Par jugement n° 1705973 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 31 janvier 2018, MmeD..., représentée par Me Borges de Deus Correia, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 13 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer de lui délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de certificat de résidence méconnaît les stipulations du 5 de l'article 7 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant refus de certificat de résidence est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation ;
- cette décision méconnait également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 27 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller,
- et les observations de Me Sergent, avocat, suppléant Me Borges de Deus Correia, avocat, pour MmeD...,
- et les observations de MmeD....
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., ressortissante algérienne née en 1972, est entrée régulièrement en Espagne le 4 août 2014, munie d'un passeport revêtu d'un visa court séjour, accompagnée de son enfant mineur. Elle indique être entrée en France le 12 août 2014 et s'y être maintenue irrégulièrement à l'expiration de son visa. Elle a sollicité, le 2 juin 2015, un certificat de résidence en se prévalant de sa vie privée et familiale en France. Par arrêté du 13 septembre 2017, le préfet de l'Isère, lui a refusé la délivrance de ce titre, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Mme D...relève appel du jugement du 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, Mme D...fait valoir qu'elle est entrée en France avec son fils Zacharia le 12 août 2014 et a repris fin 2016 une vie commune avec son ex-conjoint, M. B..., dont elle a divorcé le 10 novembre 1999 et qu'un retour en Algérie serait préjudiciable à son fils Zacharia lequel bénéficie d'un accompagnement en classe Ulis et est fragile émotionnellement. Elle fait également état de la circonstance que réside sur le territoire français sa fille Fetta, née également de son union avec M.B..., laquelle est entrée en France en juin 2012 dans le cadre d'un regroupement familial et dispose d'un certificat de résidence de 10 ans. Elle évoque aussi sa bonne intégration sociale à raison des liens noués dans le cadre associatif, et des possibilités d'emplois liés à une promesse d'embauche en qualité de coiffeuse en date du 16 mai 2017 et à son inscription en mai 2017 à un cours par correspondance préparant au " CAP petite enfance ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme D...a indiqué aux services préfectoraux avoir épousé en Algérie M.B..., un compatriote, le 23 mai 1994, qu'ils ont eu ensemble une fille Fetta née le 18 octobre 1995 et qu'ils ont divorcé le 10 novembre 1999, son ex-époux partant résider en France à compter de 2001. Elle a également mentionné que dans le cadre d'une nouvelle relation avec son ex-époux en 2007, est né en Algérie le 23 mars 2008 un second enfant Zacharia lequel porte le nom de son ex-conjoint. Toutefois, contrairement à ce qu'elle soutient, les pièces au dossier, dont la majorité ont été établies postérieurement à la décision de refus de certificat de résidence en litige, ne corroborent pas l'existence d'une vie maritale avec son ex-conjoint à compter de 2016. La circonstance qu'ils résident à la même adresse depuis mai ou fin août 2017 ne saurait démontrer en tant que telle l'existence d'une vie commune autre qu'une éventuelle cohabitation alors au demeurant que la requérante ne produit aucune pièce sur les liens qu'elle entretient avec son ex-conjoint, ni les liens que ce dernier entretient avec Zacharia que ce soit depuis sa naissance en 2008, ou depuis août 2014, date présumée de l'entrée de ce dernier en France. MmeD..., qui se borne à indiquer qu'elle a élevé en Algérie sa fille Fetta jusqu'à ses 12 ans, n'établit pas davantage la nature des liens avec cette dernière, majeure depuis 2014, laquelle demeure à Paris et où elle poursuivrait des études. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Zacharia entretienne des liens particuliers avec sa soeur et que ses fragilités comportementales, lesquels se traduisent essentiellement par un manque de précision dans la graphie et par un manque de concentration, et qui au demeurant avaient fortement diminué au 30 juin 2017, date de son bilan psychomoteur, soit antérieurement à la date de la décision attaquée du 13 septembre 2017, empêchent une scolarisation ou un suivi scolaire adapté en Algérie. Il est constant que Mme D...dispose de liens familiaux nombreux et stables en Algérie où elle a résidé jusqu'à l'âge de 42 ans, a obtenu un CAP de coiffure et où vivent notamment sa mère et ses sept frères et soeurs. Mme D...ne contredit pas utilement la possibilité, mentionnée par le préfet, existant pour son ex-conjoint de reprendre une vie privée et familiale avec elle en Algérie, pays dont il a la nationalité ou d'y séjourner avec elle et leur fils. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions de son séjour en France, la décision par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de délivrer un certificat de résidence à l'intéressée, n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus . Elle ne méconnaît ni les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause dès lors que l'intéressé relève des catégories d'étrangers ouvrant droit au regroupement familial,
4. En deuxième lieu, la requérante fait valoir que si Zacharia n'a pas vu fréquemment son père, résidant en France, pendant les six premières années de sa vie, il le voit plus régulièrement depuis trois ans et vit avec lui au quotidien depuis un an et qu'un retour en Algérie risque d'engendrer une séparation durable avec son père alors qu'il reste fragile émotionnellement.
5. Toutefois, et comme il a été dit au point 4, Mme D...ne justifie pas de la nature des liens entretenus entre Zacharia et son père depuis son entrée en France en août 2014 alors qu'elle reconnaît que cet enfant a vécu séparé de son père pendant six ans entre 2008 et 2014. Le refus de certificat de résidence, qui n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Zacharia de son père ni d'empêcher ce dernier de pourvoir à son éducation et à ses intérêts matériels, n'implique pas la séparation durable de la famille ni la rupture des liens affectifs entre Zacharia et son père. Il existe de plus, en l'espèce, des possibilités de visite et de reconstitution de la cellule familiale en Algérie, pays dont la requérante et son ex-conjoint, mais aussi Zacharia ont la nationalité. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les fragilités comportementales de Zacharia, telles qu'existantes à la date de l'arrêté en litige, soient telles qu'elles s'opposeraient à une scolarisation ou à un suivi éducatif adapté en Algérie en cas de retour de Zacharia en Algérie avec sa mère et imposeraient que cette scolarisation ou ce suivi se déroulent en France. Par suite, dans ces conditions, en refusant de délivrer le certificat de résidence sollicité et en faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de Zacharia protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. Pour les motifs qui ont été exposés aux points 3 et 5, le préfet de l'Isère n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée en refusant de l'admettre au séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées par son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Drouet, président de la formation de jugement,
Mme Cottier et MmeC..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 23 mai 2019.
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N° 18LY00410