Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 24 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 23 juin 2016 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de remettre à la charge de M. A... B..., à concurrence de 520 euros, la contribution additionnelle aux prélèvements sociaux à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.
Il soutient que :
- le tribunal a considéré à tort qu'un ressortissant néerlandais affilié au régime de sécurité sociale de cet Etat ne peut être légalement assujetti à la contribution additionnelle au prélèvement social prévue par l'article L. 262 24 du code de l'action sociale et des familles et l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale ;
- cette contribution est affectée au financement du revenu de solidarité active qui n'est pas une prestation sociale.
La requête a été communiquée à M. A... B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté ;
- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-623/13 du 26 février 2015 ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane,
- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B...est un citoyen néerlandais qui réside fiscalement au Pays-Bas. Il a cédé, le 4 septembre 2012, un bien immobilier en France et a été imposé aux contributions sociales sur la plus-value immobilière réalisée à l'occasion de cette cession.
2. M. A... B...a été déchargé de l'imposition en litige par le tribunal administratif au motif que l'interprétation donnée par la Cour de justice de l'Union européenne du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, fait obstacle à ce que l'administration applique les dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale à la plus-value réalisée par M. A... B..., qui relève du régime de sécurité sociale néerlandais en sa qualité d'ancien salarié aux Pays-Bas et n'est donc pas à la charge d'un régime de sécurité sociale en France.
3. Selon le ministre, les premiers juges ont considéré à tort qu'un ressortissant néerlandais affilié au régime de sécurité sociale de cet Etat ne peut être légalement assujetti à la contribution additionnelle au prélèvement social prévue par l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles dès lors que les contributions additionnelles aux prélèvements sociaux sont spécifiquement affectées au financement du revenu de solidarité active (RSA), lequel constitue une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale et non une prestation de l'assurance maladie.
4. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt du 26 février 2015, Ministre de l'économie et des finances contre Gérard de Ruyter (C-623/13), d'une part, que " la circonstance qu'un prélèvement soit qualifié d'impôt par une législation nationale n'exclut pas que, au regard du règlement n° 1408/71, ce même prélèvement puisse être regardé comme relevant du champ d'application de ce règlement ", y compris lorsque, comme en l'espèce, ce prélèvement est " assis sur les revenus du patrimoine des personnes assujetties, indépendamment de l'exercice par ces dernières de toute activité professionnelle " et, d'autre part, que " l'élément déterminant aux fins de l'application du règlement n° 1408/71 réside dans le lien, direct et suffisamment pertinent, que doit présenter la disposition en cause avec les lois qui régissent les branches de sécurité sociale énumérées à l'article 4 du règlement n° 1408/71 ", " le critère déterminant étant celui de l'affectation spécifique d'une contribution au financement d'un régime de sécurité sociale ".
5. Il convient donc en l'espèce de vérifier si la contribution additionnelle aux prélèvements sociaux est spécifiquement affectée au financement d'un régime de sécurité sociale.
6. La contribution additionnelle aux prélèvements sociaux est codifiée à l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles. Dans sa rédaction est ainsi rédigé : " Le revenu de solidarité active est financé par le fonds national des solidarités actives mentionné au II et les départements. / III.- Les recettes du fonds national des solidarités actives sont, notamment, constituées par une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sont passibles des mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 1, 1 % et ne peut l'excéder... ". L'article L. 262-2 du même code, dans sa rédaction alors applicable prévoit que : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective, dont le foyer dispose de ressources inférieures à un revenu garanti, a droit au revenu de solidarité active (...) ".
7. Il résulte de ces deux textes que la contribution additionnelle aux prélèvements sociaux est affectée au financement du fonds national des solidarités actives, lequel assure le versement, entre autres, du revenu de solidarité active.
8. S'agissant de la qualification à donner à ce revenu, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt du 28 mai 1974, Odette Callemeyn contre Etat belge (187/73), retient qu'une prestation relève de l'assistance sociale pour l'application de ce règlement " notamment lorsqu'elle retient le besoin comme critère essentiel d'application et fait abstraction de toute exigence relative à des périodes d'activité professionnelle, d'affiliation ou de cotisation ". Dès lors, le revenu de solidarité active doit être regardé comme une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale dès lors qu'il bénéficie à toute personne résidant en France sans qu'aucun autre critère que le niveau de ressource ne soit exigé pour l'ouverture des droits.
9. La contribution en litige, dès lors qu'elle est spécifiquement affectée au financement d'une prestation qui ne relève pas de l'article 4 du règlement du Conseil du 14 juin 1971, n'entre pas elle-même dans le champ d'application de ce règlement. Dès lors, c'est à bon droit que la plus-value de cession réalisée par M. A... B...a été soumise à la contribution additionnelle au prélèvement social prévue par l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles et le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier, par l'article 2 du jugement attaqué, a déchargé M. A... B...de ce prélèvement et à demander à ce qu'il soit remis à la charge de M. A... B...la somme de 520 euros.
10. En l'absence de tout autre moyen soulevé par M. A... B...tant en première instance qu'en appel et dont la Cour serait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu de faire droit à la demande du ministre et de remettre à la charge de M. A... B...la somme de 520 euros au titre de la contribution additionnelle au prélèvement social prévue à l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1501832 du 23 juin 2016 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La somme de 520 euros est remise à la charge de M. A... B...au titre de la contribution additionnelle au prélèvement social.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. C... A...B....
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président par intérim de la formation de jugement,
- M. Haïli, premier conseiller,
- M. Sauveplane, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
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N° 16MA03935