Par un jugement n° 1206750 du 19 décembre 2016, le tribunal administratif a condamné le département des Bouches-du-Rhône à payer à M. et Mme C...la somme de 31 900 euros.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 février 2017, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par la SCP Lesage, A..., Gouard-Robert, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 décembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme C...devant le tribunal administratif de Marseille tendant à l'indemnisation de la perte de valeur vénale du bien immobilier et des troubles dans les conditions d'existence ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme C...la somme de 1 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préjudice consécutif à la modification de la circulation générale ne présente pas un caractère anormal ;
- la présence de la voie nouvelle à proximité de la maison d'habitation n'excède pas les inconvénients que doivent supporter sans indemnité les riverains des voies publiques ;
- une vue dégagée en zone urbaine ne constitue pas un droit acquis susceptible d'être indemnisé ;
- l'ouvrage améliore l'accès à l'habitation ;
- le mur antibruit limite les nuisances sonores et masque la vue ;
- le préjudice n'est pas spécial ;
- la valeur vénale de l'habitation n'est pas réduite ;
- les nuisances sonores ne peuvent pas être indemnisées ;
- le préjudice correspondant aux difficultés de tirage de la cheminée est limité à 1 300 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2018, M. et MmeC..., représentés par la SCP Berenger, Blanc, Burtez, Doucede et Associés, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le dommage est anormal et spécial ;
- les conditions d'habitation ont été altérées ;
- la perte de valeur vénale de la propriété est établie ;
- les travaux ont occasionné des nuisances sonores importantes, des vibrations et une inondation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant le département des Bouches-du-Rhône, et de MeB..., représentant M. et MmeC....
Considérant ce qui suit :
1. Le département des Bouches-du-Rhône a été condamné à verser à M. et Mme C... la somme de 31 900 euros par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 décembre 2016 dont il relève appel. L'évaluation faite par le tribunal administratif des frais de rehaussement des conduits de cheminée de l'habitation n'est pas contestée.
2. La propriété de M. et Mme C...était contiguë au boulodrome de la commune de La Destrousse dont elle était séparée par une haie d'arbres de haute tige. Elle est bordée désormais par un carrefour giratoire et la voie de liaison des routes départementales n° 7 et 45f, mis en service en 2011, dont le département des Bouches-du-Rhône est maître d'ouvrage et à l'égard desquels M. et Mme C...ont la qualité de tiers. La voie, réalisée en surplomb du terrain sur lequel est bâtie l'habitation des intéressés, est longée par un écran constitué de lames de bois surmontant un mur de béton d'une hauteur moyenne de 4,58 mètres placé à 6 mètres de la façade. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise ordonnée par le jugement avant-dire droit du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Marseille, que les fenêtres de plusieurs pièces du rez-de-chaussée et de l'étage donnent directement sur ce mur antibruit qui réduit la vue et diminue la clarté de certaines pièces. En revanche, le bien immobilier ne subit pas de perte d'ensoleillement et l'écran atténue les nuisances sonores. En dépit de ces derniers éléments, la valeur vénale du bien est réduite du fait de la proximité de la voie et de l'écran. Le préjudice résultant de cette dépréciation, qui a été évaluée par le rapport d'expertise à 25% du prix initial de la propriété, présente ainsi un caractère anormal. Le dommage est en outre spécial, seules trois habitations étant situées aux abords immédiats de la nouvelle voie. En fixant à la somme de 30 000 euros l'indemnité due au titre de la diminution de la valeur vénale de la propriété de M. et Mme C..., le tribunal n'en a pas fait une inexacte évaluation excessive.
3. M. et Mme C...ont la qualité de tiers par rapport à l'opération de travaux publics de création d'un carrefour giratoire et d'une voie de liaison entre deux routes départementales. Les premiers juges ont fait une juste appréciation des troubles subis par les intéressés dans leurs conditions d'existence en leur allouant, pour 7 jours de travaux de compactage du remblai, la somme de 300 euros chacun.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le département des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser à M. et Mme C...la somme de 31 900 euros.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et MmeC..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le département des Bouches-du-Rhône demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et MmeC....
D É C I D E :
Article 1er : La requête du département des Bouches-du-Rhône est rejetée.
Article 2 : Le département des Bouches-du-Rhône versera à M. et Mme C...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département des Bouches-du-Rhône et à M. et Mme D...C....
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2018.
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N° 17MA00824