Procédure devant la cour :
Par une décision n° 423804 du 5 novembre 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour n° 17MA03018 du 3 juillet 2018 statuant sur l'appel formée par Mme A... à l'encontre du jugement du 15 mai 2017, a rejeté ses conclusions tendant au versement d'une indemnité de précarité et a renvoyé devant la cour le surplus de ses conclusions.
Par une requête, des mémoires et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 12 juillet, 16 novembre 2017, 15 mai 2018, 18 décembre 2020 et 12 février 2021, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 mai 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 18 mars 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier Edouard Toulouse a refusé de renouveler son contrat de praticienne hospitalière attachée arrivant à échéance le 1er mai 2015 ;
3°) de condamner le centre hospitalier Edouard Toulouse à lui verser la somme de 7 500 euros en réparation des préjudices résultant de cette décision ;
4°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier Edouard Toulouse de renouveler son engagement, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier Edouard Toulouse la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- cette décision, prise en considération de sa personne, est intervenue avant qu'elle n'ait été en mesure de prendre connaissance de son dossier et de présenter des observations ;
- elle n'a pas été informée de son droit d'être assistée par un défenseur ;
- la décision contestée repose sur des faits inexacts ;
- eu égard à la circonstance que la majeure partie des agissements qui lui sont reprochés se sont produits dans le cadre de son activité libérale, de sorte que l'intérêt du service ne justifie pas qu'elle cesse ses fonctions au sein du centre hospitalier Edouard Toulouse, et à ses qualités professionnelles, la décision litigieuse est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il sera fait une juste réparation du préjudice financier, des troubles dans les conditions d'existence et du retentissement psychologique résultant de cette décision en lui allouant la somme globale de 7 500 euros.
Par des mémoires en défense enregistrés les 17 octobre 2017, 17 avril 2018, 1er décembre 2020 et 4 mars 2021, le centre hospitalier Edouard Toulouse conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi du 22 avril 1905 et notamment son article 65 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
- et les observations de Me B..., représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., a été recrutée par le centre hospitalier Edouard Toulouse (Marseille) en qualité de psychothérapeute à compter du 1er août 2013, pour une durée de trois mois renouvelée à six reprises, en dernier lieu jusqu'au 1er mai 2015. Par un jugement n° 1507519 du 15 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 18 mars 2015 par laquelle le directeur de l'établissement a refusé de prolonger une nouvelle fois son engagement. Par une décision n° 423804 du 5 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour n° 17MA03018 du 3 juillet 2018 rejetant l'appel formé par Mme A... contre ce jugement et a renvoyé l'affaire à la cour.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non renouvellement du contrat soit légalement prise.
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'alors même qu'elle est fondée sur des agissements susceptibles de justifier une sanction disciplinaire, la décision contestée a été prise dans l'intérêt du service et ne présente pas le caractère d'une sanction déguisée.
4. En deuxième lieu, une décision de non renouvellement à son terme d'un contrat à durée déterminée d'un agent public, même prise pour des considérations tenant à la personne de l'agent susceptibles de justifier une sanction disciplinaire, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées.
5. En troisième lieu, lorsque la décision de non renouvellement d'un contrat à durée déterminée est prise au regard de considérations tenant à la personne de l'agent susceptibles de justifier une sanction disciplinaire, l'intéressé doit alors été mis à même de faire valoir ses observations et de demander communication de son dossier administratif, conformément aux dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905.
6. Il ressort des pièces du dossier que le centre hospitalier Edouard Toulouse a reçu le 19 janvier 2015 en entretien les deux patients ayant signalé au mois de décembre 2014 des manquements de Mme A... à ses obligations déontologiques. La requérante soutient, sans être contestée, que le compte-rendu de cet entretien ne figurait pas parmi les pièces du dossier dont elle a pris connaissance le 2 février 2015 et qu'elle ne l'a découvert qu'à l'occasion de l'instance devant le tribunal administratif. Toutefois, si ce compte-rendu reprenait de manière exhaustive les griefs sur lesquels est fondée la décision contestée, Mme A... ne pouvait ignorer la teneur exacte des faits qui lui étaient reprochés dès lors que ces griefs ont été exprimés avec précision dans d'autres pièces figurant dans le dossier dont elle a pu prendre connaissance, notamment dans un courrier du 16 décembre 2014 rédigé par l'un des deux patients entendus au cours de l'entretien du 19 janvier 2015. Du reste, Mme A... a effectivement présenté des observations écrites par courriers des 4 et 23 février 2015, ainsi qu'elle y avait été invitée par courrier du 20 janvier 2015, sur les faits qui lui étaient ainsi reprochés. En outre, un entretien, auquel elle a refusé de se rendre, a été organisé par sa hiérarchie dans le but de recueillir ses observations orales. Ainsi, si la requérante est fondée à soutenir qu'une pièce avait été omise du dossier qui lui a été communiqué, cette irrégularité, dans les circonstances de l'espèce, ne l'a pas privée d'une garantie et n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision prise le directeur de l'établissement. Il s'ensuit que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que cette irrégularité est de nature à entacher d'illégalité la décision prise par le directeur de l'établissement.
7. En quatrième lieu, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe n'impose que l'agent public dont le contrat à durée déterminée n'est pas renouvelé soit informé de son droit d'être assisté par un défenseur, quand bien même la décision est prise au regard de considérations tenant à la personne de l'agent susceptibles de justifier une sanction disciplinaire. Mme A... ne peut donc utilement soutenir qu'elle n'a pas été informée de son droit d'être assistée.
8. En dernier lieu, le non renouvellement du contrat à durée déterminée de Mme A... a été motivé par la circonstance qu'elle avait sollicité et obtenu de deux de ses patients, au sein du centre hospitalier Edouard Toulouse, le versement d'honoraires en contrepartie de la promesse qu'elle n'a, au demeurant pas tenue, de leur apporter une assistance juridique et administrative auprès des juridictions sociales. Contrairement à ce que soutient la requérante, la matérialité de ces faits est établie par les pièces du dossier et elle a, du reste, été condamnée, pour ces motifs, à une peine de trois mois de suspension dont deux mois avec sursis, par une décision du 14 novembre 2018, devenue définitive, de la chambre nationale de discipline de l'ordre des médecins. La requérante ne peut contester utilement le manquement aux obligations déontologiques qui s'imposaient à elle dans le cadre de l'exercice de ses missions de service public, en se bornant à soutenir qu'elle n'aurait ainsi fait qu'orienter ses patients vers un suivi dans le cadre de son activité libérale. Le directeur du centre hospitalier Edouard Toulouse a pu, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, estimer que ces manquements de Mme A... à ses obligations professionnelles justifiaient, dans l'intérêt du service, le refus de renouveler son contrat, quand bien même ses qualités professionnelles avaient été précédemment reconnues. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de non-renouvellement de son contrat à durée déterminée du 18 mars 2015.
Sur les conclusions indemnitaires et les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :
10. Il résulte de ce qui précède que la décision par laquelle le directeur du centre hospitalier Edouard Toulouse a refusé de renouveler le contrat à durée déterminée de Mme A... ne peut être tenue pour illégale. Par suite, ses conclusions à fin d'indemnisation fondées sur l'illégalité de cette décision doivent donc être rejetées.
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Edouard Toulouse, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que présente cet établissement sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Edouard Toulouse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au centre hospitalier Edouard Toulouse.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2021, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la cour,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente assesseure,
- M. C..., conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2021.
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N° 20MA04164