant de tels frais de déplacement peut être évalué à une somme de 11 490 euros, comme le demandent les requérants ; qu'il résulte toutefois de l'instruction et en particulier de la quittance datée du 31 décembre 2007 signée par M. et Mme J...que la SHAM, assureur du centre hospitalier universitaire de Dijon, leur a versé, dans le cadre d'une démarche amiable, pour la période allant de 1995 à l'année 2006 incluse, une somme de 11 960 euros au titre de leurs frais de déplacement ; que, dès lors, M. et Mme J...ayant été de ce fait déjà indemnisés pour ce chef de préjudice, aucune somme complémentaire ne peut leur être allouée ;
31. Considérant que si l'indemnisation des frais d'assistance par une tierce personne ne peut intervenir qu'au profit de la victime, les proches de la victime qui lui apportent une assistance peuvent prétendre à être indemnisés par le responsable du dommage au titre des préjudices qu'ils subissent de ce fait ;
32. Considérant que, par arrêt du 19 avril 2005, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Lyon a accordé au titre de leurs préjudices moraux et troubles dans les conditions d'existence à chacun des parents de Marine une somme de 20 000 euros ; que la cour a rejeté la demande d'indemnisation de la mère de Marine en lien avec son licenciement, ce dernier résultant d'une inaptitude physique et n'ayant pas de lien avec la faute commise par le CHU de Dijon ; que la mère de Marine, qui ne fait plus état de préjudice en lien avec son licenciement, a demandé en 2013 au tribunal administratif de Dijon à être indemnisée d'un préjudice spécifique ayant résulté pour elle de l'impossibilité de reprendre à compter de 2004 une activité salariée en raison des contraintes liées aux soins, à la surveillance et à l'assistance quotidienne à apporter à Marine notamment dans le cadre de sa scolarisation à domicile ; qu'elle se prévaut d'un certificat médical mentionnant la possibilité physique de reprendre une activité salariée à temps plein à compter de 2004, des rapports d'expertise et de différents témoignages sur le rôle positif joué auprès de Marine dans le cadre de cet accompagnement notamment depuis 2007, date de scolarisation à domicile de Marine ; que, toutefois, Mme I...J..., qui ne fait pas état de recherches d'emplois à compter du certificat médical produit constatant en 2004 son aptitude physique à travailler, n'établit pas avoir dû renoncer, entre 2004 et la date du présent arrêt, à des offres sérieuses d'emploi à raison du handicap de Marine et des soins à lui apporter ; qu'elle ne peut dès lors prétendre à une indemnité au titre de la perte de revenus salariés ou au titre d'un préjudice de carrière ;
Sur l'appel incident du centre hospitalier universitaire de Dijon :
33. Considérant que les premiers juges ont, au point 13 de leur jugement, condamné le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser une somme de 8 000 euros à Mme A...J..., soeur de Marine, née le 19 mars 1997, et une somme de 8 000 euros à M. G... J..., frère de Marine, né en février 2001 ; que, comme le soutient le centre hospitalier universitaire de Dijon et dès lors que la naissance de Clara et de Pierre a eu lieu après l'apparition du dommage survenu à Marine, lequel a été diagnostiqué en 1995, il n'existe pas de lien direct entre le retard fautif commis par ledit centre hospitalier universitaire et les préjudices moraux et les troubles dans les conditions d'existence liés au handicap de Marine invoqués par sa soeur et son frère ; qu'il s'ensuit que le jugement du 22 janvier 2015 du tribunal administratif de Dijon doit être annulé en tant qu'il met à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon le versement d'une somme à Mme A...J...et à M. G...J...au titre de leurs préjudices propres ;
Sur l'appel incident de la CPAM :
34. Considérant que la CPAM de Côte d'Or ne demande pas une augmentation de la somme de 176 197,07 euros allouée en première instance mais sollicite seulement le versement des intérêts à compter du dépôt de ses conclusions indemnitaires devant le tribunal administratif de Dijon soit le 24 décembre 2014 ; que, toutefois, devant les premiers juges, la caisse a expressément conclu au versement des intérêts à compter du jugement ; que, dès lors, de telles conclusions doivent être regardées comme nouvelles en appel et par suite irrecevables ;
35. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts J...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a limité à 252 081,05 euros la somme leur étant due ; que le centre hospitalier universitaire de Dijon est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, il a été condamné à verser une somme de 8 000 euros à Mme A...J...et une somme de 8 000 euros à M.G... J... ; qu'il y a lieu de mettre à la charge dudit centre hospitalier une somme de 647 082 euros à verser à Mme E...J...sous déduction des provisions déjà versées d'un montant de 78 500 euros, et une somme de 27 479,83 euros à verser à M. et Mme J... et de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Dijon ; qu'à compter du 27 mars 2019, le centre hospitalier universitaire de Dijon devra verser à Mme E...J...une rente annuelle, payable en quatre trimestres échus, au titre de l'assistance par une tierce personne sur la base de 2 heures par jour, de 412 jours par an et d'un taux horaire de 14 euros ; que cette rente ainsi calculée à compter du 27 mars 2019 sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ; qu'il appartiendra à Mme E...J..., dans l'hypothèse où elle occuperait un emploi ou serait placée dans une institution ou hospitalisée, de fournir trimestriellement les justificatifs de ses jours de travail et d'hébergement dans une institution spécialisée ou un établissement hospitalier; que cette rente sera versée jusqu'au décès de Mme E...J...; que devront être déduites de cette rente les aides d'assistance par une tierce personne ayant le même objet, sauf celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune ; qu'il appartiendra à Mme E...J...de fournir au centre hospitalier universitaire de Dijon les justificatifs relatifs au volume horaire d'assistance par une tierce personne et aux aides perçues ayant le même objet à l'exception de celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune ;
Sur les frais d'expertise :
36. Considérant que les frais d'expertise pour un montant total liquidé et taxé de 3 300 euros doivent être mis à la charge définitive du centre hospitalier universitaire de Dijon ;
Sur les frais liés au litige :
37. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Dijon le versement d'une somme globale de 1 500 euros à Mme E...J...et à M. C...J...et Mme I...J..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter la demande formulée au titre de ce même article par la CPAM de Côte d'Or ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1400026 du 22 janvier 2015 du tribunal administratif de Dijon est annulé en tant qu'il condamne le centre hospitalier universitaire de Dijon à verser des sommes à Mme A...J...et M. G...J..., soeur et frère de MarineJ....
Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1400026 du 22 janvier 2015 du tribunal administratif de Dijon est réformé en ce qui concerne les sommes allouées à Marine J...et à M. C...J...et à Mme I...J.... Le centre hospitalier universitaire de Dijon versera une somme de 647 082 euros à Mme E...J...sous déduction des provisions déjà versées d'un montant de 78 500 euros. Le centre hospitalier universitaire de Dijon versera à Marine J...à compter du 27 mars 2019 une rente annuelle, payable en quatre trimestres échus, au titre de l'assistance par une tierce personne sur la base de 2 heures par jour, de 412 jours par an et d'un taux horaire de 14 euros. Cette rente sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. Il appartiendra, dans l'hypothèse où elle occuperait un emploi ou serait placée dans une institution ou hospitalisée, à Mme E... J...de fournir trimestriellement les justificatifs de ses jours de travail et d'hébergement dans une institution spécialisée ou un établissement hospitalier. Cette rente sera versée jusqu'au décès de Mme E...J.... Devront être déduites de cette rente les aides d'assistance par une tierce personne ayant le même objet, sauf celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune. Il appartiendra à Mme E...J...de fournir au centre hospitalier universitaire de Dijon les justificatifs relatifs au volume horaire d'assistance par une tierce personne et aux aides perçues ayant le même objet à l'exception de celles pour lesquelles une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune. Le centre hospitalier universitaire de Dijon versera une somme globale de 27 479,83 euros à M. C...J...et à Mme I...J....
Article 3 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or sont rejetées.
Article 4 : Les frais d'expertise pour un montant total liquidé et taxé de 3 300 euros sont mis à la charge définitive du centre hospitalier universitaire de Dijon.
Article 5 : Le centre hospitalier universitaire de Dijon versera une somme globale de 1 500 euros à Mme E...J...et à M. C...J...et Mme I...J...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...J..., Mme I...J..., Mme E...J..., Mme A...J..., au centre hospitalier universitaire de Dijon, à la caisse primaire d'assurance maladie de Saône et Loire et à la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or.
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 décembre 2018.
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N°° 15LY00673