Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mars 2021, la commune de Pontevès, représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 12 mars 2021 ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge des demandeurs de première instance la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la demande est irrecevable en tant qu'elle émane de l'association APNE Pontevès dès lors qu'il n'est pas justifié que les représentants légaux de cette association aient été dûment habilités pour engager une telle action ; que la mesure d'expertise ne présente aucune utilité dès lors qu'une expertise a déjà été prescrite, à sa demande, par ordonnance du 20 novembre 2017, aux fins de faire toute la clarté sur les dysfonctionnements affectant la station d'épuration et qu'un rapport d'expertise a déjà été déposé ; que, contrairement à ce qu'indiquent les requérants, ces dysfonctionnements ne sont pas de nature à occasionner des gênes dès lors que la société SADE qui a procédé à la construction de la station d'épuration s'était engagée sur des bases beaucoup plus contraignantes que la réglementation en vigueur ; que les requérants n'apportent aucun commencement de preuve des préjudices qu'ils allèguent ; que la nouvelle station construite a eu pour effet de diminuer sensiblement les nuisances occasionnées ; que l'association est une personne morale qui ne subit pas à proprement parler de préjudice ; que la parcelle de Mme C... ne supporte aucune construction et cette dernière ne subit donc pas de préjudice ; que les époux A... et les époux I... ont acheté leur terrain en toute connaissance de cause, à proximité de l'ancienne station d'épuration ; qu'il est inexact de soutenir qu'elle ne disposerait pas d'un droit de passage ou que les canalisations enterrées occasionneraient un préjudice.
Par un mémoire, enregistré le 14 avril 2021, l'APNE Pontevès, M. E... et Mme G... A..., M. J... et Mme L... I... ainsi que Mme D... C..., représentés par Me H..., concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Pontevès, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que le conseil d'administration de l'APNE Pontevès a habilité son président à ester en justice conformément aux statuts de l'association ; que, prise isolément l'expertise ordonnée à la demande de la commune, dans le cadre du litige l'opposant à la société SADE, à laquelle ils n'étaient pas parties, ne leur est d'aucune utilité s'agissant de leur situation propre ; qu'il est manifeste que l'implantation illégale de la station d'épuration et son fonctionnement défectueux sont susceptibles de leur causer des préjudices ; que la personnalité morale de l'APNE n'exclut pas un éventuel préjudice moral ; que la circonstance qu'aucune construction ne soit édifiée sur le terrain de Mme C... n'exclut pas un préjudice de jouissance et l'existence d'une moins-value ; que la construction de M. et Mme A... a été édifiée avant la construction de la première station d'épuration ; que la commune ne produit aucun titre de propriété de la parcelle N 474 qui permet l'accès à la station et dans le tréfonds de laquelle passent des canalisations.
La requête a également été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.
2. Par l'ordonnance attaquée du 12 mars 2021, le juge des référés a, à la demande de l'Association pour la protection de la nature, de l'environnement et du cadre de vie de Pontevès (APNE Pontevès), de M. et Mme A..., de M. et Mme I... ainsi que de Mme C..., confié à M. B... K... le soin de réaliser une expertise aux fins notamment de constater, " à l'appui " du rapport d'expertise judiciaire déposé en exécution de l'ordonnance de référé n° 1702592 du 20 novembre 2017, les désordres affectant la station d'épuration autonome de la commune de Pontevès, de mesurer précisément l'empiètement des canalisations sur la parcelle cadastrée section N 894 et d'apprécier l'étendue des préjudices de toute nature subis par les requérants en conséquence de ces désordres. La commune de Pontevès relève appel de cette ordonnance en soutenant que cette mesure d'expertise ne présente pas de caractère d'utilité, au sens de l'article R. 532-1 du code de justice administrative.
Sur la recevabilité de la demande de première instance en tant qu'elle émane de l'APNE Pontevès :
3. Aux termes de l'article 9 des statuts de l'association APNE Pontevès : " Le président représente (...) notamment l'association en justice (...) La décision d'ester en justice et de défendre, contre toute action en justice intentée contre l'association, est du ressort du conseil d'administration ".
4. Il ressort du procès-verbal du conseil d'administration du 2 novembre 2018 que les cinq administrateurs présents ont donné au président E... A... " le pouvoir d'engager l'Association APNE dans une procédure de fond et un référé expertise concernant la station d'épuration de Pontevès ". Par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que le président de l'association n'avait pas qualité pour former, au nom de celle-ci, une requête en référé.
Sur l'utilité de la mesure d'expertise ordonnée :
5. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514).
6. En premier lieu, la circonstance que, par l'ordonnance n° 1702592 du 20 novembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon avait, à la demande de la commune de Pontevès, déjà confié à M. B... K... le soin de réaliser une expertise aux fins notamment de procéder à la constatation des désordres affectant la station d'épuration ne prive pas d'utilité la mesure d'expertise litigieuse, dès lors que cette première expertise a été exclusivement réalisée dans la perspective du litige qui oppose la commune à l'entreprise titulaire du marché de construction de ladite station et n'avait pas pour objet de rechercher et d'évaluer les nuisances subies par des tiers, tels que les demandeurs de première instance qui n'étaient, du reste, pas présents à ces premières opérations d'expertise. Au demeurant, le juge des référés a pris soin de confier cette seconde expertise au même expert et d'indiquer expressément qu'il lui appartenait de prendre appui sur le rapport d'expertise déposé dans le cadre de l'instance n° 1702592, afin d'éviter la réitération d'investigations déjà conduites.
7. En deuxième lieu, les opérations d'expertise ayant précisément pour objet de constater et d'évaluer les nuisances subis par les demandeurs de première instance, il ne saurait leur être fait grief de ne pas établir la réalité de ces nuisances, dès lors que celles-ci n'apparaissent pas manifestement improbables, eu égard à la nature de l'installation litigieuse et alors, au surplus, que l'action à laquelle se rattache cette mesure d'expertise est susceptible d'être fondée, selon eux, non seulement sur d'éventuels dysfonctionnements de la station d'épuration mais également sur l'illégalité même de son implantation. Ni la circonstance que l'APNE qui a pour objet notamment " la sauvegarde et la défense de la nature, de l'environnement et du cadre de vie sur la commune de Pontevès " soit une personne morale, ni la circonstance que la parcelle dont Mme C... est propriétaire ne soit pas construite ne sont de nature à établir que la mesure d'expertise est nécessairement dépourvue de toute utilité à leur égard. De même, si la commune fait valoir que certains des demandeurs de première instance auraient acquis leurs terrains, en connaissance du voisinage d'une station d'épuration, toute indemnisation des nuisances qu'ils subiraient n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et au regard de l'office du juge des référés, manifestement exclue.
8. En troisième lieu, les débats qui opposent les parties sur cette question justifient également l'utilité de l'expertise en tant qu'il est demandé à l'expert de " mesurer précisément l'empiètement des canalisations sur la parcelle cadastrée section N 894 ".
9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Pontevès n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif a fait droit à la demande de l'APNE Pontevès, de M. et Mme A..., de M. et Mme I... ainsi que de Mme C... tendant au prononcé d'une mesure d'expertise.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge des demandeurs de première instance qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Pontevès la somme de 1 500 euros à verser à l'APNE Pontevès, à M. et Mme A..., à M. et Mme I... ainsi qu'à Mme C..., au titre des mêmes dispositions.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de la commune de Pontevès est rejetée.
Article 2 : La commune versera à l'APNE Pontevès, à M. et Mme A..., à M. et Mme I... ainsi qu'à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Pontevès, à l'Association pour la protection de la nature, de l'environnement et du cadre de vie de Pontevès (APNE Pontevès), à M. E... et Mme G... A..., à M. J... et Mme L... I..., à Mme D... C... ainsi qu'à M. B... K..., expert.
Fait à Marseille, le 18 mai 2021
N° 21MA012355
LH