Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 août 2017, Mme B...E..., représentée par Maître A...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 24 juillet 2017 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.
Elle soutient que :
- le préfet a commis une erreur de fait en considérant qu'à la date de sa décision elle ne travaillait pas et n'avait pas de projet professionnel ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
Par ordonnance du 30 juillet 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 août 2018.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Joseph Pommier.
1. Considérant que Mme E...épouseC..., ressortissante algérienne née le 20 novembre 1967, est entrée en France le 1er septembre 2015 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 13 février 2016 ; qu'elle a présenté le 17 septembre 2015 une demande de titre de séjour sur le fondement des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et a bénéficié, en qualité de conjoint de Français, d'un certificat de résidence valable du 17 septembre 2015 au 16 septembre 2016 ; que Mme E...a sollicité le 25 juillet 2016 le renouvellement de son titre de séjour ; que son époux est décédé le 16 octobre 2016 ; que, par un arrêté du 5 mai 2017, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme E... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Grenoble qui, par un jugement du 24 juillet 2017, a rejeté sa requête ; que Mme E...relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté litigieux, Mme E...ne travaillait pas et ne justifiait d'aucune promesse d'embauche ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté qu'elle n'avait nullement fait état d'une quelconque activité salariée dans sa demande de renouvellement de titre de séjour ; que si elle avait auparavant effectué quelques missions d'intérim de courte durée en qualité d'agent d'entretien, cette circonstance n'est pas de nature à faire regarder la mention de l'arrêté contesté selon laquelle Mme E..." ne travaille pas et ne fait valoir aucun projet professionnel " comme entachée d'une erreur de fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
4. Considérant que Mme E...soutient que plusieurs membres de sa famille, notamment trois de ses frères et soeurs, résident régulièrement sur le territoire français, qu'elle ne dispose plus de liens effectifs avec les membres de sa famille résidant encore dans son pays d'origine et que depuis le décès de son mari elle s'efforce de s'intégrer professionnellement en France ; que, toutefois, eu égard au caractère récent de son entrée en France et aux circonstances que Mme E...a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 47 ans, qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où résident sa mère ainsi que deux de ses frères, qu'elle y a également ses deux enfants nés d'un précédent mariage et dont elle n'établit pas qu'ils auraient coupé tout lien avec elle, l'arrêté litigieux ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, les circonstances que son époux soit décédé brutalement d'un accident cardiaque et qu'elle en a été très affectée, et qu'elle s'efforce de s'insérer professionnellement en France ne sont pas de nature à révéler une erreur manifeste dans l'appréciation faite par le préfet des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme E...;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les frais liés au litige :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse au conseil de Mme E...une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...E...veuve C...et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressé au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 novembre 2018.
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N° 17LY03231