Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 février 2015 et le 18 juin 2015, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 12 décembre 2014 ;
2°) d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 18 avril 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article 21 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union Européenne C-413/99 du 17 septembre 2002, C-200/02 du 19 octobre 2004, C-34/09 du 8 mars 2011, C-86/12 du 10 octobre 2013 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Lafay.
1. Considérant que Mme A...B..., de nationalité cap-verdienne, relève appel du jugement du 12 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 avril 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant que la décision du préfet des Alpes-Maritimes rejetant la demande de carte de séjour temporaire présentée par Mme A... B...au titre de sa situation familiale, cite l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 19 octobre 2004, mentionne que la requérante vit en concubinage avec un ressortissant portugais avec qui elle a eu un enfant né le 21 décembre 2012, et qu'elle ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 121-1 dès lors que son fils ne remplit pas les conditions exigées par ce texte ; qu'en ne mentionnant ni l'article 3-1 de la convention de New-York, ni l'accord franco- cap-verdien du 24 novembre 2008 sur lesquels il ne s'est pas fondé, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 citées au point précédent ; que le moyen tiré de ce que la décision du 18 avril 2013 serait insuffisamment motivée doit être écarté ;
4. Considérant que les dispositions combinées de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de l'article 7 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, et de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans les arrêts C-413/99 du 17 septembre 2002, C-200/02 du 19 octobre 2004, C-34/09 du 8 mars 2011 et C-86/12 du 10 octobre 2013, confèrent au ressortissant mineur d'un Etat membre, en sa qualité de citoyen de l'Union, ainsi que, par voie de conséquence, au ressortissant d'un Etat tiers, parent de ce mineur et qui en assume la charge, un droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil à la double condition que cet enfant soit couvert par une assurance maladie appropriée et que le parent qui en assume la charge dispose de ressources suffisantes ; que l'Etat membre d'accueil, qui doit assurer aux citoyens de l'Union la jouissance effective des droits que leur confère ce statut, ne peut refuser à l'enfant mineur, citoyen de l'Union, et à son parent, le droit de séjourner sur son territoire que si l'une au moins de ces deux conditions, dont le respect permet d'éviter que les intéressés ne deviennent une charge déraisonnable pour ses finances publiques, n'est pas remplie ;
5. Considérant que la jouissance effective du droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil par un citoyen de l'Union mineur implique nécessairement le droit pour celui-ci d'être accompagné par la personne qui en assure effectivement la garde ; que Mme A... B...tire ainsi de sa qualité de mère d'un enfant mineur, citoyen de l'Union, le droit de séjourner en France, Etat membre d'accueil, sous la double condition de disposer de ressources suffisantes et d'une couverture d'assurance maladie appropriée ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A...B..., qui bénéficie de l'aide médicale d'Etat, ne travaille pas ; que si elle soutient que son concubin disposait à la date de la décision d'un contrat de travail, les pièces produites ne font état que de missions de travail temporaire ; qu'ainsi, elle ne justifie pas, à la date de la décision contestée, disposer pour elle et sa famille de ressources suffisantes ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement porterait atteinte au principe de liberté de circulation des citoyens de l'Union européenne doit être écarté ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant que l'attestation délivrée par un médecin en 2013 et faisant état d'un suivi de soins depuis le mois de juillet 2006 ne suffit pas, à elle seule et compte tenu de son caractère général, à établir que Mme A... B...serait entrée en France à cette date ; qu'elle ne démontre pas, par les pièces produites, résider en France avant le début de l'année 2012 ; que sa relation avec le père de l'enfant né le 21 décembre 2012, avec lequel elle emménage à Nice le 15 décembre 2012, est récente ; qu'ainsi, elle ne justifie pas avoir durablement établi le centre de ses intérêts et sa vie privée et familiale en France à la date de la décision contestée ; que, dans ces conditions, le refus de titre de séjour ne peut être regardé comme ayant porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; que la décision contestée n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer l'enfant de Mme A... B...de sa mère ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er: La requête de Mme A... B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- M. Laso, président assesseur,
- M. Lafay, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016
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N° 15MA00901