Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 décembre 2020 et 4 février 2021, M. et Mme C... et l'EARL Les Jardins de Nîmes, représentés par Me E..., demandent à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 15 décembre 2020 ;
2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Nîmes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que le juge des référés s'est mépris sur l'objet de sa saisine ; qu'ils ne sollicitent à aucun moment une contre-expertise ; que leur précédente demande, qui a fait l'objet de l'expertise confiée à M. F... qui a rendu son rapport le 13 février 2017 et du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 décembre 2019, ne portait que sur les pertes d'exploitation qu'ils avaient subies en 2015 et 2016 ; que cette expertise et ce jugement ne se sont prononcés ni sur les pertes d'exploitations subis postérieurement à cette période, ni sur le préjudice subi du fait du passage illégal sur les parcelles leur appartenant pour l'entretien des berges, ni sur le préjudice subi du fait de la destruction d'une passerelle et du non rétablissement d'un accès entre les parcelle cadastrée CP n° 158 et n° 160 entraînant pour eux l'impossibilité d'exploiter les parcelles CP n° 160 et 163 ; que leur demande n'avait pour objet que de déterminer ces préjudices ; qu'elle présente donc un caractère utile aux fins d'établir la réalité et l'évaluation de ces préjudices ; qu'il est, en particulier, nécessaire qu'un expert décrive les travaux à réaliser pour rétablir l'accès et en chiffrer le coût ; qu'ils sollicitent également de l'expert qu'il ait pour mission d'étudier la qualité des sols des parcelles cadastrés CT n° 13, 372 et 378 concernant l'assèchement du niveau de la nappe phréatique ; que le juge d'appel n'est pas saisi de ces nouvelles problématiques soulevées par le présent contentieux.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 11 et 21 janvier 2021, la commune de Nîmes, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la mesure d'expertise sollicitée ne présente aucune utilité dès lors qu'il s'agit, en réalité, d'une mesure de contre-expertise ne reposant sur aucun élément nouveau ; qu'elle porte sur des éléments déjà tranchés par le tribunal administratif ou par l'expert judiciaire ou déjà en possession des requérants ou qu'ils peuvent obtenir eux-mêmes ; qu'au surplus, il reviendra à la Cour de céans actuellement saisie au fond de décider, le cas échéant, dans l'exercice de ses pouvoirs de direction de l'instruction de désigner un nouvel expert.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.
2. M. et Mme C... ainsi que l'EARL Les Jardins de Nîmes ont saisi le tribunal administratif de Nîmes de deux requêtes, sous les n° 1703933 et 1803285, tendant à la condamnation de la commune de Nîmes à leur verser une indemnité de 126 619,77 euros en réparation de divers désordres affectant les parcelles dont ils sont propriétaires ou qu'ils exploitent, cadastrées CP n°s 158, 160 et 163 ainsi que CT n°s 370, 372, 374, 375, 377, 378 et 380, désordres qu'ils imputent aux travaux réalisés par la commune de Nîmes pour l'aménagement du cadereau du Valladas dans le cadre du plan de protection contre les inondations. Aux termes de ces requêtes, ils demandaient également au tribunal administratif d'enjoindre à la commune de Nîmes de rétablir le passage entre les parcelles CP n° 158 et n° 160. Par jugement du 20 décembre 2019, le tribunal administratif, en se fondant notamment sur le rapport d'une expertise ordonnée en référé le 9 juin 2016, déposé le 13 février 2017, a fait très partiellement droit à leurs conclusions et a condamné la commune de Nîmes à verser les sommes de 2 000 euros, 2 644,38 euros et 498,11 euros respectivement à Mme C..., à M. C... et à l'EARL Les Jardins de Nîmes, en réparation, en premier lieu, des pertes d'exploitation subies au cours des années 2015 à 2017, à raison, d'une part, de la perte d'une récolte sur la parcelle CT n° 374 et, d'autre part, de la perte de surface de production résultant de la configuration des berges du cadereau sur les parcelles CP n° 162 ainsi que CT n°s 370, 372, 374, 375, 377, 378 et 380 et, en second lieu, de leur préjudice moral tenant à l'absence de concertation sur les travaux qui ont été menés. Par une requête enregistrée devant la Cour sous le n° 20MA00808, M. et Mme C... ainsi que l'EARL Les Jardins de Nîmes ont relevé appel de ce jugement en tant que le surplus de leurs conclusions a été rejeté. Alors que l'instruction de leur requête d'appel était pendante devant la Cour, les requérants ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes de prescrire une seconde expertise aux fins de déterminer, de nouveau, les conséquences dommageables provoquées par l'aménagement du cadereau du Valladas. Par l'ordonnance attaquée du 15 décembre 2020, le juge des référés a refusé de faire droit à leur demande, au motif que la nouvelle mesure demandée " tend en définitive à faire prescrire, au seul motif que les conclusions de l'expert diligenté par l'ordonnance du 9 juin 2016 ne le satisfont pas, une contre-expertise sur les points déjà examinés par la juridiction du premier degré dont le jugement est pendant devant la cour administrative d'appel de Marseille " et que " dans ces conditions, il n'appartient pas au juge des référés d'ordonner une nouvelle mesure, qui en tout état de cause pourra être prescrite, s'il en était besoin, par le juge d'appel ".
3. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. S'il résulte de l'article R. 625-1 du code de justice administrative qu'il peut être fait application des dispositions de l'article R. 532-1, alors même qu'une requête au fond est en cours d'instruction, il appartient au juge des référés d'apprécier l'utilité de la mesure demandée sur ce fondement (cf. CE, 27.11.2014, n° 385843 et 385844).
4. Les requérants font valoir que les chefs de préjudice pour lesquels ils demandent le prononcé d'une nouvelle mesure d'expertise, soit les pertes d'exploitation subies postérieurement à 2016, les conséquences dommageables résultant, d'une part, de la suppression de l'accès entre les parcelles CP n° 158 et n° 160 et, d'autre part, du passage sur leurs parcelles de véhicules de la commune, auxquelles ils ont ajouté, en cours d'instance, les conséquences de l'assèchement des parcelles CT n° 372 et 378, sont distincts de ceux qui ont fait l'objet du jugement du tribunal administratif.
5. Toutefois, en premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 2, le tribunal administratif était explicitement saisi de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Nîmes de rétablir le passage entre les parcelles CP n° 158 et n° 160. Par ailleurs, il ressort du point 18 de ce jugement que le tribunal s'est également explicitement prononcé sur les conclusions des requérants portant sur l'accroissement des coûts de production afférents à la mise en culture des parcelles CT n°s 372 et 378 par comparaison avec la parcelle CT n° 13, qu'ils imputent à une baisse du niveau de la nappe phréatique consécutive aux travaux d'aménagement du cadereau. Sur ces deux points, les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que la mesure d'expertise qu'ils sollicitent serait utile dans la mesure où elle porterait sur des chefs de préjudice sur lesquels le tribunal administratif ne s'est pas prononcé. S'ils contestent le bien-fondé du rejet de leurs conclusions par le tribunal administratif sur ces deux points, il appartiendra à la cour administrative d'appel, saisie du jugement rendu par le tribunal administratif, d'apprécier, dans l'exercice de ses pouvoirs de direction de l'instruction, s'il y a lieu de diligenter une nouvelle mesure d'expertise.
6. En deuxième lieu, s'agissant des pertes d'exploitation postérieures à 2016, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le tribunal administratif était également saisi de conclusions portant sur l'année 2017. En tout état de cause, l'utilité d'une nouvelle mesure d'expertise portant sur l'évaluation des pertes d'exploitation pour les années ultérieures dépend désormais de la position qui sera prise par la cour administrative d'appel sur le principe et le mode de calcul d'une telle indemnisation au titre des années dont elle est saisie.
7. Enfin, si le chef de préjudice tenant au passage de véhicules sur la propriété des requérants peut être regardé comme n'ayant pas été soumis au tribunal administratif, le prononcé d'une mesure d'expertise aux seules fins de vérifier les accès au cadereau et de constater d'éventuels passages de véhicules ne paraît pas utile, dès lors que de telles constatations ne requièrent aucune investigation technique.
8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ainsi que l'EARL Les Jardins de Nîmes ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Nîmes qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge conjointe et solidaire de M. et Mme C... ainsi que de l'EARL Les Jardins de Nîmes la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Nîmes, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... et l'EARL Les Jardins de Nîmes est rejetée.
Article 2 : M. et Mme C... et l'EARL Les Jardins de Nîmes verseront conjointement et solidairement à la commune de Nîmes une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... C..., Mme B... C..., à l'EARL Les Jardins de Nîmes et à la commune de Nîmes.
Fait à Marseille, le 16 février 2021
N° 20MA048152
LH