- le secteur d'entraînement à très basse altitude opposé pour fonder l'arrêté attaqué est dépourvu de toute valeur légale et réglementaire et il ne serait être opposé aux tiers notamment dans le cadre de l'instruction d'une demande d'autorisation environnementale ; la commune de Ravières est située en dehors des zones de servitudes et contraintes techniques dans le schéma régional éolien Bourgogne ; le secteur SETBA ne fait l'objet d'aucune publication ni dans les publication d'information aéronautique du service d'information aéronautique ni sur les cartes aéronautiques et n'est ainsi pas opposable ; en se fondant sur l'avis du ministre des armées le préfet a entaché son arrêté d'une illégalité ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur d'appréciation dès lors que la part occupée par le projet éolien sur la superficie du SETBA AUBE est négligeable et représente pour les trois parcs éolien TVR n° 2, n° 3 et n° 4, une superficie de 0,05 % de cette zone ; il n'est pas démontré que la seule implantation d'un projet éolien au sein de ce secteur, à moins de 2,5 kilomètres de la bordure Sud, serait de nature à créer une contrainte préjudiciable à la sécurité des vols ; la localisation du projet, à moins de 2 kilomètres des limites des zones habitées de la commune de Ravière, se situe dans un secteur où l'entraînement tactique à moins de 150 mètres du sol n'est pas permis ; il appartient aux équipages de respecter les règles et devoirs de sécurité vis-à-vis des autres aéronefs, des personnes et des biens à la surface ; la carte aéronautique produite par le ministre est erronée et les risques induits par l'implantation du parc éolien ne sont pas démontrés.
Par mémoire enregistré le 30 août 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête de la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 4 juin 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'aviation civile ;
- le code de l'environnement ;
- l'arrêté du 10 octobre 1957 relatif au survol des agglomérations et des rassemblements de personnes ou d'animaux ;
- l'arrêté du 25 juillet 1990 relatif aux installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me A..., pour la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières ;
Considérant ce qui suit :
1. La société Parc Éolien des terres et vents de Ravières demande à la cour d'annuler l'arrêté n° PREF-SAPPIE-BE-2018-379 du 4 septembre 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande d'autorisation environnementale en vue d'exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Ravières, ensemble la décision du 18 décembre 2018 portant rejet de son recours gracieux.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 181-2 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : (...) 10° Autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité en application de l'article L. 311-1 du code de l'énergie (...) ". Aux termes de l'article L. 181-17 du même code : " Les décisions prises sur le fondement de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 181-9 et les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 181-32 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Lorsque la demande d'autorisation environnementale porte sur un projet d'installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, le préfet saisit pour avis conforme : 1° Le ministre chargé de l'aviation civile (...) ". Aux termes de l'article R. 181-34 du même code : " Le préfet est tenu de rejeter la demande d'autorisation environnementale dans les cas suivants : (...) 2° Lorsque l'avis de l'une des autorités ou de l'un des organismes consultés auquel il est fait obligation au préfet de se conformer est défavorable (...) ". Aux termes de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile : " À l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement en application du présent titre, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne est soumis à une autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté susvisé du 25 juillet 1990 : " Les installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des armées comprennent : a) En dehors des agglomérations, les installations dont la hauteur en un point quelconque est supérieure à 50 mètres au-dessus du niveau du sol (...) ". Enfin aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 10 octobre 1957 susvisé : " Sauf pour les besoins du décollage ou de l'atterrissage et des manoeuvres qui s'y rattachent, les aéronefs motopropulsés (...) doivent se maintenir à une hauteur minima au-dessus du sol définie comme suit : (...) B-Pour le survol de toute agglomération dont la largeur moyenne ne dépasse pas 1 200 mètres (...) : 500 mètres pour les aéronefs équipés d'un moteur à pistons ; / 1 000 mètres pour les aéronefs équipés de plusieurs moteurs à pistons ou d'une ou plusieurs turbomachines. C-Pour le survol de toute ville dont la largeur moyenne est comprise entre 1 200 et 3 600 mètres (...) : 1000 mètres pour tous les aéronefs motopropulsés (...) ".
4. En vertu de ces dispositions combinées, l'autorité administrative compétente pour délivrer une autorisation unique doit, lorsque la construction envisagée en dehors d'une agglomération est susceptible de constituer un obstacle à la navigation aérienne en raison de sa hauteur, saisir de la demande les ministres chargés de l'aviation civile et des armées afin de recueillir leur accord, de sorte que l'autorisation unique tienne lieu de l'autorisation prévue à l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile, et qu'à défaut d'accord de ces ministres légalement fondés sur les risques d'atteinte à la sécurité de la navigation aérienne, l'autorisation doit être refusée.
5. Il résulte de l'instruction que pour rejeter, lors de la phase d'examen, la demande d'autorisation environnementale présentée par la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières en vue d'exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Ravières, le préfet de l'Yonne s'est fondé sur l'avis défavorable de la direction de la sécurité aéronautique d'État du ministère des armées, émis le 7 août 2018, en raison de la localisation du projet dans un espace permanent (SETBA AUBE) dédié à l'entraînement au vol à très basse altitude, de jour à une hauteur inférieure à 150 mètres, exigeant une charge de travail très importante des équipages en raison de la proximité du sol, de la gestion de l'anti-abordage avec les autres usagers aériens et des trajectoires imposées par le déroulement tactique des missions, qu'ainsi, le projet serait préjudiciable à la sécurité des vols et la réalisation des missions des forces armées.
6. Toutefois, il résulte de l'instruction que les éoliennes E15, E16, E18 et E19 et le poste de livraison constituant le parc TVR n° 3 seront implantés à moins de deux kilomètres de la commune de Ravières, laquelle, en application des dispositions précitées et compte tenu de sa superficie, ne peut pas être survolée par un aéronef de combat à moins de 3 300 pieds soit 1 000 mètres sur un rayon de protection de deux kilomètres. Compte tenu de la distance du projet par rapport à la commune de Ravières et de l'impossibilité de survol à très basse altitude de la zone précitée, les éoliennes en litige ne sont pas susceptibles de constituer un obstacle à la navigation aérienne au sens des dispositions de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile. Par suite, le ministre des armées, en émettant un avis conforme défavorable à la demande d'autorisation unique déposée par la société requérante pour le parc TVR n° 3 a méconnu les dispositions précitées.
7. Il suit de là que la société requérante est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 2018 par lequel, le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande d'autorisation environnementale en vue d'exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Ravières, ensemble la décision du 18 décembre 2018 portant rejet de son recours gracieux.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Aux termes de l'article L. 181-9 du code de l'environnement : " L'instruction de la demande d'autorisation environnementale se déroule en trois phases : 1° Une phase d'examen ; 2° Une phase d'enquête publique ; 3° Une phase de décision. / Toutefois, l'autorité administrative compétente peut rejeter la demande à l'issue de la phase d'examen lorsque celle-ci fait apparaître que l'autorisation ne peut être accordée en l'état du dossier ou du projet (...) ".
9. En application de ces dispositions et compte tenu du motif d'annulation ainsi retenu, le présent arrêt implique nécessairement, au sens de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, que le préfet de l'Yonne reprenne l'instruction de la demande d'autorisation environnementale et, notamment, sollicite de nouveau un avis du ministre des armées purgé du vice censuré. Il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens et de lui impartir un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte.
Sur les frais du litige :
10. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'État, partie perdante, le versement d'une somme de 1 500 euros à la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières.
DÉCIDE :
Article 1er : L'arrêté n° PREF-SAPPIE-BE-2018-379 du 4 septembre 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a rejeté la demande d'autorisation environnementale de la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières en vue d'exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Ravières, ensemble la décision du 18 décembre 2018 portant rejet de son recours gracieux sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Yonne de poursuivre l'instruction de la demande d'autorisation environnementale dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parc Éolien des terres et vents de Ravières et au ministre de la transition écologique.
Copie sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.
N° 18LY04646