Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 janvier 2018, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 3 mars 2015 ;
3°) de condamner le CHRU de Montpellier à lui verser la somme de 84 285 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;
4°) de mettre à la charge du CHRU de Montpellier la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la légalité de la décision du 3 mars 2015 :
- le comité médicals'est prononcé d'office sur sa mise en disponibilité, de sorte qu'elle a été privée de la possibilité de formuler des observations sur ce point ;
- pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 29 du décret du 13 octobre 1988, les premiers juges se sont fondés sur des éléments de fait postérieurs à la date de la décision contestée dès lors qu'à cette date, aucune proposition de reclassement ne lui avait été faite et aucune inaptitude définitive n'avait été constatée ;
En ce qui concerne les indemnités qu'elle demande :
- les illégalités qui entachent la décision du 3 mars 2015 engagent la responsabilité du CHRU de Montpellier à son égard ;
- cet établissement a également manqué à l'obligation qui lui incombait de lui proposer un poste de reclassement, alors même qu'elle n'avait jamais formalisé de demande tendant à sa réintégration ;
- son préjudice financier consécutif à la diminution de son traitement s'élève à 52 785 euros ;
- elle justifie également d'un préjudice financier en lien avec la diminution de ses droits à pension, à hauteur de 16 500 euros ;
- elle est en droit d'obtenir le versement d'une somme de 15 000 euros au titre de son préjudice moral.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 octobre 2018, le CHRU de Montpellier, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, les conclusions à fin d'annulation présentées devant le tribunal étaient tardives ;
- aucune réintégration n'étant possible, il n'était pas tenu de rechercher un poste de reclassement pour Mme C....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 88-386 du 13 octobre 1988 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la cour a désigné Mme F..., présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant le CHRU de Montpellier.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., qui exerçait les fonctions de puéricultrice au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Montpellier, a été victime d'un accident sur le trajet de son travail le 5 septembre 2013. Par un avis du 19 février 2015, le comité médical, saisi à la demande de l'intéressée, a émis un avis défavorable à l'octroi d'un congé de longue maladie et favorable à son placement en position de disponibilité d'office. Mme C... relève appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 3 mars 2015 la plaçant en disponibilité d'office à compter du 25 décembre 2014, et, d'autre part, à l'indemnisation des préjudices qui ont résulté, selon elle, de cette dernière décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande présentée devant le tribunal :
2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors en vigueur : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". L'article R. 421-5 du même code dispose que : " Les délais de recours contentieux contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
3. A supposer que Mme C... ait effectivement reçu notification de la décision contestée du 3 mars 2015 plus de deux mois avant de saisir le tribunal, il résulte des mentions qui sont portées sur celle-ci que seul le délai de recours était indiqué, sans aucune précision en ce qui concerne les modalités de la contestation et notamment, la juridiction compétente pour en connaître. Cette incomplète indication des voies et délais de recours est de nature à faire obstacle au déclenchement du délai dont Mme C... disposait pour contester cette décision. Le CHRU de Montpellier n'est dès lors pas fondé à soutenir que la demande présentée devant le tribunal contre cette décision était irrecevable en raison de sa prétendue tardiveté.
En ce qui concerne la légalité de la décision du 3 mars 2015 :
4. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". En outre, l'article 29 du décret du 13 octobre 1988 dispose que " La mise en disponibilité d'office prévue à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée ne peut être prononcée que s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues par la section 3 du chapitre V de cette loi ".
5. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un fonctionnaire a été, à l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement, et alors que le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement. La mise en disponibilité d'office peut ensuite être prononcée, soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite.
6. Il ressort des pièces du dossier que par son avis du 19 février 2015, le comité médical s'est borné à préconiser le prolongement du congé maladie ordinaire de Mme C... jusqu'au 24 décembre 2014 et sa mise en disponibilité d'office à compter de cette date, sans se prononcer sur sa capacité à exercer un autre emploi. Dans ces conditions, Mme C... est fondée à soutenir qu'en s'estimant tenu de prononcer sa disponibilité d'office le directeur du CHRU de Montpellier l'a privée de la possibilité d'exercer son droit à reclassement et a entaché la décision contestée du 3 mars 2015 d'une erreur de droit.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de légalité de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 2015 par laquelle le directeur du CHRU de Montpellier l'a placée en disponibilité d'office.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
8. L'illégalité de la décision du 3 mars 2015 constitue une faute de nature à engager la responsabilité du CHRU de Montpellier. En revanche, Mme C... ne rattache exclusivement aucun des préjudices dont elle demande réparation à l'autre faute de cet établissement qu'elle invoque.
9. Mme C... soutient qu'elle a subi un préjudice financier du fait de son placement en disponibilité d'office, résultant de la perte de son plein traitement et de ses répercussions sur ses droits à la retraite. Lorsque l'administration n'a procédé à aucune recherche de reclassement avant de placer d'office l'agent en situation de disponibilité, il convient pour le juge de rechercher si cette carence de l'administration a été de nature à faire perdre à l'intéressé une chance sérieuse de reclassement dans un autre emploi. Il ne résulte pas de l'instruction que la requérante aurait effectivement pu bénéficier d'un reclassement sur la période courant à compter du 3 mars 2015, alors au demeurant qu'elle n'avait sollicité, à cette date, qu'un congé de longue maladie avant une reprise sur un poste à mi-temps thérapeutique. Dès lors, le préjudice financier dont il est fait état ne présente pas un caractère certain.
10. Par ailleurs, Mme C... attribue l'existence d'un préjudice moral aux expertises diligentées par le centre hospitalier afin, selon elle, de repousser la date de son reclassement. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que ces démarches auraient revêtu un caractère frustratoire. Au demeurant, l'intéressée a elle-même sollicité de nouveaux avis médicaux à la suite de celui émis le 19 février 2019 par le comité médical. Dans ces conditions, elle n'est fondée à solliciter aucune indemnisation à ce titre.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont, par le jugement attaqué, rejeté ses conclusions tendant à l'indemnisation de ses préjudices.
Sur les frais liés au litige :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2017, en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C..., et la décision du directeur du CHRU de Montpellier du 3 mars 2015 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par le CHRU de Montpellier en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme F..., présidente,
Mme G..., première conseillère,
M. B..., conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.
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N° 18MA00409