Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2018, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 avril 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et une autorisation provisoire de séjour et, à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- les pièces produites par le préfet de l'Hérault qui n'étaient pas répertoriées conformément aux prescriptions de l'article R. 611-8-2 alinéa 5 du code de justice administrative auraient dû être écartées des débats ;
- le refus de séjour est entaché d'erreur de fait ;
- le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la mesure d'éloignement est insuffisamment motivée en application de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de l'Hérault qui n'a pas produit d'observations en défense.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gougot.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 5 septembre 2017, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 2 août 2016, M.C..., ressortissant iranien, en qualité d'" entrepreneur-profession libérale " et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. C...interjette appel du jugement du 12 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la recevabilité des écritures en défense de première instance :
2. Aux termes de l'article R. 412-2 du code de justice administrative : " Lorsque les parties joignent des pièces à l'appui de leurs requêtes et mémoires, elles en établissent simultanément un inventaire détaillé...". L'article R. 414-1 du même code dispose : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat [...] la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. La même obligation est applicable aux autres mémoires du requérant... ". Aux termes des dispositions de l'article R. 414-3 du même code, dans leur rédaction applicable au litige : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1 et R. 412-2, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et des pièces qui sont jointes à celle-ci et à leurs mémoires. / Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. / Les mêmes obligations sont applicables aux autres mémoires du requérant, sous peine pour celui-ci, après invitation à régulariser non suivie d'effet, de voir ses écritures écartées des débats. / Si les caractéristiques de certaines pièces font obstacle à leur communication par voie électronique, ces pièces sont transmises sur support papier, dans les conditions prévues par l'article R. 412-2. L'inventaire des pièces transmis par voie électronique en fait mention. ". Ces dispositions organisent la transmission par voie électronique des pièces jointes à la requête à partir de leur inventaire détaillé. Cet inventaire doit s'entendre comme une présentation exhaustive des pièces par un intitulé comprenant, pour chacune d'elles, un numéro dans un ordre continu et croissant ainsi qu'un libellé suffisamment explicite. Ces dispositions imposent également, eu égard à leur finalité, de désigner chaque pièce dans l'application Télérecours au moins par le numéro d'ordre qui lui est attribué par l'inventaire détaillé, que ce soit dans l'intitulé du signet la répertoriant dans le cas de son intégration dans un fichier unique global comprenant plusieurs pièces ou dans l'intitulé du fichier qui lui est consacré dans le cas où celui-ci ne comprend qu'une seule pièce. Dès lors, la présentation des pièces jointes est conforme à leur inventaire détaillé lorsque l'intitulé de chaque signet au sein d'un fichier unique global ou de chaque fichier comprenant une seule pièce comporte au moins le même numéro d'ordre que celui affecté à la pièce par l'inventaire détaillé. En cas de méconnaissance de ces prescriptions, la requête est irrecevable si le requérant n'a pas donné suite à l'invitation à régulariser que la juridiction doit, en ce cas, lui adresser par un document indiquant précisément les modalités de régularisation de la requête.
3. Il résulte de ce qui précède que chaque pièce jointe ou chaque signet en cas de fichier global n'a pas à être désigné en reprenant les libellés de l'inventaire détaillé. Le requérant ne peut donc utilement soutenir que le mémoire en défense du préfet en première instance aurait dû être écarté des débats au motif que le défendeur avait produit un fichier comprenant l'intégralité des pièces assorties seulement de leurs numéros et non de leur intitulé propre.
Sur le refus de séjour :
4. En premier lieu, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté par adoption des motifs retenu à bon droit par le tribunal et qui n'appellent pas de précision en appel.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance... ". Il ressort des pièces du dossier que M. C...est père de deux enfants français nés le 5 juin 2008 et le 28 février 2011 qui vivent chez leur mère, dont il est divorcé depuis le 5 novembre 2012. Le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Montpellier a, par un jugement du 5 novembre 2012, prononcé le divorce des époux aux torts de M.C..., le juge ayant constaté des faits de violence de sa part. M. C...a été condamné le 7 novembre 2012 à deux mois d'emprisonnement avec sursis pour menace de mort réitérée et dégradation d'un bien d'autrui. Si l'autorité parentale a été accordée aux deux parents sans droit de visite du père, ce dernier n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants à hauteur de ses facultés contributives alors que le juge a fixé à 300 euros cette contribution mensuelle. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant exercerait effectivement les prérogatives attachées à son autorité parentale dès lors qu'il ne justifie ni qu'il s'implique dans la vie de ses enfants ni qu'il participe à leur éducation. Si M. C...soutient que leur mère fait obstacle a l'exercice de ses droits et devoirs de père, le témoignage du frère de celle-ci n'est pas suffisant pour établir cet empêchement, faute pour le requérant de justifier de toute démarche auprès d'elle ou auprès du juge aux affaires familiales afin de le rétablir dans ses droits parentaux. Par ailleurs M. C...ne justifie ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. S'il a effectué des démarches professionnelles et a notamment bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'artisan valable du 28 août 2014 au 27 août 2015, il ne justifie toutefois pas à la date de la décision attaquée d'une insertion socio-professionnelle suffisante en se bornant à se prévaloir d'un contrat de travail à durée déterminée d'insertion pour un emploi à temps partiel. Il ressort au contraire d'une fiche Pôle Emploi du 27 juin 2017 qu'il rencontre des difficultés d'insertion. Par ailleurs la circonstance qu'il encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine compte tenu du fait qu'il n'a pas effectué son service militaire en Iran et est tatoué demeure sans incidence sur la légalité du refus de séjour. Ainsi en dépit de la durée de son séjour en France, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, au regard des buts poursuivis par l'administration, et méconnaîtrait ainsi les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
Sur la mesure d'éloignement :
6. En premier lieu, le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, la motivation des mesures d'éloignement étant organisée par des dispositions spécifiques. En effet, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " ...La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. ". Par l'arrêté attaqué, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par M. C...et a suffisamment motivé cette décision, qui comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. En vertu des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Il y a lieu, dès lors, d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision.
7. En deuxième lieu, les moyens tirés de ce que la mesure d'éloignement aurait porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5. Et la circonstance que M. C...encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine, compte tenu du fait qu'il n'a pas effectué son service militaire en Iran et est tatoué, demeure sans incidence sur la légalité de la mesure d'éloignement.
8. En troisième lieu, l'erreur de fait alléguée sur la nature du contrat de travail dont se prévaut l'intéressé, à la supposer même établie, emporterait seulement des conséquences sur l'admission au séjour mais demeure en elle-même sans incidence sur la mesure d'éloignement.
Sur la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :
9. Si M. C...soutient qu'il ne pourrait pas mener une vie privée et familiale normale en Iran au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif qu'il serait non pratiquant, qu'il est tatoué et qu'il n'aurait pas effectué son service militaire, il ne l'établit pas en se bornant à renvoyer, d'une part au lien d'un site internet canadien, dont on ignore le caractère officiel et les sources précises, selon lequel les ressortissants iraniens qui refusent d'accomplir leur service militaire ne peuvent pas obtenir de passeport et pourraient se voir refuser un permis de conduire, et d'autre part à un site d'informations générales " cnews ".
10. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 5 septembre 2017. Et doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Gougot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
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N° 18MA04242