Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 novembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Frayssinet, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 novembre 2021 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 21 juin 2021 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut d'enjoindre à la préfète du Gard de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la préfète s'est crue liée par l'avis du collège de médecins pour refuser la délivrance d'un titre de séjour ;
- eu égard notamment à son isolement au Gabon, aux manifestations imprévisibles de sa pathologie et aux risques encourus pour voyager vers ce pays, cette décision méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant refus d'admission au séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Par des mémoires en défense enregistrés le 30 novembre 2021 et le 27 janvier 2022, la préfète du Gard conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.
Un mémoire enregistré le 4 février 2022, présenté pour M. A... B..., n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. d'Izarn de Villefort a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant gabonais, a sollicité l'attribution d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 21 juin 2021, la préfète du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. L'intéressé relève appel du jugement du 5 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...). ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...). ".
3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été pris au vu, notamment de l'avis du collège de médecins, lequel a estimé, le 1er juin 2021, que si l'état de sante´ de M. A... B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravite´, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dont l'intéressé est originaire, il pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, son état de santé lui permettant par ailleurs de voyager sans risque vers son pays d'origine.
4. M. A... B..., né le 12 avril 1995, qui a vécu dans son pays d'origine jusqu'à son entrée en France en décembre 2020, est atteint depuis ses six mois de drépanocytose de type SS qui s'accompagne de crises vaso-occlusives deux à trois fois par an, et qui est responsable de douleurs essentiellement osseuses, localisées aux hanches et aux épaules, et d'un état de grande fatigue. Il souffre à ce titre d'une ostéonécrose et est porteur d'une prothèse de hanche, outre d'accès palustres et d'une anémie. La préfète du Gard démontre que le traitement de la drépanocytose par l'Hydrea est commercialisé et remboursé après accord préalable au Gabon. Si, selon le certificat médical du 18 novembre 2021, le requérant doit bénéficier de l'accompagnement d'une tierce personne surtout en cas de crise vaso-occlusive et, en raison d'une intervention pour ostéite tuberculeuse du genou gauche effectuée en octobre 2021, lors de ses déplacements, il ne démontre pas, en dépit du caractère soudain de ces crises, que l'assistance quotidienne d'une tierce personne lui est indispensable et que seuls sa mère et son beau-père qui l'hébergent pourraient assurer cette assistance. Les certificats médicaux du 18 novembre 2021 et 21 novembre 2021 indiquent seulement que l'association de plusieurs complications rend le voyage en avion difficile ou risqué, notamment en raison d'une tuberculose pulmonaire et ganglionnaire dont il n'est pas établi ni même allégué qu'elle s'est déclarée antérieurement à l'arrêté attaqué. Par suite, si l'apparition de cette maladie, associée à la drépanocytose et son caractère contagieux sont susceptibles de faire obstacle à l'exécution de l'arrêté litigieux, elle ne peut être utilement invoquée pour établir que M. A... B... ne pouvait voyager sans risques vers son pays d'origine à la date de la décision attaquée. Dans ces conditions, le préfet, qui ne s'est pas considéré lié par l'avis du collège de médecins, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant d'autoriser le séjour du requérant en qualité d'étranger malade et n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de l'intéressé.
5. M. A... B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de ce que la décision portant refus d'admission au séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nîmes.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté se demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Gard.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2022.
Le rapporteur,
Signé
P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président,
signé
G. CHAZAN
La greffière,
signé
P. RANVIER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 21MA04449
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